C’est un grand jour. Je suis convié au Ministère de la Culture et je vais pouvoir échanger avec l’actuelle ministre, Mme Rose Pilgrim. C’est donc dans un bureau flambant neuf qu’elle me reçoit, tellement neuf que le téléphone n’est pas encore déballé.
Elle m’accueille chaleureusement, me félicitant même pour mon dernier album. Ces compliments m’auraient encore plus touché si j’avais déjà sorti un album mais ça a l’air tellement sincère que je la remercie.
On commence à parler de BD et m’apprend qu’elle s’y connaît plutôt bien : elle a lu toute la collection des aventures de Pinpin quand elle avait huit ans. Depuis, elle a été obligée de lire des ouvrages plus sérieux, crédibilité du poste oblige : les romans de Zadig et Voltaire, les œuvres de l’ethnologue Marc Lévy-Strauss ou encore le dernier livre du Prix Nobel de Littérature, Patrick Moscato.
Très vite, la discussion porte sur la situation actuelle des auteurs. Elle m’explique que son prédécesseur, sous la précédente majorité avait mis en place un système très complexe administrativement parlant et pas du tout adapté à la réalité du terrain. Depuis, elle a simplifié la procédure en mettant en place un numéro de téléphone unique, permettant de joindre aux heures d’ouverture (du lundi au mercredi, de 10h30 à 11h45, le jeudi de 14h15 à 16h00 et le vendredi en continu de 8h à 14h) aussi bien un conseiller du Régime Auto-entrepreneurial Financier (RAF), du Fonds Unitaire des Centres Kbis (FUCK) que du Bureau Interne de la Fiscalité Locale et à l’Etranger (BIFLE). Une belle avancée quand on sait que 12% des auteurs dépendent d’un de ces statuts. Elle espère par la suite que l’organisme majoritaire dans la couverture sociale des auteurs, la Caisse des Artistes, Compositeurs et Auteurs (CACA) rejoindra cette plate-forme téléphonique.
Elle nuance cependant son enthousiasme. Une directive européenne prévoit d’uniformiser la couverture sociale des auteurs, en faisant disparaître à terme ces différentes caisses et en les rattachant à un réseau de mutuelles privées. Elle laisse entendre, à demi-mot, que les auteurs pourraient bien voir leur couverture sociale se réduire avec un taux de cotisation plus élevé.
Nous abordons alors le sujet du moment : la grande marche des auteurs qui a permis à de nombreux professionnels de se faire entendre lors du plus important salon francophone. Elle regrette son absence, mais assure avoir bien entendu le message passé par les auteurs. Mme Pilgrim a parfaitement conscience que les temps sont difficiles pour tout le monde et qu’il est nécessaire de prendre en compte les besoins de chacun, dans une parfaite harmonie entre les principaux acteurs du monde littéraire. Le Secrétaire Général du Groupement Organisé Des Editeurs (GODE), M. Pilgrim (époux de Mme Pilgrim) la tient d’ailleurs régulièrement informée de la situation.
La Ministre tient cependant à rassurer le monde de la BD : elle a pris conscience, grâce à cette manifestation, que les auteurs étaient nombreux. Après plusieurs échanges avec le Premier Ministre, il est apparu important que ce milieu puisse contribuer à l’économie solidaire et une nouvelle taxe : la Diligente Taxe Commune (DTC), calculée à partir des droits d’auteurs, devrait voir le jour à la prochaine rentrée.
Elle met un terme à cet entretien, elle doit désormais assister à l’inauguration d’un théâtre et qu’il lui paraît essentiel que la question des intermittents soit également traitée… peut-être en créant une plate-forme téléphonique s’inspirant de celle déjà expérimentée…
Jonathan Rien
Note de la rédaction : article parodique