Célestin Gobe-la-Lune (Intégrale)

Par Un_amour_de_bd @un_mour_de_bd

Chronique : « Célestin Gobe-la-Lune – Intégrale »

Scénario de Wilfrid Lupano, dessin de Yannick Corboz,

Public conseillé : Adultes et adolescents

Style : Comédie
Paru aux éditions « Delcourt », le 4 novembre 2015, 100?? pages, 24.95 euros
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Ce que j’en pense

Célestin, le jeune godelureaux romantique et fainéant, Maurice 1er, le roi hyper-musclé qui ne pense qu’à lutter avec ses potes, Astryd, la vielle tante laide qui veut tuer son royal frère, Pimprinule, la princesse qui ne supporte pas le faste de sa condition, un ou deux filtres magiques, un concours de poèmes et une révolution en marche, bienvenue dans l’univers fantastique et azimuté de Wilfrid Lupano !

Honte sur moi, je ne ne connaissais pas une des premières séries de Wilfrid. J’ai eu un grand plaisir à la découvrir dans cette belle intégrale (un dytique) que les éditions Delcourt sortent pour la fin d’année.

On reconnaît immédiatement l’univers du sieur Lupano. Tout (ou presque) est déjà en place. En suivant les aventures “romantico-révolutionnaires” de Célestin, un Gobe-la-Lune de première, il nous embarque dans un univers brillant, excentrique et délirant.
Rien que le personnage principal vaut son pesant de fond de culotte ! Jeune homme filiforme et sautillant aux allures de mime, Célestin est persuadé d’être issu de haute lignée, et n’aspire qu’a retrouver son statut honteusement volé. Au lieu de chercher à s’élever à la force de ses bras ou de son mérite, le jeune homme joue de ses charmes sur le beau sexe et espère épouser une riche héritière… Ca ne vous rappelle pas quelque chose ? Évidemment, Lupano inverse les rôles et met son héros dans la situation dévolue habituellement aux femmes…
Dernière tentative désespéré, Célestin s’attaque à Pimprinule, la fille du roi, dont il fera l’assaut par tous les moyens. Bien entendu, rien ne se passe pas comme prévu et la situation ira de mal en pis.

Avec ce personnage ahuri, excentrique et décalé, Wilfrid impose un vrai personnage de comédie. Bourré de défaut, mais craquant et particulièrement attachant, c’est un romantique exacerbé, auquel on s’attache immédiatement.
Le jeu ne s’arrête pas là, car Wilfrid sait mener sa barque (et son monde). Inspiré du 18e siècle français, son univers est un pur délice de comédie, entre conte fantastique et pièce de théâtre. Il est peuplé de personnages haut en couleur et exubérants qui courent, sautent, bondissent à longueur de page.

Coté construction, les deux tomes sont très différents. J’ai vécu le premier album comme un très long tome d’exposition. C’est d’ailleurs le seul reproche que je me permettrais. La révélation n’ a lieu qu’à la fin et permet de se lancer (enfin) au second tome dans l’aventure. Pour autant, je ne me suis pas ennuyé. Ce monde délirant, peuplé de personnages fort-en-gueules est soutenu par des dialogues audacieux et brillants, mélange improbable de vieux français châtié, poétique et de langage courant, voire argotique.
Le second tome est une succession d’épreuves délirantes qui s’enchaînent avec une énergie et force comique épatante, j’adore !

Au dessin, cette différence entre les deux albums est aussi très marquée. C’est Yannick Corboz, le dessinateur qu’on retrouvera sur “L’Assasin qu’elle mérite” (série hautement recommandable de Wilfrid Lupano), qui signe ici sa première série BD. Son trait assez caricatural se nourrit parfaitement de l’univers brillant et décapant de Wilfrid. Personnages bondissants, en mouvements perpétuels, expressions forcées et compositions dynamiques, c’est excellent.

Le traitement graphique évolue (en bien) au cours de la série. Si l’encrage est un peu “épais” et masque certaines subtilités du premier tome, un changement de technique s’opère pour la seconde partie. Plus léger, le trait non encré est plus livre, expressif et plus virevoltant encore. C’est étonnant de voir la maturité de ce jeune dessinateur se forger en si peu de temps.

Pour résumer, univers 18e siècle sautillant et excentrique, personnages attachants, dialogues inventifs et mise-en-image expressive, cette intégrale est une belle opportunité de re-découvrir la première série d’un duo d’auteurs qui a fait son chemin.



Cet article fait parti de « La BD de la semaine ». Allez donc voir la sélection de la semaine chez Noukette.