Amélie Nothomb : Les Catilinaires

amélie nothombAmélie Nothomb, née Fabienne Claire Nothomb en 1966 à Etterbeek (Bruxelles), d’un père diplomate,  est une femme de lettres belge francophone. Après une première année universitaire en droit, elle obtient une licence en philologie romane à l'Université libre de Bruxelles, et envisage un moment la carrière d'enseignant, passant l'agrégation. En 1992, elle commence sa carrière d'écrivain avec un premier roman, Hygiène de l’assassin ; Les Catilinaires, son troisième ouvrage, date de 1995.

Emile, retraité de l’enseignement, ancien professeur de grec et latin au lycée, et sa femme Juliette, pensent avoir trouvé le Paradis en achetant une petite maison perdue en pleine nature, loin du monde et de la ville bruyante. Ils n’ont qu’un seul voisin, de l’autre côté du pont qui enjambe la rivière. Tout semble parfait à leurs yeux pour y finir leurs vieux jours pleins d’amour. Jusqu’à ce jour fatidique, où leur voisin, Palamède Bernardin vient frapper à leur porte. Par politesse et pour faire connaissance, ils le font entrer, assoir et prendre un café. L’homme n’est guère bavard, ne répondant que par des « oui » ou des « non » aux questions mais révélant éventuellement qu’il est médecin. L’homme est étrange certes, mais il faut de tout pour faire un monde. Sauf que, Bernardin va venir tous les jours sans exceptions à 16h précise taper l’incruste, s’installant dans « son » fauteuil et attendant qu’on lui serve un café pour ne repartir que deux heures plus tard, sans quasiment desserrer les dents !

Voilà typiquement le genre de roman où le lecteur doit s’interdire de penser « Moi, si j’étais Emile… », mais au contraire entrer dans le jeu de l’écrivain même si évidemment la lecture en devient crispante. Car nous sommes vite pris dans ce faux thriller : Bernardin sait être inquiétant, par son mutisme borné, sa violence lorsque le couple refusant d’ouvrir, il manque défoncer leur porte. Que veut-il à la fin ? A quoi riment ses visites ponctuelles et sans objet ?

Le Paradis devient vite Enfer et Emile, sympathique vieil homme amoureux de sa Juliette au début du roman se voit contraint de montrer un autre aspect de sa personnalité, un personnage falot, lâche et faible, incapable de dire non à l’envahissant Bernardin. Avec sa femme ils vont imaginer mille combines pour se débarrasser de l’encombrant mais rien n’y fait. La meilleure défense étant l’attaque, ce sont eux qui vont porter le fer chez Bernardin, rencontrer sa femme monstrueusement obèse et pour ainsi dire séquestrée par son époux. Après avoir tout tenté pour ne plus voir Bernardin, les deux retraités vont essayer de porter secours à la grosse pour faire pression sur son mari. Tout cela ne pourra se faire sans casse… à moins qu’il ne s’agisse d’une délivrance.

Amélie Nothomb écrit beaucoup, mais sans être jamais mauvais, il y a peu d’excellent dans sa longue bibliographie. Personnellement j’ai bien aimé ce roman. Il est très prenant, se lisant comme un thriller avec ce côté inquiétant et mystérieux ; on suit avec intérêt les différentes phases psychologiques par lesquelles passe Emile pour tenter de comprendre et contrer ce voisin, on s’agace plus d’une fois de ses réactions ou de son manque de volonté. Bref, on ne reste pas indifférent.

« Juliette et moi, nous voulions avoir soixante-cinq ans, nous voulions quitter cette perte de temps qu’est le monde. Citadins depuis notre naissance, nous désirions vivre à la campagne, moins par amour de la nature que par besoin de solitude. Un besoin forcené qui s’apparente à la faim, à la soif et au dégoût. Quand nous avons vu la Maison, nous avons éprouvé un soulagement délicieux : il existait donc, cet endroit auquel nous aspirions depuis notre enfance. Si nous avions osé l’imaginer, nous l’aurions imaginé comme cette clairière près de la rivière, avec cette maison qui était la Maison, jolie, invisible, escaladée d’une glycine. »  

amélie nothombAmélie Nothomb  Les Catilinaires   Albin Michel  - 210 pages –