Trees (de warren ellis) tome 1

Par Universcomics @Josemaniette
En marge des titres classiques consacrés à l'univers des super-héros Dc Comics, Urban dispose également d'un catalogue de signatures et de sorties plus "profondes" qui force le respect. C'est dans cette lignée qu'il faut placer Trees, de Warren Ellis, dont le tome 1 est disponible en cette fin octobre. En fait, il s'agit d'une invasion extra-terrestre, qui a débuté (et s'est achevé tout aussi brièvement) dix ans dans le passé. En lieu et place d'aliens courant un peu partout, la Terre s'est retrouvée dotée de constructions étranges, apparentées à des arbres géants, et plantés un peu partout sur le globe. De quoi effrayer la population : Que sont-ils, à quoi servent-ils? Mais avec les ans, la réalité est aussi prosaïque que mystérieuse : il ne se passe rien d'autre que cette présence encombrante et énigmatique. Bon, Warren Ellis a mis tout de même en chantier un certain nombre de récits qui vont se croiser, autour de ce thème bizarroïde. Ainsi découvrons nous une ville de Rio de Janeiro (Coupe du monde oblige? Le titre est de l'an passé) sous l'attaque de drones sécuritaires, les ambitions d'un candidat à la mairie de New-York qui parait ne pas trop apprécier ces "arbres" extra-terrestres, ou encore un jeune artiste venue de la campagne à la ville, pour étudier de près une de ces constructions aliens, dans la grande cité chinoise de Shu, qui ressemble à un concentré de ce qu'Ellis aime dépeindre au fils de ses séries, en juxtaposant science débridée et futur anticipé. N'oublions pas ce qui se passe sur l'île arctique de Spitzberg, et qui pourrait bien être la première manifestation d'un changement à venir... Lent, tout en douceur, mais qui va advenir, et ce sera irréversible.  Pas d'action alors? Dans un premier temps, ce que Warren Ellis suggère, c'est que parfois une simple présence suffit à enclencher tout un processus capable de modifier le présent. Pas d'aliens qui nous envahissent ici, mais des arbres bien plantés qui sont la cause d'occupations militaires, de l'apparition de zones off limits où le droit et la justice sont abolies, de déplacements de populations. La présence figée de ces gigantesques visiteurs est un miroir tendu vers notre monde toujours prompt à chercher une excuse ou un bouc émissaire pour donner une justification à ses échecs ou ses frustrations. De la géopolitique à l'écologie, du rôle des femmes à la hiérarchisation des individus, Warren Ellis opte pour une approche philosophique, contemplative et analytique pour brosser son compte-rendu subtilement fascinant. Jason Howard est assez convaincant aux dessins, c'est de toute évidence un bon choix pour la série. Son trait ne s'embarrasse pas forcément toujours d'un réalisme à toutes épreuves, mais il parvient à caractériser au mieux les différents milieux qu'il est chargé de mettre en scène, en leur insufflant une touche "Ellis" reconnaissable et rassurante pour le lecteur souhaitant plonger dans l'univers typique de l'auteur britannique. Une sortie fort intelligente et déroutante pour ceux qui aiment les comics au rythme endiablé, mais qui est assurément digne de votre intérêt, surtout si vous voulez vous offrir à peu de prix (dix euros) un vrai bol d'air dépaysant après une orgie super-héroïque.  A lire aussi :
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