Gaya Guérian est née en 1939 à Paris. Très vite, durant son enfance, elle apprend que sa famille est d’origine arménienne. Azad, sa mère, et Achrène, sa grand-mère, ont survécu au génocide de 1915. Aujourd’hui, avant qu’il ne soit trop tard, Gaya Guéridan s’est attelée à mettre noir sur blanc sa tragédie familiale afin que sa descendance n’en ignore rien et que le monde n’oublie pas. Un récit intime, un témoignage de plus pour nous dire l’Histoire. Entamée en 2004, après le décès de sa mère, la rédaction de ce récit nous donne ce livre qui vient de paraître.
Rappel des faits emprunté à Wikipédia : « Le génocide arménien a été perpétré d'avril 1915 à juillet 1916, voire 1923, au cours duquel les deux tiers des Arméniens qui vivent alors sur le territoire actuel de la Turquie périssent du fait de déportations, famines et massacres de grande ampleur. Il est planifié et exécuté par le parti au pouvoir à l'époque, le Comité Union et Progrès (CUP), plus connu sous le nom de « Jeunes-Turcs », composé en particulier du triumvirat d'officiers Talaat Pacha, Enver Pacha et Djemal Pacha, qui dirige l'Empire ottoman alors engagé dans la Première Guerre mondiale aux côtés des Empires centraux. Il coûte la vie à environ un million deux cent mille Arméniens d'Anatolie et d'Arménie occidentale. »
Je ne vais pas entrer dans les détails de ce récit dont vous imaginez bien les grandes lignes ; les massacres, « Il y a eu les massacres à la fin du siècle dernier, puis l’hécatombe de 1915, puis les purges soviétiques, puis la traque ethnique turc, puis… Décidément, serons-nous jamais en paix ? », l’exode par la Grèce puis l’arrivée en France à Marseille avant de remonter vers la région parisienne. La Seconde Guerre Mondiale et les persécutions des Juifs, parallèle douloureux pour ceux-là mêmes qui avaient échappé à des massacres. Mais pour les vivants, la vie reprend toujours ses droits – c’est l’un des enseignements de ce texte et le sous-titre du bouquin – des enfants vont naître, faire du français leur langue principale, s’intégrer dans la société…
Gaya Guérian dit les faits en phrases courtes et qui claquent comme le fouet, sans trop s’attarder sur les horreurs, mais comment les taire si l’on veut les dénoncer ? Dieu merci, le récit n’est pas fait que de pleurs, il y a aussi la vie – quelconque, celle des gens comme vous ou moi – et des rencontres avec de futurs illustres (Charles Aznavour, Johnny Hallyday et d’autres)pour apporter une touche de gaité à ce récit très émouvant.
« Comment nous, les enfants du génocide arménien, avons-nous survécu au poids du passé ? Je suis née avec la perception de ce massacre, j’ai grandi avec le sentiment d’être une rescapée, je suis devenue adulte avec le besoin d’une identité de plus en plus forte. Toute ma vie, j’ai su, d’abord confusément, ensuite de plus en plus précisément, que le passé ne serait jamais une table rase, qu’il me tomberait sur les épaules, de toute sa densité, un jour. Je me suis construit une vie normale dans un héritage anormal. Les cadavres d’hier pèsent sur le dos des vivants d’aujourd’hui. Chaque geste banal, dans ces circonstances, est un geste exceptionnel. »
Gaya Guérian L’Arménienne L’indestructible fil de la vie XO Editions – 267 pages –