Erlendur, enquêteur et héros récurrent de l’écrivain, est en vacances. Il campe de manière spartiate dans ce qui reste de la maison où il vécu enfant, dans la région sauvage des fjords de l’Est. Si la nature est belle, elle sait aussi être rude et tragique. Erlendur ne le sait que trop bien puisque c’est sur cette lande d’Islande que son jeune frère a disparu pour toujours quand enfants tous les deux, ils ont été pris dans une tempête de neige. Région sinistre encore puisque dans les années quarante, un groupe de soldats anglais s’est perdu dans ces montagnes pendant une tempête faisant de nombreux morts et que cette même nuit, une jeune femme a disparu dans ce même secteur et n’a jamais été retrouvée. Cette histoire excite la curiosité d’Erlendur, qui va fouiller le passé pour trouver coûte que coûte ce qui est arrivé à Matthildur.
De cette époque ancienne il ne reste que peu de survivants, Jakob l’époux de Matthildur est décédé, Ezra l’ami proche du couple est très âgé, tout comme les sœurs de la disparue. Par ses questions incessantes Erlendur va s’immiscer dans la vie privée des uns et des autres, remuer des souvenirs tragiques que certains préféreraient taire à jamais et lentement notre enquêteur va flairer l’embrouille, Matthildur est-elle réellement morte durant la terrible tempête comme le prétendent tous les témoins d’alors ?
Un roman absolument magnifique et particulièrement émouvant sur le deuil, ou plus exactement comment faire son deuil quand les corps des victimes ne sont pas retrouvés. La question se pose pour Ezra mais aussi pour Erlendur, le premier pleure en vain une femme dont il ne sait exactement ce qui lui est arrivé, le second un frère dont il se pense responsable du décès. Dans une interview l’écrivain déclarait : « Mes romans traitent de disparitions, mais ils ne traitent pas principalement de la personne qui a disparu, plus de ceux qui restent après la disparition, dans un état d'abandon. Je m'intéresse à ceux qui sont confrontés à la perte. »
Arnaldur Indridason a une écriture très douce, la formule n’est pas terrible j’en conviens, mais à le lire c’est le sentiment que je ressens. Une empathie pour ses personnages, une certaine mélancolie ou une infinie tristesse dans le déroulé de l’intrigue, car si des faits horribles ont été commis, les circonstances les excusent-ils ? La justice doit-elle toujours frapper, même après tant d’années, le remords n’est-il pas une peine plus terrible encore ? Autant de questions que le lecteur se pose en refermant l’ouvrage.