Chronique ontarienne, par Jean-François Tremblay…

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Mieux vaut tard que jamais est la traduction française du titre du premier album de la formation Anderson Ponty Band, un groupe dont les figures de proue sont Jon Anderson, ancien chanteur du groupe de rock progressif Yes, et Jean-Luc Ponty, célèbre musicien de jazz français. Il s’agit de la première collaboration entre ces deux septuagénaires qui ont marqué, chacun à sa façon, la musique occidentale des cinquante dernières années.

Et bien qu’à mes yeux il ne soit pas question ici d’un désastre (pas tout à fait), je me demande s’il n’aurait pas été plus approprié d’intituler l’album Mieux vaut continuer de travailler nos compositions, ou ne rien sortir du tout.

L’album est né d’une campagne kick-starter qui a permis d’amasser plus de 100 000 $. L’intérêt des amateurs des deux musiciens était plutôt grand. Un concert fut enregistré il y a un an, duquel furent tirés la plupart des enregistrements que l’on retrouve sur le disque. Le tout fut peaufiné en studio. Et le résultat final est… quelque peu décevant.

Je m’exprime ici en tant que fan de Jon Anderson, principalement. Je ne suis pas très familier avec le travail de Ponty (qui a collaboré avec tout le monde, de Zappa à Al Di Meola). Depuis ses problèmes de santé qui ont failli lui coûter la vie en 2008, et qui lui ont valu d’être mis à la porte du groupe qu’il avait fondé quarante ans auparavant, Jon Anderson n’a pas cessé d’accumuler les projets musicaux. Cependant, je suis d’avis que sa voix n’est plus tout à fait ce qu’elle a déjà été. Que cela soit dû à l’asthme dont il a souffert, et qui l’a presque tué, ou encore au simple vieillissement, je n’en sais rien, mais bien que j’apprécie encore entendre cette voix unique, cet instrument qui a fait de moi l’amateur de Yes que je suis depuis plus de 20 ans, le charme n’opère plus tout à fait comme auparavant.

Il n’atteint plus les notes qu’il pouvait autrefois chanter avec facilité. On s’en rend compte sur la reprise du classique And You And I, qu’il a écrit, à l’origine, en 1972 pour l’album Close To The Edge de son ancien groupe. Une reprise banale, qui fait le tiers de sa durée originale et qui, sans les notes haut perchées du jeune Anderson, perd une grande partie de son charme et de son unicité.

Et que dire de la reprise reggae (!) de Time And a Word, l’une des meilleures chansons de Yes ? Si Anderson semble s’amuser au cours de la performance, et que le jeu de Ponty au violon est intéressant en soi, on ne reconnaît pratiquement plus la pièce originale. Et si j’apprécie une bonne reprise de temps en temps, j’ai de la difficulté à saisir ce que cette transformation extrême de l’une de mes chansons préférées peut apporter à celle-ci. Anderson en profite au passage pour inclure un extrait de She Loves You des Beatles dans sa chanson, ce qui n’est pas inhabituel pour lui (il avait inséré le refrain de Give Peace a Chance dans la pièce I’ve Seen All Good People en 1972), mais ceci n’ajoute rien de bien intéressant à l’ensemble.
Pas besoin de faire un dessin : après deux ou trois écoutes, je n’arrive pas à m’emballer pour cet album, je n’adhère pas à la proposition. Je n’aime pas les synthétiseurs qui semblent tout droit sortis d’un mauvais album des années 80. Peut-être ai-je, au fond, un problème avec le son du violon électrique de Ponty. Lorsque j’entends One in the Rythms of Hope, une reprise de Rythms of Hope de Ponty augmentée de paroles par Anderson ? Je suis loin d’être emballé par le son démodé de la pièce.

Ce qui me dérange le plus dans cet album, c’est que ces deux musiciens, qui ont été à l’avant-garde du rock et du jazz dans les années 60 et 70, s’assoient sur leurs lauriers pour leur première collaboration et qu’ils reprennent de vieux titres pigés dans leur discographie respective, incapables qu’ils sont d’innover, de proposer quoi que ce soit de nouveau.

Mieux vaut tard que jamais ? Hum… laissez-moi en douter. J’aurais préféré que les deux musiciens nous coupent le souffle. Malheureusement, ils nous servent du réchauffé. Je ne vois pas vraiment l’utilité d’un tel projet. Pour les plus fervents amateurs seulement.
L’album est disponible sur iTunes et en format CD (incluant un DVD enregistré en concert l’an dernier). La formation sera en spectacle à Toronto le 7 novembre prochain.

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Notice biographiquechat qui louche, maykan, alain gagnon, francophonie

Jean-François Tremblay est un passionné de musique et de cinéma. Il a fait ses études collégiales en Lettres, pour se diriger par la suite vers les Arts à l’université, premièrement en théâtre (en tant que comédien), et plus tard en cinéma.  Au cours de son Bac. en cinéma, Il découvre la photographie de plateau et le montage, deux occupations qui le passionnent.  Blogueur à ses heures, il devient en 2010 critique pour Sorstu.ca, un jeune et dynamique site web consacré à l’actualité musicale montréalaise.  Jean-François habite maintenant Peterborough.   Il tient une chronique bimensuelle au Chat Qui Louche.

(Une invitation à visiter le jumeau du Chat Qui Louche :https://maykan2.wordpress.com/)