Le Crime du Comte Neville d’Amélie Nothomb

Par Caroline @Lounapil

Publié aux éditions Albin Michel,

" Ce qui est monstrueux n'est pas nécessairement indigne. "

Mon petit rituel de rentrée, c'est de lire le nouveau Amélie Nothomb. L'année dernière, j'avais été ravie par Pétronille, à la fois intime et drôle. Cette année, je suis assez mitigée. Encore une fois, Amélie Nothomb nous étonne par le tout petit nombre de pages qu'elle publie (bien que la qualité n'aie rien à voir avec la quantité). Plus les années passent, plus ses romans se réduisent en épaisseur comme une peau de chagrin.

Si je vous parle ici de la petitesse du roman en terme de volume, c'est parce qu'elle joue un rôle. Ainsi, je n'ai pas vraiment eu l'impression de lire un roman mais plutôt un conte revisité. Amélie Nothomb met en scène des personnages qui m'ont beaucoup fait penser aux héros de contes: ils sont peu décrits et paraissent peu épais. Ce sont des personnages qui n'ont aucune matière romanesque. D'ailleurs l'auteur privilégie le dialogue à la description!

Elle choisit de baser son roman sur le mythe d'Iphigénie, sacrifiée par son père Agamemnon, afin d'assurer la victoire aux grecs. Le Comte de Neville a ainsi un fils baptisé Oreste, une fille aînée appelée Electre mais il n'a pas poussé le vice jusqu'à appeler son troisième rejeton Iphigénie! La petite dernière se nomme Sérieuse! Encore une fois, on sent le plaisir qu'à l'auteur de choisir des prénoms originaux et révélateurs.

Alors que Sérieuse est recueillie par une voyante au nom imprononçable, son père, le Comte de Neville se voit prédire l'avenir. Lors de sa Garden party annuelle du mois d'octobre, il assassinera un invité! Quel malheur! Pour le Comte, assassiner un invité serait du plus mauvais goût d'autant plus que ruiné, c'est la dernière garden party qu'il donnera. Il ne veut pas gâcher cette journée mémorable pour un meurtre! C'est alors que Sérieuse lui fait une proposition étonnante...

On retrouve dans l'intrigue du roman tout l'humour d'Amélie Nothomb. Ce n'est pas l'assassinat en lui-même qui épouvante le Comte. Il redoute plutôt de gâcher sa soirée et d'enfreindre les convenances! Il est tout de même Comte et il veut à tout prix sauver les apparences. Amélie Nothomb détourne les codes de la noblesse dans son roman pour en faire ressortir tout l'absurdité et c'est assez bien réussi. Elle joue aussi avec les codes de la tragédie. Ses personnages sont nobles de condition et de cœur. Le Comte de Neville sera confronté à un dilemme comme on en trouve dans les plus grandes tragédies grecques.

Cependant, les choses se déroulent de telle manière que je suis restée un peu sur ma faim. C'est bien dommage car l'ensemble apparaît prévisible et surfait. La fin du roman m'a d'ailleurs une fois de plus déçue. J'aurais aimé quelque chose de moins convenu, de plus fou.

Si j'ai aimé la façon dont l'auteur détourne les codes de la tragédie pour mieux s'en moquer, j'ai trouvé une fois de plus que l'intrigue restait superficielle comme les personnages. C'est donc une lecture en demie-teinte pour moi! Attendons l'année prochaine...