Camille, mon envolée

Par Denis Arnoud @denisarnoud

Camille, mon envolée de Sophie Daull aux éditions Philippe Rey (Rentrée littéraire 2015)



   Alors que la famille était en plein préparatifs pour Noël, Camille, la fille de l'auteur, est brusquement tombée malade. Après quatre jours de souffrance, elle décède.
   Sophie Daull lui adresse ce livre. Elle lui raconte ses quatre derniers jours, le tremblement de terre qu'a été sa mort, les premiers jours sans elle jusqu'à son enterrement. Les chapitres racontant les suites immédiates du décès de Camille, cette jeune fille pleine de vie alternent avec le récit de la vie de l'auteur les mois qui ont suivi.
   Dans ce livre hommage, Sophie Daull, comédienne, décrit le champ de ruines qu'est devenu sa vie et celle de son mari. Un décor qu'elle éclaire de ses souvenirs. Un lumière tantôt aveuglante et douloureuse, tantôt douce et apaisante. La mort de Camille est une mort pour elle aussi, c'est une nouvelle vie qu'il va falloir reconstruire, marquée par le deuil, par le vide, par l'absence. Une vie hantée par le fantôme de Camille.
   "Dans cette maison, on s'aimait, on s'engueulait, on riait : on était délicieusement libres de s'aimer, de s'engueuler, de rire. Ton jeune sang et le nôtre, un peu plus épais formaient un fleuve intranquille où l'avenir battait pavillon.     C'est pour ça que je vivrai ta vie, que mon sang aura désormais toujours 16 ans. Tu me regarderas et me guideras selon ce que tu fus, ce que tu promettais, ce que tu aimais de moi. Je vais exister par en-dessous, par soustraction, par extension de toi, dans la copie de ta pudeur contre mon excentricité, de ta réserve contre mon exubérance, de ton repli contre mes tripes à l'air."
  Dans ce "roman", l'auteur en s'adressant à Camille, en parlant de leurs souvenirs, prolonge la vie de sa fille. Elle se libère des souvenirs encore frais de ses derniers instants.
   "Mais je poursuis le récit, la mission. J'écris comme on dépollue les sols rendus infertiles par une catastrophe naturelle."
   Ce livre, reçu dans le cadre de l'opération 68 premières fois organisée par L'insatiable Charlotte, est le type de livre que je fuis normalement. Le type de livre ou le lecteur se sent voyeur de la détresse de l'auteur. Je serais donc passé à côté de ce très beau récit, plein de pudeur, de colère, de douceur et d'amour porté par la superbe plume de Sophie Daull. Un livre poignant, marquant, émouvant mais aussi plein d'humour et de tendresse dont je recommande vivement la lecture.