Pauline Dubuisson, née à Malo-les-Bains le 11 mars 1927 et décédée le 22 septembre 1963 à Essaouira, tue son amant Félix Bailly à Paris en 1951. Elle devient alors le fait divers des années 1950, celle que l’on appelle « le monstre », celle dont le procès, auquel les gens se rendent comme au cinéma, est bafoué, celle qui inspire (et inspire seulement) La Vérité à Henri-Georges Clouzot. Alors que Pauline voulait « simplement » être une femme libre, qui travaille et non pas une femme qui s’occupe de mari et enfants uniquement, être un médecin. En 1953, elle est condamnée à la prison à la perpétuité. Elle est libérée six ans plus tard pour bonne conduite.
C’est bien peu pour résumer l’existence de celle dont Philippe Jaenada s’est fait le nouvel avocat dans son œuvre monumentale. Mais voilà ce que le lecteur lambda peut principalement savoir ou lire sur Pauline Dubuisson avant de sa plonger dans La petite femelle. Pour mieux la connaître, pour mieux la comprendre ou appréhender son cas, sa vie, l’auteur du Chameau Sauvage commence l’analyse à partir de ce que lui dévoile l’arbre généalogique de Pauline et guide le lecteur jusqu’à son décès. Il passe par les années d’occupation pendant lesquelles, bien que très jeune, la jeune femme a été la maîtresse d’allemands. Détaille la relation avec son père ou le bon statut de la famille, son entrée en école de médecine, ses vacillations amoureuses si justifiées.
En ayant conscience de tout ce qu’il ne sait pas et ne pourra jamais savoir, Philippe Jaenada « observe », détaille, étudie Pauline à travers ses mots, ses gestes, son époque, ses désirs. A travers ce que l’on veut d’elle, ce que l’on fait d’elle. C’est un travail énorme qu’il a accompli pour que justice lui soit enfin rendue. En plus du texte qui a pu naître après les conséquentes et précises recherches, l’auteur, obsédé, fasciné, replace sa « cliente » dans la logique, dans le monde des humains en la liant à ses expériences personnelles. Il est en effet très présent tout au long d’un livre dans lequel il semble casser tous les codes. Au cours d’un livre dans lequel il s’attarde sur tout ce sur quoi il peut s’attarder pour instruire, pour étonner, pour dégoûter, pour démontrer. Pour parler des hommes et de la société aussi. Évidemment. Une réhabilitation intense, peut-être longue parfois, mais à saluer immanquablement.
Présentation de l’éditeur :
Au mois de novembre 1953 débute le procès retentissant de Pauline Dubuisson, accusée d’avoir tué de sang-froid son amant. Mais qui est donc cette beauté ravageuse dont la France entière réclame la tête ? Une arriviste froide et calculatrice ? Un monstre de duplicité qui a couché avec les allemands, a été tondue, avant d’assassiner par jalousie un garçon de bonne famille ? Ou n’est-elle, au contraire, qu’une jeune fille libre qui revendique avant l’heure son émancipation et questionne la place des femmes au sein de la société ? Personne n’a jamais voulu écouter ce qu’elle avait à dire, elle que les soubresauts de l’Histoire ont pourtant broyée sans pitié. Telle une enquête policière, La Petite Femelle retrace la quête obsessionnelle que Philippe Jaenada a menée pour rendre justice à Pauline Dubuisson en éclairant sa personnalité d’un nouveau jour. À son sujet, il a tout lu, tout écouté, soulevé toutes les pierres. Il nous livre ici un roman minutieux et passionnant, auquel, avec un sens de l’équilibre digne des meilleurs funambules, il parvient à greffer son humour irrésistible, son inimitable autodérision et ses cascades de digressions. Un récit palpitant, qui défie toutes les règles romanesques.