Des poches dans la poche septembre 2015

Par Marie-Claude Rioux
Plusieurs nouveautés en format poche arrivent sur les tablettes. Si les grands formats vous sont passés sous le nez, ça pourrait vous intéresser. Parmi les titres qui retiennent mon attention, plusieurs romans déjà lus, et quelques-uns qui me tentent fort. Un petit copier/coller des résumés et, s'il y a lieu, le lien vers mes billets.

UN ARRIÈRE-GOÛT DE ROUILLE - PHILIPP MEYER - FOLIO
À Buell, Pennsylvanie, les hauts-fourneaux sont éteints depuis belle lurette. Ce qui reste des heures glorieuses de la sidérurgie n'est que misère, délabrement, rouille. La somptueuse et sombre nature alentour, les inquiétants paysages de gares de triage désaffectées et d'usines à l'abandon, les bars glauques où des hommes aux abois ruminent leur triste destin, tout suinte le désespoir. À vingt ans, unis par une improbable amitié, le chétif Isaac English et l'athlétique Billy Poe devraient être à l'université, mais aucun n'a quitté sa vallée natale. Tandis qu'Isaac le surdoué s'occupe de son père invalide, Billy l'athlète raté se défoule dans les bagarres...  Quand le premier se décide enfin à tenter sa chance ailleurs – avec en poche quatre mille dollars volés à son père –, Billy accepte de faire un bout de route avec lui. Mais un incident les oppose presque aussitôt à des vagabonds, et le drame se noue, mettant à mal toutes les loyautés – amicale, amoureuse, familiale, humaine. Prenant à bras-le-corps de grands mythes américains, Philipp Meyer signe un roman ambitieux et haletant qui saisit magistralement cette Amérique en sursis, celle qui, aujourd'hui plus que jamais, survit dans un renoncement perpétuel à ses propres fondements.Plusieurs ont aimé Le fils, que je n'ai pas encore lu. J'ai découvert Philipp Meyer avec Un arrière-goût de rouille. Une lecture coup de cœur difficile à oublier… Il était temps qu'un éditeur se décide à publier ce fabuleux roman en format poche. C'est maintenant chose faite.


ON NE VOYAIT QUE LE BONHEUR - GRÉGOIRE DELACOURT - LIVRE DE POCHE«Une vie, et j'étais bien placé pour le savoir, vaut entre trente et quarante mille euros. Une vie; le col enfin à dix centimètres, le souffle court, la naissance, le sang, les larmes, la joie, la douleur, le premier bain, les premières dents, les premiers pas; les mots nouveaux, la chute de vélo, l'appareil dentaire, la peur du tétanos, les blagues, les cousins, les vacances, les potes, les filles, les trahisons, le bien qu'on fait, l'envie de changer le monde. Entre trente et quarante mille euros si vous vous faites écraser. Vingt, vingt-cinq mille si vous êtes un enfant. Un peu plus de cent mille si vous êtes dans un avion qui vous écrabouille avec deux cent vingt-sept autres vies. Combien valurent les nôtres?» À force d'estimer, d'indemniser la vie des autres, un assureur va s'intéresser à la valeur de la sienne et nous emmener dans les territoires les plus intimes de notre humanité. Construit en forme de triptyque, On ne voyait que le bonheur se déroule dans le nord de la France, puis sur la côte ouest du Mexique. Le dernier tableau s'affranchit de la géographie et nous plonge dans le monde dangereux de l'adolescence, qui abrite pourtant les plus grandes promesses.J'ai lu, comme plusieurs, La liste de mes envies, une gentille petite histoire. Avec On ne voyait que du bonheur, j'ai été ébranlée et découvert que Grégoire Delacourt pouvait jouer dans la cour des grands auteurs.LA FERME - TOM ROB SMITH - POCHETAprès la trilogie Enfant 44, un roman paranoïaque et hautement compulsif, inspiré d'un épisode traumatisant vécu par l'auteur et sa famille. Ta mère... elle ne va pas bien. Elle s'imagine des choses – des choses terribles, terribles. Elle est à l'hôpital. Elle a été internée. Un appel de son père. Quelques mots. Et Daniel qui imaginait ses parents profiter de leur retraite dans une charmante ferme suédoise voit son monde basculer. Et puis un autre appel. Sa mère. Je suis sûre que ton père t'a parlé. Cet homme ne t'a dit que des mensonges. Je ne suis pas folle. Je n'ai pas besoin de médecin. J'ai besoin de la police. Deux histoires. Deux vérités. Qui croire? Jusqu'où Daniel sera-t-il prêt à aller pour lever le voile? Au risque de découvrir des secrets plus terribles encore...J'ai été complètement bluffé par ce romanEt maintenant, ceux que je compte lire bientôt.

