La horde du contrevent – Alain Damasio

Par Cpmonstre

J'en ai lu des livres barrés, difficiles d'accès, avec une compréhension peu claire et une écriture pointue (coucou Les Bienveillantes). Mais ici, je me suis prise l'équivalent d'un mur de la taille de celui de Game of Thrones et je suis restée coincée dans l'ascenseur. Avec un début aussi habilement métaphorique (j'ai l'âme d'un poète ce matin), parlons de La horde du contrevent, roman SF, coup de coeur des internautes et Grand prix de l'Imaginaire 2006.

Pour établir un peu le contexte, l'histoire s'articule dans un univers SF, mi-philosophique mi-religieux, où le vent est le centre de toute vie et de tout danger. Un gouvernement, ou tout du moins une civilisation, l'Hordre, envoie une horde constituée d'une vingtaine d'hommes et de femmes ayant chacun une fonction vitale (scribe, traceur, protecteur, soigneur, chasseur...), pour parcourir les terres, contrer et étudier le vent. Leur quête, jamais atteinte jusqu'ici, est d'arriver à l'Extrême-Amont, là où paraît-il se trouve l'origine du vent. Chaque horde se succède après abandon ou disparition complète de l'équipe et est vite remplacée par une autre, leurs enfants et héritiers. La 34e horde, la dernière en date, est perçue comme la meilleure et celle qui pourrait bien réussir à atteindre le but ultime. Cependant, ils découvrent que des Poursuiveurs, dont l'existence n'a jamais été prouvée jusqu'ici et dont les motivations restent obscures, sont lancés à leur trace pour les arrêter.

Je suis honnête, La horde du contrevent est réellement un roman SF de grande qualité. L'écriture quoique complexe est très intéressante, car Damasio a vraiment inventé une sorte de langage, codé par moment, relativement compréhensible, entre le français que nous connaissons et un autre propre à l'auteur. L'histoire en elle-même est originale et fait preuve d'inventivité. Par exemple, la numérotation des pages est inversée : au lieu de commencer par la page 1, on commence par la page 736, ce qui peut paraître déconcertant mais pas gênant pour la lecture. Les différents personnages de la horde ont chacun un symbole qui indiqué au début de chaque paragraphe permet de savoir à qui appartient le point de vue. Il ne faut surtout pas perdre le marque page avec les noms des personnages et leur symbole donné avec le livre, sinon c'est un peu galère. Autre point positif de ma lecture, les personnages qui constituent la horde sont attachants et la poignée que l'on suit " psychologiquement " tout au long du roman sont fascinants. Ils sont soudés par un esprit de famille et une très forte fraternité, se connaissant depuis leur plus jeune âge, mis à l'épreuve par des décennies de voyage et de dangers encourus ensemble. Et c'est beau.

Seulement, je n'ai rien ressenti et, sans savoir vraiment pourquoi, je n'ai pas réussi à m'investir complètement dans le roman. Comme devant un film de Terrence Malick où je pige pas un broc de ce qui se passe, je me suis vidée au fur et à mesure de toute émotion.

En fait, certains passages sont très prenants voire même captivants, que se soit au niveau de l'action ou de l'interaction entre les personnages, mais d'autres plus longs, plus contemplatifs cassent un peu le rythme. Les ellipses qui parsèment le récit n'aident pas non plus, nous renvoyant quelques semaines voire quelques mois en avant. L'ensemble inspire donc un sentiment d'irrégularité dans la narration et on peut dire que ça m'a déroutée. Enfin, l'histoire en général, ce que ça raconte véritablement, ne m'a pas tout à fait plu tout simplement. C'est vraiment ici de l'ordre du goût personnel, comme le fait que je n'aime pas les brocolis mais que je ne dénigre pas leur existence ni que ça peut être bon dans le concept. Vous le sentez mon désir de vous convaincre malgré tout que c'est quand même un bon roman ?

Je dis rarement que je suis déçue d'un livre, parce que généralement je n'ai aucune attente. Malheureusement, ici c'est différent. Conseillé par beaucoup de gens, sur les blogs ou dans les librairies, La horde du contrevent était bien partie pour être LA pépite SF du mois. Je suis vraiment déçue de ne pas avoir réussi à adhérer au voyage, car j'aurais tellement voulu aimer ce roman comme ça a été le cas pour presque tout le monde (faut voir les notes sur Livraddict). Ça m'a fait le même effet pour Les Guerriers du silence de Pierre Bordage. Toutes les personnes, virtuelles ou IRL que je connaisse ont adorées cette trilogie. Sauf moi. J'ai rien bité.