Septembre, c'est la rentrée. On laisse derrière soi piscine et farniente, on quitte le camping et les lectures d'été, on abandonne son bronzage et son grignotage et, pour certains, on se débarrasse enfin de son épouvantable famille de moldus. Ciao la compagnie !
Oui, la rentrée, c'est l'occasion ou jamais de me lancer dans un défi nostalgique que je me traîne de longue date : relire les Harry Potter. Les relire pour la énième fois (au moins la 13e pour celui-ci ?), mais pour la 1ère fois avec un œil de grande personne. C'est un défi de longue haleine, que je me lance sur un rythme pépère (car je n'ai pas envie de lire que ça non plus) : un par mois, et je viendrai vous les chroniquer. Donc, c'est parti !
La vie de Harry bascule dans le merveilleux le jour où un géant aux yeux noirs et brillants comme des scarabées frappe à sa porte pour lui livrer le plus étonnant des secrets :
Le géant Rubéus Hagrid l'emporte alors dans le monde sorcier, sorte d'exubérante fourmilière parallèle du Londres que l'on connaît. Et c'est le début d'une fascinante et incroyable aventure pour Harry, qui ne se doutait pas que des gens comme lui existaient. Son bonheur est cependant bien vite troublé par ce qu'il apprend sur le terrible mage noir V..., qui serait à la fois mort et pas mort ?
[Fin du résumé. Notez que, même si ça m'étonnerait de réussir à spoiler quelqu'un sur Harry Potter 1, je ne prends pas le risque.]
Ok, bon. Harry Potter, c'est ma vie, les cocos ; je vais donc ranger mon cœur dans une gentille petite boîte pour vous rédiger cette chronique, sinon, je risque de vous vomir un arc-en-ciel.
- Dès la première lettre de Poudlard (l'école de magie, donc), on est, entièrement et avec une grande simplicité, plongés dans un monde fantastique délicieux.
J. K. Rowling fait, en outre, une chose habile qui explique le goût si étendu pour Harry Potter dans des cultures si différentes (Japon, Russie, France, Pérou, USA...) :
- les descriptions, courtes (un paragraphe) sont amenées par la découverte des jeunes héros d'un nouvel élément,
- détaillées, vivantes et bouillonnantes comme des chaudrons,
- et conclues de réactions ou interactions des personnages.
Ainsi, on a :
- action/exploration qui déclenche la curiosité du lecteur ;
- description qui renseigne, et imprègne le lecteur d'une ambiance ;
- retour à l'action qui permet l'identification aux personnages.
Ce schéma est simple, basique... mais habile, et revient tout le temps. Ce qui permet à tous les lecteurs de s'émerveiller, comme des enfants, de ce monde nouveau et imaginaire.
Extrait pour démontrer mon propos :" Ils ne se trouvaient pas dans une salle, comme il l'avait cru tout d'abord, mais dans un couloir. Plus précisément, dans le couloir interdit du deuxième étage. Et à présent, ils comprenaient pourquoi l'endroit était interdit.
Devant leurs yeux, un chien monstrueux remplissait tout l'espace entre le sol et le plafond. L'animal avait trois têtes : trois paires d'yeux étincelant d'une lueur démente, trois museaux qui les flairaient en frémissant avec avidité et trois gueules bavantes hérissées d'énormes crocs jaunâtres d'où pendaient des filets de salive épais comme des cordes.
Le chien se tenaient immobile, ses six yeux fixés sur eux. S'il ne les avait pas encore dévorés, c'était sans doute parce qu'ils l'avaient pris par surprise, pensa Harry, mais à en juger par ses grognements qui roulaient comme le tonnerre, il n'allait pas tarder à leur bondir dessus.
Harry chercha à tâtons la poignée de la porte. Entre Rusard et la mort, il choisissait Rusard. "
Curiosité > description > réaction.Là, on dirait que je vous donne la recettes des crêpes. Bien sûr que l'écriture, ce n'est pas aussi simple. Et bien sûr que cette recette n'est pas forcément la meilleure ou la plus adaptée en toutes circonstances. Mais... elle joue pour beaucoup, je crois, dans l'accessibilité de cette saga au succès planétaire.
- La plume de l'auteur déploie délicieusement son grand talent de conteuse : dès les premiers chapitres chez les Dursley, et tout au long de l'année à Poudlard, l'humour et le second degré mâtinent allégrement la narration et les dialogues.
Dans ce tome particulièrement, Ron a souvent les meilleures répliques.
" -Mais qu'est-ce qui leur prend de garder un truc pareil dans une école ? dit enfin Ron. S'il y a un chien au monde qui a besoin d'exercice, c'est bien celui-là ! "
" Lee Jordan avait du mal à ne pas prendre parti.
-Donc, après cette scandaleuse tricherie...
-Jordan ! protesta le professeur McGonagall.
-Je voulais dire après cette faute révoltante...
-Jordan, je vous préviens...
-D'accord, d'accord. Flint a failli tuer l'attrapeur de Gryffondor, ce qui aurait pu arriver à n'importe qui et donc Gryffondor bénéficie d'un penalty repris par Spinnet et c'est Gryffondor qui garde le Souafle. "
- L'imaginaire, qui emprunte aux légendes européennes, au folklore germanique à la Tolkien, et aux mythes antiques, est riche, et étroitement tissé pour former un monde cohérent et chatoyant.
Ce monde, c'est le monde magique de Harry Potter,
D'abord parce que *ici, je sors délicatement mon petit cœur d'enfant de la boîte dans laquelle je l'avais rangé* je me suis souvenue, à chaque scène, de mes lectures précédentes, et c'est comme si, spéléologue des sentiments, j'avais revécu mes 10 ans, 12 ans, 14 ans, mordant dans la madeleine de Proust toutes les trois lignes. Pour ce genre de lecture, on aime prendre son temps (sinon, c'est un peu vertigineux).
Mais ce fut aussi une belle expérience parce que, pour la première fois, j'ai relu Harry Potter avec un regard d'adulte, et qui plus est avec derrière moi une culture de la littérature jeunesse m'offrant un certain recul, et une formation d'édition me permettant de dire :
Mince, alors. C'est d'une sacrée qualité.Si vous voulez vous joindre à moi pour relire (et éventuellement chroniquer) les tomes 2 à 7 de Harry Potter sur les six mois qui viennent, n'hésitez pas ! Je tague Tom de La Voix du Livre avec qui j'en ai parlé (et qui va sans doute me maudire) et Bloup de Lallie au pays des crevettes à qui je n'ai rien dit (qui elle, va me bénir), mais bien sûr, tout le monde est le bienvenu.
Avez-vous (re)lu Harry Potter une fois grand ? Avez-vous été surpris, ému ?
En attendant...
Bonne lecture,
Lupiot
* L'affiche du film Fantastic Beasts que j'ai insérée est un fanmade poster, en V.F. : un tripatouillage photoshop fait par des fans.