LES DOUZE TRIBUS D'HATTIE - AYANA MATHIS - GALLMEISTER POCHEGare de Philadelphie, 1923. La jeune Hattie arrive de Géorgie en compagnie de sa mère et de ses sœurs pour fuir le Sud rural et la ségrégation. Aspirant à une vie nouvelle, forte de l'énergie de ses seize ans, Hattie épouse August. Au fil des années, cinq fils, six filles et une petite-fille naîtront de ce mariage. Douze enfants, douze tribus qui égrèneront leur parcours au fil de l’histoire américaine du XXe siècle. Cette famille se dévoile peu à peu à travers l'existence de ces fils et de ces filles marqués chacun à leur manière par le fort tempérament d'Hattie, sa froide combativité et ses secrètes failles. Les Douze tribus d’Hattie, premier roman éblouissant déjà traduit en seize langues, a bouleversé l'Amérique. Telles les pièces d'un puzzle, ces douze tribus dessinent le portrait en creux d'une mère insaisissable et le parcours d'une nation en devenir.C’est Electra, la tentatrice, qui m'a donné envie de le découvrir.DANDY - RICHARD KRAWIEC - POINTS SEUILArtie, voleur à la tire, sans toit ni loi, est un invisible, un laissé-pour-compte dont la vie tourne à vide. Un jour, il croise le chemin de Jolene, mère d'un petit Dandy de deux ans, bientôt aveugle et qui ne tient pas sur ses jambes. Pour son fils, elle s'efforce de gagner sa vie dignement, tout en le nourrissant de beurre de cacahuètes. Ensemble, Artie et Jolene vont s’unir et tenter de s'en sortir.ENON - PAUL HARDING - 10/18«La plupart des hommes de ma famille font de leurs épouses des veuves, et de leurs enfants des orphelins. Je suis l'exception. Ma fille unique, Kate, est morte renversée par une voiture alors qu'elle rentrait de la plage à bicyclette, un après-midi de septembre, il y a un an. Elle avait treize ans. Ma femme Susan et moi nous sommes séparés peu de temps après.» Ainsi commence Enon, du nom de la bourgade de Nouvelle-Angleterre où Charlie Crosby, détruit par cette tragédie, va entamer une longue descente aux enfers qui le mènera aux confins de la folie. Dans un paysage de fin du monde, Charlie se débat avec les démons de la drogue et le peuple des fantômes qui ne cessent de l'assaillir: celui de sa fille, dont l'existence trop brève se reconstitue à travers le prisme de ses souvenirs chaotiques, mais aussi celui des autres morts d'Enon, endormis sous la terre du petit cimetière paroissial que hante Charlie, errant nuit et jour à la recherche de la délivrance. Paul Harding, par la grâce d'une écriture somptueuse, nous offre un texte palpitant, vibrant d'émotion mais aussi d'humour et d'espoir. Loin de tout requiem, Enon est tour à tour une ode aux beautés inaltérables de la nature, un chant d'amour et un trip halluciné d'une drôlerie souvent féroce. Après Les Foudroyés, ce roman nous donne une confirmation magistrale: Paul Harding fait partie des nouveaux grands auteurs de la littérature américaine.