Éditeur : Sonatine - Date de parution : juin 2015 - 516 pages
*
Je me suis lancée dans un petit pavé, pour changer ! Il y a certains livres que l'on commence, tout en sachant qu'on va les adorer. Papillon de nuit est de cette trempe !
Nous sommes en 1982. Daniel Ford se retrouve dans le couloir de la mort. Incarcéré injustement il y a dix ans pour le meurtre de son meilleur ami, Nathan. Il ne lui reste qu'une trentaine de jours à vivre, avant son exécution. Tous les jours, le père John Rousseau recueille ses dernières confessions, dans le " Salon de Dieu ".
Le récit alterne le présent du couloir de la mort et le passé : les souvenirs se déroulent page après page et nous plongeons avec fulgurance au cœur de l'Amérique des années 60 : l'assassinat de Kennedy, la lutte des Noirs pour leurs droits civiques, Martin Luther King, le début puis l'enlisement de la guerre du Vietnam...
Tout commence par un sandwich au jambon cuit partagé. Nous sommes en Caroline du Sud. Daniel rencontre Nathan Vernet, un enfant noir. Ils ont six ans. Ils deviennent immédiatement complices et ne se quitteront plus. " Ça avait commencé avec un sandwich au jambon cuit, le meilleur de Caroline du Sud, et ça s'achèverait avec une Lucky Strike et une promesse de mort inévitable. "
Les souvenirs s'égrènent avec mélancolie, le passé de Daniel se redessine entre les murs de la prison tandis qu'il nous raconte l'histoire de sa vie. Il repense aux personnes qui ont marqué sa vie : Eve Chantry et son papillon de nuit, Caroline Lanafeuille son premier amour, Linny Goldbourne et son grain de folie...
" J'étais allé à Atlanta pour pleurer Martin Luther King. J'avais grandi avec des garçons qui étaient désormais morts dans une vaste jungle à l'autre bout du monde. J'avais fumé de l'herbe, fait l'amour dans le sable près de Port Royal Sound, bu de la tequila avec du sel et du citron... "Tout comme dans Seul le silence, qui était pour moi un énorme coup de cœur, nous sommes ici à la frontière entre le thriller et le roman : il n'y a pas vraiment de suspens insoutenable et pourtant je n'ai pu m'empêcher de tourner les pages avec frénésie : l'histoire est réellement prenante, on ressent une sorte d'addiction pour les mots d'R.J. Ellory.
C'est un roman puissant et magnifique, qui nous livre une incroyable fresque de l'Amérique des sixties, sous fond de complot, dont on boit littéralement les mots. A lire absolument !
***
" Je crois que certaines choses, juste quelques-unes, n'appartiennent qu'à soi et à Dieu. "
" Le recul, notre conseiller le plus cruel et le plus perspicace, éclaire si facilement nos erreurs de jugement. "
" Aimer, vivre, perdre : ces choses sont simplement humaines, et peut-être disent-elles quelque chose du monde. Mais les faire deux fois dit quelque chose de soi. "
" Ces souvenirs étaient depuis si longtemps minutieusement pliés dans un tiroir au fond de mon esprit. Maintenant, tandis que je les dépliais, les tenais, les aérais à la brise de mes mots, j'avais conscience de leur tonalité et de leur odeur, de leur couleur et de leurs sons, et des sentiments qu'ils suscitaient en moi. "