Titre : The Golem and the Jinni
Auteur : Helene Wecker
Nombre de pages : 486
Date de publication : 2013
Synopsis : Chava est un golem, une créature d’argile créée par un rabbin disgracié qui s’essaie à la magie Kabbale occulte. Quand son maître, le mari qui l’avait « commandée », meurt à bord d’un bateau quittant la Pologne pour les États-Unis, elle est sans attache et à la dérive tandis que le bateau termine son voyage à New York, en 1899.
Ahmad est un djinn, une créature de feu, né dans un désert de l’ancienne Syrie. Piégé dans une vieille flasque de cuivre par un sorcier bédouin il y a plusieurs siècles, il est relâché de façon accidentelle par un étameur dans un atelier de Lower Manhattan. Bien qu’il ne soit plus emprisonné, Ahmad n’est pas entièrement libre – un bracelet de fer, incassable, le contraint au monde physique.
The Golem and the Jinni est leur histoire magique et inoubliable : des amis improbables dont la relation défie leur nature opposée, jusqu’à ce qu’une nuit, un incident terrifiant les repousse chacun dans leur monde. Mais une menace importante rapprochera rapidement Chava et Ahmad à nouveau, les obligeant à faire un choix fatidique.
Avis : ★★★★★
J’ai été très surprise de voir que ce livre n’avait pas été traduit en français. Sa publication date de deux ans, le délai de traduction n’est donc pas en cause et le succès que le livre me semble avoir eu justifierai largement une traduction (quand je vois que des bouses comme celles d’E.L. James sont traduites). Les critiques littéraires ont été majoritairement positives sur cet ouvrage, il a été nominé pour trois prix et en a reçu un en 2014 : le Mythopoeic Award (qui récompense les œuvres et essais portant sur la fantaisie). Côté lecteurs, j’en ai entendu beaucoup de bien sur les blogs et il a même été recommandé par Writing Excuses, ce qui m’a convaincu de l’écouter. J’ai pris le livre audio, mais je suis impatiente de pouvoir m’acheter une copie du livre papier, déjà parce que c’est un objet magnifique, et ensuite parce que je relierai avec plaisir l’histoire, à mon rythme.
Bref, j’ai adoré. On suit l’histoire de Chava et Ahmad, que rien ne rapproche au début et finalement, on se rend compte qu’ils ne sont pas si différents que ça sur certains points… Les personnages ont beaucoup de profondeur et on s’attache très rapidement à eux. Pas seulement aux personnages principaux d’ailleurs, mais à tous ceux qui les entourent : les personnages ne sont pas vides ou plat, et on découvre l’histoire de chacun d’eux au fur et à mesure de la lecture. J’ai particulièrement apprécié cet aspect, d’autant que beaucoup de personnages d’horizons différents finissent par se rencontrer, avec des conséquences plus ou moins heureuses…
La mythologie présentée ici est tout à fait fascinante puisque l’auteure s’intéresse à la fois au golem, créature du folklore juif, et au djinn qui appartient à la mythologie maghrébine. Les pouvoirs et faiblesses des deux personnages sont présentés – voire montrés – au fil de l’eau. En revanche, ces personnages ne se limitent pas seulement à leur « nature » et ont des caractères, des désirs et des défauts qui leur sont propres. De façon tout à fait justifiée, il est question dans l’histoire de savoir à quel point leur nature influence leur personnalité et cela m’a semblé merveilleusement bien traité.
L’essentiel de l’histoire se passe donc à Manhattan à l’époque victorienne, mais ne se limite pas à cela. Grâce à des retours en arrière et aux souvenirs amenés par la nostalgie de certains personnages, on découvre également d’autres lieux et d’autres époques. L’aspect fantastique du roman n’empêche aucunement d’aborder des sujets aussi universels que l’immigration : Chava et Ahmad se retrouvent tous deux au sein de communautés immigrantes différentes. L’histoire traite aussi des relations entre ces communautés, entre des personnages de milieux divers et de religions différentes.
Un vrai coup de cœur, une lecture entraînante comme je n’en avais pas eu depuis longtemps et que je recommande à tout le monde !
Pour en savoir plus :
– Le site de Helene Wecker (en anglais) avec de nombreuses ressources, notamment sur la mythologie entourant les golems et les djinns, des extraits, des présentations des personnages et des informations sur la vie à New York en 1899.
– « Interview: Helene Wecker » de Dani Crickman pour le Jewish Book Council (en anglais). On y apprend qu’il a fallu sept ans pour écrire et travailler le roman, particulièrement les personnages qui ont pris de plus en plus de profondeur au fur et à mesure des révisions. Les recherches que Helene Wecker a dû faire ont également eu une grande importance pendant ces nombreuses années d’écriture, puisqu’elle a dû se renseigner sur l’époque, la culture bédouine, les Syriens immigrés aux États-Unis, le Liban, etc. Il est également question du traitement de la religion et de la superstition dans le roman.
– « Marion chats with Helene Wecker » de Marion Deeds pour Fantasy Literature (en anglais). L’auteure explique avoir fait de son mieux pour présenter les personnages immigrants de son livre comme des individus et non comme un monolithe de « l’Autre », afin de détruire les préjugés, quelque chose de toujours aussi important de nos jours. Elle s’attarde également sur l’écriture des personnages féminins, qu’elle a pris grand soin de ne pas bâcler, et du djinn, pour lequel elle devait montrer son égoïsme, tout en essayant de le rendre attachant (sur ce point, je rejoins Marion Deeds, elle a réussi).