Abattoir 5

Par Simon Vandereecken @livrophage

Abattoir 5 retrace l’histoire de Billy Pélerin, né à Ilium en 1922, fils unique du coiffeur de la petite ville. Appelé sous les drapeaux pendant la seconde guerre mondiale (comme assistant d’aumonier militaire…), il est capturé par les allemands et fait prisonnier dans un camp à Dresde. Démobilisé en 1945, il devient opticien, passe une petite dépression nerveuse dans un hôpital militaire, puis se marie, a bientôt deux enfants et fait fortune. De retour d’un congrès d’opticien il est victime d’un accident d’avion, tous les passagers périssent sauf lui. Pendant qu’il est à la clinique, sa femme meurt. Il ne reprend pas son activité en sortant de l’hôpital mais va tout droit à New York. Là, il participe à une émission de radio où il révèle avoir été enlevé par une soucoupe volante en 1967 et amené de force sur la planète Tralfamadore. Objet de spectacle, montré nu dans un zoo, les trafalmadoriens le feront s’accoupler avec une terrienne, ancienne actrice de cinéma, elle-même kidnapée, avant de le relâcher. De retour sur terre, il comprend que les années qu’il a passé sur Trafalmadore n’ont été chez lui que quelques secondes. Bien sûr, Billy ayant atteint l’âge de quatre-vingt six ans, tout le monde est persuadé qu’il a définitivement perdu le sens des réalités et que la sénilité avance à grands pas. Mais Billy insiste pour remonter dans le passé et raconter son histoire, notamment sa vie de soldat et, ce faisant, il ne va plus cesser alors d’effectuer des sauts dans le temps, évoluant et vieillissant, ou régressant vers son enfance.

Le verdict

Abattoir N°5 est un livre construit de façon extrêmement étrange, mélangeant les sauts temporels à travers les paragraphes, traversant plusieurs époques différentes de la vie de Billy Pélerin. Cependant, cette découpe ne rends pas la lecture impossible, les différentes époques restant relativement faciles à suivre et montrant une progression chacune de façon indépendante.

Le livre est intéressant sur ce point qu’il traite d’un traumatisme de guerre (ou d’un enlèvement alien selon l’avis du lecteur), et de l’impact de la guerre sur une personne. Tout en restant relativement absurde et partant un petit peu dans tous les sens, l’on peut lire entre les lignes les ravages d’un tel conflit sur l’esprit humain, encore plus sur celui d’un jeune adolescent. C’est d’ailleurs de là que le livre hérite son sous-titre « La croisade des enfants » en ce qu’il pointe bien du doigt la jeunesse des combattants des deux guerres mondiales, remettant bien dans l’esprit du lecteur que ce n’étaient pour la plupart pas des hommes d’âge mûr mais bien des adolescents à quelques pas du passage à l’âge adulte.

Le personnage principal, Billy, fait preuve d’ailleurs d’une certaine indolence face à la vie, cachée derrière ses fantasmes d’enlèvement alien et de voyages dans le temps, ponctuant chacun des évènements de la vie, chaque perte humaine d’un « C’est la vie » (« So it goes » en version originale). Mais derrière cette attitude aphatique se dessine un puissant jugement contre la guerre, ses manoeuvres, et surtout sa stupidité inhérente. Bien que parfois difficile à suivre et au premier abord absurde, le roman prends toute sa force dans cette construction alambiquée qui vaut le détour.