DesSeins (Olivier Pont – Editions Dargaud)
Dans la bande dessinée comme dans la littérature ou le cinéma, il existe beaucoup d’histoires de fesses. Les histoires de seins sont, elles, beaucoup plus rares. D’où l’intérêt de l’album « DesSeins » d’Olivier Pont, qui rassemble sept nouvelles sur le thème des seins, toutes racontées avec beaucoup de délicatesse et de sensibilité. Sept portraits de femmes « qui refusent qu’on les réduise, qu’on les juge, qu’on les enferme », comme le souligne le quatrième de couverture du livre. Chaque récit constitue une tranche de vie différente, avec des dénouements parfois heureux et parfois tragiques. Il y a tout d’abord Chloé, une jeune femme qui, précisément, n’a presque pas de seins. Du coup, elle est complexée de devoir se mettre en maillot à la piscine, à côté de filles à la poitrine plus généreusement fournie, ce qui les aide évidemment à attirer l’attention des garçons. Puis, il y a Mathilde. En mai 1968, cette mère de famille bourgeoise n’hésite pas à quitter son mari et ses enfants pour se libérer enfin de la pression de son milieu social… mais aussi de son soutien-gorge! Il y a Alison aussi. Devenue une star de cinéma grâce à des films érotiques, cette actrice veut désormais tourner la page et se faire connaître autrement que par son corps. Plus question donc de montrer ses seins sur grand écran. Le hic, c’est que les réalisateurs et producteurs ne l’entendent pas de cette oreille… Il y a Sylvia, une femme au physique plantureux. Avant, son mari aimait ses formes rondes, mais il s’en est lassé. Aujourd’hui, il la trompe avec une femme plus jeune et plus mince. Plutôt que de fermer les yeux, Sylvia va utiliser ses seins pour concocter une vengeance diablement efficace. Il y a Fanny, dont l’histoire est l’une des plus touchantes de l’album. Juste avant de subir une mastectomie, elle décide de poser nue comme modèle, afin de garder une trace dessinée de son corps d’avant l’opération. Il y a Elikya, une jeune femme africaine qui refuse qu’on la marie de force et qui finira par servir de modèle pour une statuette rituelle capable de faire tomber la pluie. Et enfin, il y a Fleur, dont la boutique de dessous féminins renferme bien des secrets.
Cela faisait dix ans que l’on n’avait plus trop de nouvelles d’Olivier Pont. Après le joli succès de sa BD « Où le regard ne porte pas », signée en collaboration avec Abolin, il s’était en effet concentré sur le monde de la télévision. Aujourd’hui, il effectue un retour réussi à la bande dessinée avec cet hommage inattendu aux seins, mais aussi et surtout aux femmes. Précisons d’emblée que ceux qui aiment les histoires de fesses risquent d’être un peu déçus par ces histoires de seins, car l’objectif premier d’Olivier Pont n’est certainement pas de faire de la BD érotique. Ce qu’il veut avant tout, c’est raconter des tranches de vie. Les sept histoires courtes de « DesSeins » sont autant d’occasions pour lui de mettre en avant la force de caractère et le courage des femmes. Dans une interview au site Ligne Claire, l’auteur explique que ce fil rouge des seins lui est venu naturellement. « J’avais déjà la première histoire courte de l’album, celle qui raconte comment Chloé, adolescente, vit très mal d’avoir un physique ambigu qui la complexe, une petite poitrine. J’ai choisi de partir sur ce thème », explique-t-il. Pour lui, c’était un sujet qui allait de soi car « les seins sont très représentatifs de la femme et fascinent les hommes. Les femmes ont aussi un rapport très personnel avec leurs seins ». Une BD à découvrir pour son scénario, mais aussi pour ses jolis… dessins.