Grand retour du duo Jeph Loeb/Tim Sale, ce premier numéro de Captain America : White sort sept ans après le numéro zéro qui devait normalement lancer la série. Prévue pour durer cinq numéros au total, cette mini-série est la quatrième de l'équipe tournant autour d'un héros Marvel auquel est associé une couleur (les précédents titres ayant été les excellents Spider-Man : Blue, Daredevil : Yellow et Hulk: Gray où les auteurs mettaient en parallèle les débuts des héros ainsi que leurs premiers amours). Mais ce numéro atteint-il la beauté graphique et l'intelligence scénaristique des précédentes séries ?
Débutant dans le présent, Steve Rogers alias Captain America se réveille brusquement alors qu'il est entouré des Vengeurs. Où est-il ? Qui sont ces gens ? Ce sont les premières questions que se pose Rogers après avoir hurlé le nom de son partenaire : Bucky. Après avoir repris ses esprits, Steve se remet à penser à ce qu'il lui est arrivé pour en arriver là alors qu'il a l'impression que la Seconde Guerre Mondiale avait lieu la veille. Comme pour les précédentes mini-séries du duo sur les héros Marvel, ce numéro est une réécriture des aventures du Silver Age du protagoniste. Des aventures donc modernisées afin de les raconter à un nouveau public mais également de les présenter sous un autre jour. Autre point commun avec deux des précédentes mini-séries de la collection, ce premier numéro s'ouvre sur une scène située dans le présent tandis que le reste de la série se déroulera dans le passé. Si dans Spider-Man : Blue cela était mis en avant par un teint bleuté tandis que dans Daredevil : Yellow l'éclairage était plus sombre, ici le coloriste Dave Stewart choisi d'utiliser des couleurs plus ternes rendant ainsi l'armure d'Iron Man moins brillante ou le rouge du costume de Giant-Man davantage bordeaux. C'est ainsi que lorsque nous plongeons en décembre 1941 en Afrique du Nord, nous nous retrouvons avec des couleurs bien plus flamboyantes permettant ainsi d'accentuer la différence entre les deux périodes afin de nous faire comprendre la détresse que peut avoir Steve en se réveillant à une époque aussi différente.Très vite, on comprend une nouvelle fois que le duo à réussi à saisir le ton qu'avaient les histoires de Captain America et de Bucky durant le Golden Age lorsque leurs aventures étaient écrites par Joe Simon et dessinée par Jack Kirby ou durant le Silver Age où Stan Lee, après avoir réintroduit Cap dans les temps modernes, avait écrit quelques histoires supplémentaires du duo situées durant la Seconde Guerre Mondiale. C'est ainsi que même si l'époque où se déroule la majorité du récit est une période sombre marquée par des actes affreux, l'aventure de nos héros conserve une certaine légèreté. Le sentiment qui se dégage de ce récit est celui de l'innocence : nos héros sont jeunes et même si ils sont sur le champ de bataille, il leur reste une douceur proche de celle d'un enfant que perdra finalement Cap à son réveil et qu'il apprendra la disparition de son partenaire. L'innocence du héros jusqu'à la perte d'un être proche est, on s'en rend compte une nouvelle fois, l'un des fils rouges de ces mini-séries Marvel de Loeb et Sale et que ces derniers continuent de l'exploiter car il s'agit de ce qui a peut-être le mieux caractérisé le passage du Golden au Silver Age : la perte cette innocence qu'avaient les héros des années 1930 et 1940. On remarquera également une référence lors de la seconde moitié de l'histoire au cinéma de cette époque avec un hommage au film Casablanca. Sale lui aussi tient à teinter encore davantage le récit de l'empreinte des aventures que les héros avaient durant le Golden et Silver Age en rapprochant son style graphique de celui de Kirby. Tout n'est pas parfait au niveau du graphisme (notamment le visage de Thor qui n'est pas terrible) mais cet effort de la part du dessinateur est intéressant à noter.
En plus de contenir l'histoire "principale", ce numéro un contient également une réédition du numéro zéro. Le prix de cinq dollars peut alors sembler cher pour ceux qui avaient déjà lu ce numéro en 2008 mais peut également paraître tout à fait justifier à ceux qui n'avaient jamais toucher à cette introduction. Cette histoire, se déroulant avant, nous conte les origines de Bucky Barnes et son apprentissage auprès de Cap pour devenir son sidekick. Si le sentiment de l'innocence est toujours présent, il est notamment mis en retrait par celui de la mélancolie. Un sentiment d'autant plus présent que Loeb et Sale décident de reprendre un numéro précis des précédentes aventures de Cap et Bucky (Tales of Supense 63 de Lee et Kirby) en reproduisant parfois certaines cases en reprenant le même cadrage tout en le rallongeant. On a donc cette étrange impression de lire une aventure s'étant produite par le passé et qui nous revient à l'esprit sans le vouloir. Ceux qui connaissent l'histoire de Cap (ou qui ont tout simplement vu les films même si il y a des différences) connaissent le destin de Bucky ; voir donc Cap accepter cet enfant comme partenaire dans ses missions dangereuses fait donc quelque chose. Un numéro zéro qui permet également d'accentuer la dynamique qu'ont ces deux personnages et le fait que l'un complète l'autre : malgré son jeune âge, Bucky résonne comme la voix de la raison pour Steve. C'est également judicieux de la part de l'équipe créative d'avoir aussi mis en avant la vie civile de nos héros.
Captain America : White #1 est un numéro brillant posant des fondations solides pour une mini-série que l'on espère toute aussi excellente que ce premier chapitre ou que les autres œuvres que l'on doit au dio. On retiendra principalement l'atmosphère qui se dégage de ces deux récits ainsi que le graphisme de Sale. Ne vous arrêtez pas au prix car ce récit est d'excellente qualité et abordable quelque soit votre connaissance en matière de comics !