Billet de Maestitia, par Myriam Ould-Hamouda…

C’est au moment où tu lâches des yeux la boussole que tu peux enfin profiter de la vue ; mais si ça fait bienchat qui louche, maykan, alain gagnon, francophonie, littérature, Québec longtemps que les seins nus ne nous font plus peur, parce qu’on en a tété à toutes les sauces depuis ceux de maman, la vue est pleine de poils incarnés que l’on ne saurait voir. Alors, la boussole on s’y agrippe et on ne la quitte pas des yeux : en tout cas pas avant qu’elle ne nous ait indiqué le sens et le temps qu’on puisse détaler comme des lapins.

Le sens, c’est ce concept fumeux qu’on a inventé pour s’en faire une bouée les jours de tsunamis. Et c’est fou, tout ce temps perdu à essayer de justifier l’absurdité d’une vie qui ne demandait qu’à n’être vécue et surtout pas comprise. Mais, c’est plus fort que nous : on a besoin de tout comprendre, et surtout l’inconcevable. Alors on passe des heures à fouiller dans les tiroirs de notre mémoire, à chercher des messages cachés entre les lignes qu’on n’aurait pas vus à la première lecture, à faire les poches et mettre le nez dans l’historique du navigateur de toutes ces bonnes intentions trop polies pour être honnêtes, à essayer de décoder les gestes suspects du mec en face qui avait simplement envie de se gratter le cul. Juste pour parfois rendre la douleur plus supportable, juste pour souvent rendre le bonheur moins abordable. Parce que même si la douleur, ça fait des bleus et pleurer, au fond on les aime bien toutes ces mains autour qui brandissent leur mercurochrome, leurs kleenex et leur tendresse. Alors que le bonheur, sans ces mains gauches et tremblotantes, on flippe un peu de s’y emmerder.

C’est au moment où tu lâches des yeux la boussole que tu peux enfin profiter de la vue ; Dieu que c’est beau, une métaphore. C’est comme le papier brillant qui enveloppe le chocolat dans le paquet de papillotes. Sauf que dedans il n’y a pas de chocolat : parfois il n’y a rien du tout, et d’autres fois tu te prends une putain de claque dans la tronche. Et une bonne paire de claques c’est bon pour la circulation, comme dirait mémé. Ça ressemble à un « y’a pas de…, mais ravale ta colère et tais-toi, », mais en version sous-titrée c’est bien plus que ça.

Parce que mémé, crois-moi, des métaphores elle en a vu passer ; et elle sait mieux que quiconque qu’une tape surchat qui louche, maykan, alain gagnon, francophonie, littérature, Québec le cul vaut mieux que deux courbettes dans le confessionnal, qu’un verbe acerbe vaut mieux que deux sourires qui n’en pensent pas moins. Et la boussole, mémé, ça fait longtemps qu’elle l’a perdue sous une commode dans une dispute avec pépé, qu’il n’y avait plus de vaisselle à casser, mais toujours assez d’amour pour se réconcilier, et une vue imprenable sur le bois d’à côté. Et, qu’on les ait méritées ou non, toutes les claques de la vie ne devraient jamais ressembler qu’à mémé : des coups de pied aux fesses qui nous foutent hors de ce canapé dans lequel on végète depuis mille ans déjà. À chercher une réponse dans ce plafond qui ne dit jamais rien, à peser chaque premier pas que l’on ne fait jamais, à gribouiller sur un post-it la liste de nos excuses et de tous les « je vous salue marie » que l’on doit. Et crois-moi encore, si je suis accro aux boussoles et au chocolat, je donnerais pourtant tout pour une tarte aux pommes de mémé.

Notice biographique

Chat Qui Louche maykan alain gagnon francophonieMyriam Ould-Hamouda (alias Maestitia) voit le jour à Belfort (Franche-Comté) en 1987. Elle travaille au sein d’une association pour personnes retraitées où elle anime, entre autres, des ateliers d’écriture.  C’est en focalisant son énergie sur le théâtre et le dessin qu’elle a acquis et développé son sens du mouvement, teinté de sonorités, et sa douceur en bataille — autant de fils conducteurs vers sa passion primordiale : l’écriture. Elle écrit comme elle vit, et vit comme elle parle.  Récemment, elle a créé un blogue Un peu d’on mais sans œufs, où elle dévoile sa vision du monde à travers ses mots – oscillant entre prose et poésie – et quelques croquis,  au ton humoristique, dans lesquels elle met en scène des tranches de vie : http://blogmaestitia.xawaxx.org/

(Une invitation à visiter le jumeau du Chat Qui Louche :https://maykan2.wordpress.com/)