Ce roman est ma première rencontre avec l'auteur Guillaume Guéraud, un auteur que ma cops Anahita aime beaucoup* et qui m'a, je dois l'avouer, complètement bluffée.
Plus de morts que de vivants est un huis-clos sous haute tension dans un collège du xv e arrondissement de Marseille où s'est déclaré, le matin du dernier jour avant les vacances, un virus inconnu et foudroyant. Cela commence par un ridicule saignement de nez chez l'un, une mèche de cheveux qui tombe chez l'autre, ou encore, quelques boutons innocents sur un poignet. Depuis la marche dans le froid glacial de février, le vendredi matin, où les lèvres gercées côtoient les grippes et gastro en rémission, jusqu'à la levée de l'alerte sanitaire le dimanche matin, on suit l'évolution de la situation catastrophique au collège Rosa Parks, où les élèves tombent comme des mouches.
Les plus :- La langue jeune, rythmée et très imagée, de l'auteur. Ses mots nous collent à la peau comme la sueur froide des personnages, et nous élèvent tout à la fois.
- La construction. La construction du récit est parfaite. Faisant appel à des formes et des points de vue variés, Guillaume Guéraud nous cartographie le collège et l'insaisissabilité du virus avec une précision millimétrée. Depuis les bulletins d'information radiophoniques, qui réagissent avec beaucoup de retard et ancrent ainsi mmédiatement le récit dans la réalité, jusqu'aux nombreux extraits de conversations téléphoniques entre le directeur de l'établissement et le rectorat d'un côté, le chef du SAMU sur place et celui des urgences de l'hôpital d'un autre, en passant par les échanges par walkie des agents de polices avec leurs supérieurs, tout est conçu pour diriger notre peur.
- Un autre élément de construction que j'ai beaucoup apprécié est la pluralité des protagonistes, ce qui en fait presque un roman choral (bien que la narration soit à la troisième personne). Chacun a, chevillé au corps, un caractère unique et (souvent) riche en défauts. Pour autant, ils sont vite attachants, ce qui contribue à l'angoisse de les voir succomber à leur tour au virus. (Car l'auteur n'épargne personne.)
- Le rythme est excellent. Sans nous laisser le moindre répit, il ne recourt pas non plus à des stratagèmes poussifs pour nous cliff-hanger en fin de chapitre. Malgré un départ in medias res, l'auteur prend le temps de nous faire connaître ses personnages, à coups de dialogues et de petites analepses (= flash-back), ce dont nous lui sommes infiniment reconnaissants. Il use aussi généreusement d'un procédé que j'ai évoqué dans ma chronique de La Boutique Vif-Argent (où c'est plutôt raté) : la prolepse bien dosée. Avec des phrases du type " Il avait raison de l'embrasser comme si c'était la dernière fois, car le virus n'en avait pas fini avec eux ", il nous crée des angoisses pas possible (nb : il est plus habile que moi, j'invente un exemple pour ne pas spoiler).
- Hmm...Je ne sais pas. C'est gore ? Il y a un côté " film de zombies " dans les descriptions riches en fluides et miasmes de toutes sortes. La violence du virus est très visuelle. J'ai plutôt apprécié cet aspect mais, oui, c'est ultra gore.
Ce roman a été listé parmi les pépites du Salon du Livre et de la Presse Jeunesse de Montreuil (dont je parle ici). C'est un excellent choix, et je vous invite à vous flanquer une auto-frousse de tous les diables en le lisant à votre tour.
Bonne lecture,
Plus de morts que de vivants, de Guillaume Guéraud, chez Le Rouergue, 2015, 251 pages* Vous pouvez retrouvez es chroniques d'Anahita sur plusieurs romans noirs de Guillaume Guéraud aux liens suivants :