En 2014, succédant au mois Futures End et dans la lignée des changements éditoriaux chez DC Comics, et en particulier autour du personnage de Batman, une nouvelle équipe créative se lance pour défi de moderniser et ensoleiller la série Batgirl, après trois ans de règne de Gail Simone. De quoi être terrifié pour les fans de Barbara Gordon ? Pas si sûr...
J'ai été le premier surpris, dès les sollicitations et les premiers visuels extraits de la BD, par le grand écart total entre la Batgirl de Gail Simone sauce New 52 et la proposition créative de Cameron Stewart, Brenden Fletcher et Babs Tarr. Je ne connaissais pas, ou très peu, les auteurs avant de lire ce tome 1. Stewart est avant tout un dessinateur avant d'être de temps à autre co-scénariste sur quelques menus travaux ( Batman & Robin, Assassin's Creed). Fletcher de son côté ne m'avait pas marqué sur le récit The Flash dans l'anthologie au format proprement unique Wednesday Comics. Enfin, Babs Tarr était une illustre inconnue jusqu'ici.
Il suffit de quelques pages, voire la première seulement, pour comprendre quel sera le ton de la série désormais. Coloré, léger et même cartoon, la série amorce un virage complet. Finie l'ambiance glauque et sombre, finis les dessins réalistes et torturés. Et c'est en réalité tant mieux tant, numéro après numéro, arc après arc, le run de Gail Simone s'embourbait toujours plus jusqu'à un numéro Futures End absolument insupportable.
Pour assurer leurs arrières, les auteurs ont choisi de faire déménager Barbara dans le quartier branché (qui a dit hipster ?) de Gotham City, Burnside. Elle a pour nouvelle colocataire une développeuse sur la nouvelle application mobile du moment, Hooq, une sorte de Tinder sauce DC Comics. Nouveaux locaux, nouveaux amies, nouveau look aussi et, enfin, nouvelle attitude. Pour fêter son emménagement, la jusqu'ici très sobre fille du commissaire s'offre une gueule de bois monumentale et un léger trou noir. Ce qui a permis à l'un des invités indésirables de la soirée de subtiliser son ordinateur portable, qui contenait rien de moins que son projet de doctorat.
Les événements s'enchaineront assez rapidement, sans creux trop mou pour lasser, et avec une efficacité appréciable tant les scénaristes arrivent subtilement à distiller des indices sur la suite sans que le lecteur lambda n'y prête attention. Ce dernier peut par contre craindre le pire à la vue de la couverture du numéro 37 qui pourrait donner de fausses indications sur son contenu. Heureusement !
Les dessins, parlons-en justement ! S'ils sont très largement à la hauteur et accompagnent agréablement le script de Stewart et Fletcher, mon principal regret se porte sur les fulgurances créatives du premier numéro de ce tome, que l'on ne retrouvera nulle part. Quel dommage d'avoir eu de si bonnes idées pour illustrer la mémoire eidétique de Barbara et que ça ne reste pas plus longtemps que les vingt premières pages de ce nouveau run.
Un petit mot sur l'épisode de Secret Origins glissé par Urban Comics dans ce tome. Il est surprenant de constater à quel point il s'insère dans la trame de ce tome et qu'il en devient presque un supplément indispensable, alors qu'il figure dans une série supposée raconter les origines des plus célèbres héros DC Comics. Les dessins sont assurés par Irene Koh qui livre un travail convenable mais qui n'aura rien de mémorable.
Batgirl Tome 1 - Bienvenue à Burnside
Urban Comics * Par Cameron Stewart, Brenden Fletcher & Babs Tarr * 15,00€
Les changements d'équipe créative n'augurent pas toujours du meilleur et présagent parfois des bouleversements parfois trop radicaux. Ici, c'est une réussite à tout point de vue. Babs Tarr illumine l'univers de la jeune héroïne et se permet des trouvailles visuelles étonnantes tandis que la révolution menée par Cameron Stewart et Brenden Fletcher offre au lecteur une des Batgirl les plus dynamiques et enthousiasmantes de ces dix dernières années. Bravo !