Les temps et l'air sont sinistres à Paris, ce weekend, et bien au-delà de la seule capitale.
Prostrée chez moi comme l'écrasante majorité de mes comparses parisiens, j'essaie de lire mais le cœur n'y est pas. C'est bien pourtant ce qu'il reste de mieux à faire, parfois.
Ma dernière lecture n'est pas innocente : elle parle de la sublime Palmyre aujourd'hui disparue. L'auteur, historien, nous raconte ce qu'a été cette ville mosaïque, sa richesse et son lustre.
Ainsi, Paul Veyne inscrit-il son travail dans une volonté de surmonter l'incompréhension qui est la sienne face à la destruction d'un lieu classé au patrimoine mondial de l'Humanité :
"Ayant eu pour métier l'étude de l'Antiquité gréco-romaine, je n'ai cessé de rencontrer Palmyre sur mon chemin professionnel. Avec la destruction de Palmyre par l'organisation terroriste Daech, tout un pan de notre culture et mon sujet d'étude viennent brutalement de voler en éclats.
Malgré mon âge avancé, c'était mon devoir d'ancien professeur et d'être humain de dire ma stupéfaction devant ce saccage incompréhensible et d'esquisser un portrait de ce que fut la splendeur de Palmyre qu'on ne peut désormais connaître qu'à travers les livres".
Je me permets de vous retranscrire un passage qui me semble éclairant, et n'est pas sans faire écho, à mon sens, à certaines des questions que l'on se pose depuis que se sont déroulées les attaques monstrueuses il y a deux jours à peine : (à noter qu'il est bien question ici d'intégristes, il est bien entendu fondamental de ne pas faire d'amalgame!)
"Mais pourquoi, en août 2015, avoir fait exploser et détruit ce temple de Baalshamîn? Parce que ce monument est vénéré par les Occidentaux actuels, dont la culture comporte un savant amour pour les "monuments historiques" et une vive curiosité pour les croyances d'ailleurs et de jadis. Or les islamistes veulent manifester que les musulmans ont une autre culture que la nôtre, une culture qui leur est propre, [...] qu'ils sont différents de nous et qu'ils ne respectent pas ce que vénère la culture occidentale. [...] Ils ont le sentiment d'être méconnus dans leur identité et d'être peu à peu isolés dans le vaste monde. Car la culture de l'Occident et ses mœurs s'étendent partout, l'immense Chine "communiste" continue de s'occidentaliser. Partout dans le monde les filles font des études, les femmes conduisent. Et à nos yeux, s'il arrivait malheur à une des admirables mosquées de Damas, d'Istanbul ou d'Andrinople, ce serait une perte pour toute l'humanité."
Et pour réfléchir sur l'après 13 novembre, je vous invite à lire l'article écrit par Nombre Premier, qui a le mérite de dépasser l'émotion immédiate pour se poser les questions qui vont compter : que se passe-t-il ensuite? Est-ce que nous retournons sagement à nos vies en tâchant d'oublier? Ou est-ce que nous avons la moindre possibilité de faire front, de nous prémunir contre des violences de cette ampleur? Quels sont nos moyens d'action, et où se trouve notre responsabilité?
Je vous souhaite, à tous, du courage, pour faire face à cette période d'affliction.