Chaque premier du mois je vous proposerai un interrogatoire d’un meurtrier dont j’ai lu le roman.
L’idée m’est venue en lisant une interview qu’avez fait Kerry et je me suis dit que cela serait sympa de vous offrir chaque mois un nouvel interrogatoire.
Pour ce premier interrogatoire, j’ai choisis Olivier Kourilsky dont j’ai chroniqué le livre il y a peu et dont vous pouvez retrouver la chronique de son roman "Le 7ème péché" ici.
Bonjour cher meurtrier. Merci d’avoir accepté cette interview.
Pour les enquêteurs qui ne vous connaissent pas encore, pouvez-vous me parler de vous et de vos précédents romans ?
Je suis médecin néphrologue, et j'ai dirigé un service de néphrologie dans un hôpital d’Ile de France pendant une trentaine d’années.
J'ai commencé à écrire des romans policiers il y a un peu plus de dix ans et publié sept ouvrages depuis 2005, dont le troisième a été récompensé par le prix Littré en 2010 et le dernier par le prix du polar d’Aumale en 2014.
Mes romans se déroulent le plus souvent dans le milieu médical hospitalier à des périodes diverses, allant des années 60 à l’époque contemporaine, et mettent volontiers en scène des personnages récurrents.Vous avez écrit 7 romans. De quel roman aimez-vous le plus parler ?
Vous me posez une question difficile, c'est un peu comme si on demandait à un père lequel de ses enfants est son préféré ! Ils ont tous leur charme à mes yeux, même si mon écriture a nécessairement évolué entre le premier et le septième... tout récemment, à l'occasion d'une réédition, j'ai relu le premier, je me demandais un peu comment j'allais réagir : eh bien, j'ai éprouvé du plaisir à le relire ! Chacun a une particularité qui m'a passionné pendant la période de conception et d'écriture.
Vous avez dit que vous aviez aimé relire votre premier roman, c’est celui dont vous êtes le plus fier ?
Non, pas forcément. C'est juste le premier ! Et comme toujours dans les premières œuvres, il y a beaucoup de détails autobiographiques. Il se passe à l'époque de mes études médicales, j'avais aussi envie de témoigner sur certaines choses que les jeunes générations n'ont (heureusement) jamais connues: les avortements clandestins (externe, on en voyait une dizaine par nuit de garde ! chef de clinique en réanimation, on accueillait 3 a 4 formes gravissimes par mois avec des morts, des séquelles, etc ..! mais aussi la peine de mort qui personnellement me révulse (je sais que je vais me faire des ennemis, là..).
Dans votre dernier roman que j’ai chroniqué, le 7ème péché, le lieutenant s’appelle Pougnisky. Il y a une certaine ressemblance avec votre nom Kourilsky. Auriez-vous aimé travailler dans la police ?
Bien vu ! Le choix de ce nom était un clin d'œil à mes amis de l'Offrande musicale (une association que nous avions montée avec un kiné et une orthophoniste à l'hôpital pour apporter les bienfaits de la musique aux patients). Nous organisons des "concerts" dans la maison de retraite notamment, et je m'y suis produit plusieurs fois au piano (heureusement pour eux, de nombreux résidents étaient un peu sourds !). L'une d'entre elles a dit un jour "quand est-ce qu'il revient le docteur Pougnisky? "
Je ne sais pas si j'aurais aimé travailler dans le police (parfois, je regrette de ne pas être policier quand je suis témoin d'incivilités grossières...), mais au-delà de certains excès que tout le monde connaît (et dont aucune profession n'est exempte), j'admire et je respecte leur travail.
Comment écrivez-vous ? Avez-vous un rituel, des petites manies, un endroit où l’inspiration vous vient plus facilement ?
Je n'ai aucune "hygiène d'écriture"... J'écris lorsque l'inspiration me prend, souvent le matin à la fraîche, mais aussi bien dans la journée, parfois la nuit en période de fièvre créatrice ! Et parfois pas du tout pendant plusieurs jours !! Au calme, ou au milieu d'une maisonnée bruyante… mais avant de commencer un ouvrage, il faut que j'ai un synopsis dans la tête (pour un roman policier, c'est en général indispensable). Après, c'est le miracle de l'écriture, les idées viennent enrichir l'intrigue en cours de route !
Vous avez écrit des romans policiers mais pour vous, quel serait le meurtre parfait ?
Je suis un meurtrier trop impulsif pour vous répondre !
Est-ce que vous lisez ou regardez les séries policières ? Si oui quel roman, quel film ou série conseilleriez-vous à vos lecteurs et pourquoi ?
Je lis de tout, des romans policiers, des essais historiques, des romans fantastiques, des romans "tout court ". Parmi les policiers j'aime beaucoup Michael Connelly, ses personnages ont une épaisseur humaine, Ruth Rendell (qui vient de disparaître), les séries télévisées, je les regarde rarement (j'ai quand même vu "engrenages" qu'on m'avait prêté, avec plaisir).
J’ai parlé avec vous, vous semblez quelqu’un de très proche de vos lecteurs, c’est important pour vous ?
Bien sûr, on écrit pour eux ! Mon plus grand plaisir est lorsqu'on vient me dire "je n'ai pas pu fermer ce livre avant de l'avoir terminé", ou "j'ai appris beaucoup de choses sur tel ou tel sujet", parce que moi aussi, j'ai dû me documenter pour écrire… et donc m'instruire !
Merci de m’avoir accordé un peu de votre temps cher meurtrier, un dernier mot pour la fin ?
Je suis médecin avant tout, j'aime les gens, je n'aime pas la violence, je n'aime pas trop les psychopathes et les excès d'hémoglobine... mais la vie est aussi faite de cela… et la médecine, c'est parfois comme une enquête de police, il faut rechercher des indices, les mettre en corrélation. C'est peut-être pourquoi, j'ai commencé par l'écriture de romans policiers !
Encore merci d’avoir pris le temps de répondre à mes questions.
C’était avec plaisir.