Chronique « What a wonderful World »
Scénario et dessin de Olivier Pont, couleurs de Laurence Croix,
Public conseillé : adultes
Style : Portraits
Paru chez Dargaud, le 23 octobre 2015, 120 pages couleurs, 17.95 euros,
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L’histoire
Chloé :
Sara et Julie, deux ados bien dans leur temps arrivent à la piscine. Leur sujet de discussion : les garçons comme toujours, et surtout Nico, le beaux gosse de la classe, enfin célibataire. Derriere les deux pipelettes, arrive Chloé, complexée par son manque cruel de poitrine…
Mathilde :
Paris, mai 68. Mathilde, femme au foyer, engoncée dans son univers de petite bourgeoise étriquée part du domicile conjugal. Elle laisse Henri, son mari avec ses deux enfants pour vivre son amour “inconvenant et déplacé” avec une autre jeune femme libre.
Alison :
Hollywood. Alison, une actrice à la plastique spectaculaire, surnommée “Perfect breasts”, interrompt sa scène d’amour quand son partenaire glisse sa main entre ses seins. Furieuse, elle quitte le plateau, poursuivie par son réalisateur. C’est le temps des explications et des vérités, qui la met face à ses obligations et à son contrat…
Ce que j’en pense
Olivier Pont, l’excellent dessinateur de « Où le regarde ne porte pas” et de “Totale maîtrise” (avec son complice Georges Abolin), revient à la bande dessinée après une absence de onze années. Ah oui, quand même…
Pour ce retour remarqué et attendu, ce n’est pas une histoire qu’il nous propose, mais sept récits courts, sept portraits de femmes, jeunes ou vieilles, sobrement intitulé “DesSeins”.
Jeunes filles de notre époque, femme moderne dans les années 70, femme mature trompée par son mari, ou femme noire en Afrique noire, il enchaîne avec un vrai talent de “conteur”, sept portraits touchants, symbolisant la féminité dans sa diversité.
Amoureux des femmes et des corps, Olivier nous invite dans leurs intimités. Au bord de la piscine, sous la tente, dans un magasin de sous-vêtement ou dans le lit conjugal, il choisit des moments forts et simples qui marquent un tournant (un climax dirait on dans un scénario) dans leurs vies.
Comme le titre le suggère, Olivier Pont s’intéressent aux formes. Beaux, généreux, petits, ou énnnooormes, ces seins évoquent le désir des hommes, la condition sociale des femmes et leurs rôles de mère et d’amante. Mais il ne triche pas. Il évite les seins stéréotypés des “playmates”, et choisit des femmes aux formes et aux psychologies aussi différentes les unes que les autres. Petits seins contrits dans un bonnet trop étroit, seins qui ne demandent qu’à s’affranchir du carcan de la société, poitrine généreuse et “victorieuse” d’une belle africaine, galbe parfait d’un modèle de nu, énorme sein maternel, Olivier s’amuse avec les formes. Il les aiment tous, et nous fait partager son plaisir visuel avec beaucoup de respect et de sensualité.
Coté dessin, Olivier pont est vraiment un cador. Pour ceux qui ne connaissent pas “Où le regard ne porte pas”, je ne peux que les inciter vivement à découvrir ce petit bijoux.
Avec “DesSeins”, j’ai retrouvé tout le plaisir du trait d’Olivier Pont. Épuré, sobre, élégant, son trait est simple… et vrai.
Qu’il dessine des corps magnifiques ou plus communs, Olivier respecte ses modèles et les montre avec une réelle empathie.
Coté découpage, là aussi, Olivier est au max. Vous n’aurez hésitation, ni aucun doute. L’histoire coule le long des planches avec un plaisir de lecture immédiat.
Enfin, petit coup de projecteur sur les couleurs numériques de Laurence Croix. La coloriste fond ses couleurs (sobres et solaires) dans son trait.
Alors, pas de doute, pour faire un cadeau à votre chérie, ou lui prouver que la BD n’est pas qu’une affaire d’hommes (si jamais vous ne le savez pas encore), ce “DesSeins” est tout indiqué.
Cet article fait parti de « La BD de la semaine », regroupé chez Noukette, cette semaine.