Les Plumes d’Asphodèle (46)

Par Sevxilian

J’ai découvert le blog d’Asphodèle il y a plusieurs mois maintenant, et son très joli concept de travail d’écriture en commun baptisé « Les plumes d’Asphodèle ».

Elle demande à tous ceux qui veulent participer de bien vouloir lui donner un mot sur un thème, puis elle partage sa récolte de mots avec nous, la blogosphère, et nous invite à écrire un texte reprenant tous ces mots. Joli concept, n’est-ce pas? C’est super participatif!


Voici sa récolte pour le mot « échapper »: belle, gardien, lapin, destin, envolée, fermer, souffle, partage, quitter, s’abstraire, voyage, cavale, réchapper, chose, respirer, poète, nid, rêve, vie, doux, fugue, oiseau, imaginer, balles, poudrebercé.

J’ai utilisé tous les mots, sauf ceux en gars pour lesquels j’ai utilisé une déclinaison (imagination pour imaginer, partager pour partage, et respiration pour respirer).


Et voici mon texte: Voyage intérieur

Le poète souffla la bougie et ferma la porte derrière lui. Silence, ténèbres. Les conditions idéales pour laisser son esprit s’envoler. Il respira lentement, laissant à ses poumons le temps de s’emplir et de se vider complètement.

Il était bercé par le rythme lent de sa cage thoracique. Les pulsations de son coeur résonnaient à ses oreilles. Travail du souffle, du vide de l’esprit pour enfin atteindre cet endroit, cette chose à l’intérieur de lui. L’inspiration.

D’un coup, son esprit s’emplit de couleurs. Il y avait des coups de feu. Des balles sifflèrent à ses oreilles et il se sentit tomber lourdement sous les sabots d’un cheval lancé au galop. Son rythme cardiaque s’accéléra. Il se rassura en bougeant un doigt: il était toujours dans sa chambre, dans le noir. Tout cela n’était que son imagination.

Il avait réussit à s’abstraire de la réalité et son voyage avait aboutit là où il avait souhaité aller: dans les tréfonds de son cerveau. Il était en sécurité, il pouvait y retourner pour explorer plus avant le destin qui lui était réservé là bas.

Il revint à la folle cavale dont il avait réchappé quelques secondes auparavant. Elle était loin maintenant, et il pris le temps de découvrir ce qui l’entourait. Une poudre fine et légère, rosée, flottait dans l’air, donnant au paysage une manière de rêve très doux.

Un lapin passa derrière lui, le faisant sursauter. Quel imbécile, c’était juste un lapin! Une famille d’oiseaux, perchés dans un arbre au tronc noueux et violet, piaillait gaiement dans leur nid. Plutôt sympathique, comme endroit. Cela allait lui donner une belle matière pour son prochain poème.

Il y avait un mirroir sur le tronc de l’arbre. Il se regarda. Dans ce monde-ci, il était plutôt avenant. Non pas que son physique dans le monde réel ne soit pas charmant, mais son imagination le rendait plus grand, plus fort et plus capable.

Il fouilla ses poches, et y trouva un morceau de pain. Il le partagea avec les oiseaux, qui paillèrent de plus belle. Une envolée de feuilles couleur guimauve tourbillona à ses pieds, soulevée par un vent sucré.

Toc, toc, toc. Le gardien frappait à sa porte. Il était temps de quitter son monde intérieur pour revenir à la vie réelle. Sa fugue intérieure et silencieuse lui avait permis d’amasser bien assez pour composer son poème maintenant. Sa belle allait être subjuguée par ses mots.