Mangez-le si vous voulez – Jean Teulé

Couverture Mangez-le si vous voulez

Résumé :

« Nul n’est à l’abri de l’abominable. Nous sommes tous capables du pire!
Le mardi 16 août 1870, Alain de Monéys, jeune Périgourdin intelligent et aimable, sort du domicile de ses parents pour se rendre à la foire de Hautefaye, le village voisin. Il arrive à destination à quatorze heures. Deux heures plus tard, la foule devenue folle l’aura lynché, torturé, brûlé vif et même mangé. Pourquoi une telle horreur est-possible? Comment une foule paisible peut-elle être saisie en quelques minutes par une frénésie aussi barbare?
Jean Teulé a reconstitué avec une précision redoutable chaque étape de cet atroce chemin de croix qui constitue l’une des anecdotes les plus honteuses de l’histoire du XIXe siècle en France. »

Mon avis :

Il y a déjà un petit bout de temps, une amie m’avait parlé de ce livre et m’avait encouragé à le lire car pour elle, c’était un véritable chef d’œuvre. Mais j’avoue que l’histoire d’un homme se faisant torturer puis manger ne m’enchantait pas trop… Finalement, ce livre a fini par atterrir entre mes mains et je me suis donc lancée.

Mangez-le si vous voulez – Jean Teulé

Ce livre démarre un matin d’août 1870, en plein contexte de guerre contre la Prusse, sous le régime de Napoléon III. Alain de Monéys, qui dans les jours suivants doit partir au front en Lorraine, veut régler certaines affaires avant son départ. Il se rend donc à la foire de Hautefaye. C’est un homme très populaire, très apprécié, très affable. Il rend beaucoup de services, souvent gratuitement et tout le monde le salue donc avec une sincère amitié.
Au milieu de la foire, il aperçoit son cousin De Maillard. Celui-ci, ainsi que d’autres personnes au cœur de la foire lisent le journal et commencent à discuter de la guerre en Prusse et des défaites de l’empereur qui commencent à s’accumuler. C’est alors que De Maillard, après avoir eu une parole malheureuse (« Vive la Prusse » vraisemblablement) s’enfuit par-dessus une clôture. Les esprits s’échauffent et Alain de Monéys, dans sa bonté habituelle essaie de calmer la situation. Seulement, il ne fait qu’empirer la situation et c’est là que son calvaire va commencer.

Il  a beau faire la paix partout : « Mes amis, mes amis !… », il ne reçoit que des insultes. Le public mâchonne sa gloire. Orage de colère et tourbillon d’injures ! Ah, malheur à celui pris dans cet affreux pot…

Bien qu’Alain soit connu de tous, les gens l’appellent « le Prussien ». Ils deviennent incapables de démêler le vrai du faux et ils sont tous tellement aveuglés par l’animosité qu’ils ne se rendent même plus compte de ce qu’ils font. Ils sont pris dans un mouvement de foule. C’est un peu comme si tous ces gens étaient sous l’influence d’une quelconque drogue. Ils ne sont plus eux-mêmes, ils perdent la tête. Ils sont tellement fatigués et triste de cette guerre en Prusse qu’ils doivent libérer leur colère. C’est cela qui rend cette lecture si angoissante, si oppressante. Je n’ai pas pu m’empêcher de penser « Et moi, si j’y étais, est-ce que je l’aurais défendu comme Anthony, Mazaret et Dubois ou est-ce que je me serais laissé prendre dans le mouvement de foule ? ».

C’est à cause de toi ! C’est à cause de toi ! Il est devenu responsable de tout. Le manque d’eau, c’est lui ! Le désastre contre la Prusse, c’est lui ! Son cœur, ses os, son sang, ses pieds et ses paupières forment une bouillie avec ses chairs entières. Ils broient tout de lui.

En lisant cette œuvre, on a évidemment pitié de ce pauvre Alain de Monéys et on ne lui souhaite qu’une chose : la fin de ces atroces sévices. Mais je pense qu’on ne peut pas non plus ressentir de la haine envers tous ces villageois. Certes, ce qu’ils font est horrible mais quand on se plonge vraiment dans le livre on comprend qu’ils sont dans un état second, presque irréel.

Le fait que ce livre soit tiré d’une histoire vraie nous oblige à nous intéresser au contexte de guerre, de désespoir des familles ne voyant pas revenir leur enfant, frère ou mari parti au front. Cela rend ce livre d’autant plus intéressant.

J’ai beaucoup aimé cette lecture. La plume de l’auteur est très agréable, très facile à lire. De plus, la façon dont les actes de barbarie sont détaillés est assez prodigieuse. On arrive vraiment à se faire un film des évènements dans sa tête. Certes, c’est assez ignoble mais quand on est plongé dans l’action du livre on n’a pas le temps d’être dégouté. Tout est tellement rythmé qu’on reste concentré sur l’action. Seul un passage m’a vraiment fait sentir mal, presque nauséeuse (le pain et la graisse… ceux qui ont lu le livre comprendront !).

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Dans ce livre on trouve également des petites illustrations qui sont en fait des plans du village pour voir au fur et à mesure la progression de la foule et d’Alain. C’est un petit plus très appréciable !

Si je devais donner un point négatif, ce serait le fait qu’au début, dans les 2 ou 3 premiers chapitres quand Alain se rend à la foire, on rencontre beaucoup de personnages. Beaucoup trop, n’a pas le temps de se familiariser avec eux, de retenir qui ils sont.

Bref, sinon c’est un très bon livre qui se lit très rapidement et qui vous coupe totalement du monde extérieur pendant votre lecture ! Je vous le recommande, si vous avez le cœur bien accroché.

Je pense lire d’autres roman de Jean Teulé et surtout le Magasin des suicides qui me donne vraiment envie !

Note : 17/20
Mangez-le si vous voulez – Jean Teulé

– Ôtez cet homme de là. Il gêne la circulation. Emmenez-le plus loin.
Anthony, effondré, soupire. Buisson et Mazière demandent à Bernard Mathieu :
– Pour en faire quoi, plus loin ?
– Ce que vous voudrez ! répond le maire totalement dépassé par les évènements. Mangez-le si vous voulez.