Titre : The Infinite Loop : 1. L’éveil
Auteur : Elsa Charretier et Pierrick Colinet
Nombre de pages : 112
Date de publication : Août 2015
Édition : Glénat
Synopsis : Dans le futur, les rapports entre les humains ont évolué, au point où les contacts et les sentiments sont devenus obsolètes. La science et les technologies ont aussi permis aux voyages spatio-temporels d’être créé. La prolifération de ces derniers provoque des anomalies temporelles. Teddy est une jeune femme qui travaille pour la brigade gouvernementale corrigeant les dégâts occasionnés par les voyages. Celle-ci se trouve en 1964 dans le désert du Nevada et traque l’erreur temporelle. Teddy finit par la trouver et elle est pour le moins immense. L’anomalie n’est autre qu’un tyrannosaure. Elle finit par s’en débarrasser et retrouve son époque. Elle débriefe avec Ulysse, son bras-droit et tous les deux évoquent la multiplication des erreurs temporelles ces derniers temps. Lors d’une nouvelle mission, Teddy tombe nez à nez avec une anomalie dont la forme n’est autre que celle d’une femme. Si jusqu’ici, sa tâche ne consistait qu’à détruire des objets ou des animaux préhistoriques, jamais Teddy ne s’est retrouvée face à une humaine…
Avis : ★★★✩✩
J’ai entendu parler de The Infinite Loop pour la première fois lors de la Paris Comics Expo, puisque Pierrick Colinet faisait partie d’une table ronde sur l’avenir des comics sur le Web. D’ailleurs, la vidéo de la conférence est disponible par ici sur Youtube. Pour ceux que ça intéresse, j’avais du coup fait un billet sur le sujet pour le carnet de recherche de mon ancien master : « Quel avenir pour les comics sur Internet ? ». Et bien sûr, The Infinite Loop faisait partie cette année du Free Comic Book Day, j’étais donc impatiente de lire ce comics depuis plusieurs mois !
Je n’ai pas été déçue ! Voyage dans le temps, dinosaures et humour sont de mise. J’aime beaucoup la présence d’infographies qui apparaissent parfois lorsque les personnages doivent faire des choix. D’ailleurs, les auteurs ne rechignent pas à insérer émoticônes et mémes, qu’il est surprenant de trouver au détour d’une page mais c’est inventif et fort sympathique. Il y a également des jeux sur les couleurs et les formes : Elsa Charretier détourne l’usage classique des cases et c’est bienvenu.
Teddy vit dans un monde dystopique où, visiblement, les sentiments, l’amour et l’obscurité ont tous été bannis pour permettre un monde plus productif. Malgré cela, Teddy se retrouve à éprouver des sentiments pour une anomalie à forme humaine qu’elle rencontre, et surnomme « Ano ». J’ai eu l’impression que l’histoire d’amour entre les deux personnages était quelque peu précipitée, même si on s’attache au couple.
« Tu rougis ! Moi qui te voyais comme une version rousse de l’imperturbable Spock… avec des nibards. »
D’ailleurs, globalement l’histoire va un peu trop vite pour moi. Les personnages ne sont pas beaucoup développés et au final, après un tome, on sait très peu de choses sur eux. Bien qu’il soit important de garder une part de mystère, cette dernière est finalement plus présente que le reste. À tel point que j’ai trouvé l’un des personnages sympathique au début de l’histoire et qu’en quelques planches, il est devenu un homophobe sexiste détestable. J’ai eu l’impression de louper une étape.
Par contre, j’ai énormément apprécié les références historiques mentionnées par les personnages, toutes sont réelles et ont leur importance. Après, certaines références, pas historiques celles-ci, m’ont échappé puisque ce n’est pas de ma génération et du coup j’ai dû vérifier ça mais heureusement qu’on vit à l’ère d’Internet, donc aucun mal.
Dernier point négatif : le message pour l’égalité et les droits égaux est beaucoup trop présent à mon goût. Je suis entièrement d’accord avec ce message – ce serait hypocrite de pas l’être – et avec le fait qu’il faille communiquer dessus. Mais là, pour le coup, c’est tellement omniprésent que The Infinite Loop passe plus de temps à nous dire le message plutôt qu’à approfondir les personnages et montrer l’importance de cette égalité. D’ailleurs, lorsqu’elles s’embrassent pour la première fois, Teddy et Ano sont présentées sur un fond – très bien fait – avec certains mots comme « Amour » « Espoir » « Nouveau départ » qui correspondent à la scène et puis « Droits civiques » « Humain » (l’une d’elles ne l’est pas vraiment pourtant ?) et « Égaux ». Si encore ce genre de discours était apparent ailleurs dans le livre, mais ce n’est pas le cas, donc ça sort un peut de nul part.
Heureusement, l’histoire est suffisamment intéressante pour nous faire oublier ce genre de choses. Et en plus de l’histoire, on a le droit à un prologue de Kelly Thompson, auteure de romans et comics comme Jem et les Hologrammes ou Captain Marvel, des plus intéressants. Et plusieurs extras sont présentés à la fin du volume : un mot d’Elsa Charretier sur la création de The Infinite Loop et sa manière de travailler avec Pierrick Colinet mais aussi des croquis et un brouillon de scénario. Mais surtout ! Une postface sur la place de l’homosexualité dans l’histoire des comics et si vous connaissez, quelques paragraphes seront suffisants (surtout la mention de Batwoman…) pour reconnaître la plume de Katchoo de The Lesbian Geek. C’est, comme d’habitude, un plaisir de la lire et son texte est très informatif, j’aime beaucoup ! Si les illustrations avaient été créditées, ça aurait été parfait. Et Glénat, merci d’utiliser une police de plus de 8 points pour les textes qui s’étalent sur plusieurs pages, ça permettra de sauvegarder un peu mes yeux…
Pour résumer : quelques petites choses m’ont titillé mais l’histoire est intéressante, j’attends avec impatience d’en savoir plus, de découvrir plus de choses sur les personnages et surtout, d’apprécier le trait de crayon doux et les couleurs flamboyantes d’Elsa Charretier.
PS : le deuxième tome sort début novembre et sauf erreur de ma part, Elsa Charretier et Pierrick Colinet sont présents dans les salons en ce moment, ils seront notamment au Hero Festival de Marseille, si jamais ça vous intéresse autant que moi !