Les textes sacrés sont souvent des taches de Rorschach, ces images aux formes incertaines que les psychiatres montrent à leurs patients pour faire ressortir les structures de leur personnalité. Chacun y voit et y puise selon ses propres bibittes ou penchants ; et, dans le cas des textes sacrés, en tire valeurs, attitudes et comportements qui lui conviennent.
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Dans un réseau social, quelqu’un souhaite que l’école reconnecte l’enfant à la Nature.
De quelle nature parle-t-on ici ? Physique ? Végétale ? Animale ? Mentale ? Spirituelle ? L’humain appartient à l’ensemble. Si l’on veut sa vie réussie, il faut préparer le jeune à vivre et progresser à l’intérieur de toutes ces catégories.
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Il y a peu, je terminais l’écriture d’un recueil de nouvelles fantastiques (Gloomy Sunday ou Le récit de Tasha Bonte). J’y ai rédigé une brève introduction où j’exprime exactement ce que Marc Pasterger a lui-même écrit en préface de son ouvrage inexplicable, mais vraies, lu hier soir. Coïncidence ? Synchronicité ?
Mon texte :
En automne progresse le noir, progresse la nuit. Le brumeux et le flou augmentent ; le mystérieux et l’insolite sortent des sous-bois et des sous-sols et se montrent à la lumière rare des jours gris.
Même si les heures lumineuses se tassent, si le royaume de l’obscur s’étend, il serait abusif de croire qu’il en résulte pour l’esprit affaiblissement et engourdissement. Des ténèbres jaillit le clair ; et le regard inversé de l’humain peut profiter des jours sombres pour s’adonner à l’introspection, puiser en lui-même des intuitions fulgurantes ou quiètes qui lui ouvriront sur le réel des portes qu’il croyait jusque-là inexistantes.
Les récits que l’on tire de cet état d’esprit ont ce côté orbiculaire – in-finalisé – de plusieurs légendes innues ou inuites. Le plafonnier n’éclaire pas tous les recoins de la pièce. Les solutions totales des Maigret et des Sherlock Holmes en sont absentes. La magie du clair-obscur survit à la dernière ligne du texte. Le règne du non-dit et de l’indicible perdure, sans faste, mais assurément. (Le récit de Tasha Bonte)
Et ma lecture d’hier :
Rien ne me plaît davantage qu’un fait avéré laissant patauger l’homme de ce début de troisième millénaire nanti d’un savoir minuscule et d’une culture très parcellaire. J’adore les histoires n’arborant pas une fin en béton sans discussion possible. Je raffole des récits — authentiques — laissant la porte grande ouverte à l’imaginaire, à l’existence d’un autre monde, parallèle, invisible, différent, meilleur ou moins bon, et même un peu de tout ça à la fois ! (Marc Pasterger)
Ces textes me ramènent en mémoire une citation de Braque : « Je ne cherche pas la finition, je tends vers l’infinition. »
L’auteur…
Auteur prolifique, Alain Gagnon a remporté à deux reprises le Prix fiction roman du Salon du Livre du Saguenay–Lac-Saint-Jean pour Sud (Pleine Lune, 1996) et Thomas K (Pleine Lune, 1998). Quatre de ses ouvrages en prose sont ensuite parus chez Triptyque : Lélie ou la vie horizontale (2003), Jakob, fils de Jakob (2004),Le truc de l’oncle Henry (2006) et Les Dames de l’Estuaire (2013). Il a reçu à quatre reprises le Prix poésie du même salon pour Ces oiseaux de mémoire (Le Loup de Gouttière, 2003), L’espace de la musique (Triptyque, 2005), Les versets du pluriel (Triptyque, 2008) et Chants d’août (Triptyque, 2011). En octobre 2011, on lui décernera le Prix littéraire Intérêt général pour son essai, Propos pour Jacob (La Grenouille Bleue, 2010). Il a aussi publié quelques ouvrages du genre fantastique, dont Kassauan, Chronique d’Euxémie et Cornes (Éd. du CRAM), et Le bal des dieux (Marcel Broquet) ; récemment il publiait un essai, Fantômes d’étoiles, chez ce même éditeur . On compte également plusieurs parutions chez Lanctôt Éditeur (Michel Brûlé), Pierre Tisseyre et JCL. De novembre 2008 à décembre 2009, il a joué le rôle d’éditeur associé à la Grenouille bleue. Il gère aujourd’hui un blogue qui est devenu un véritable magazine littéraire : Le Chat Qui Louche 1 et 2 (https://maykan.wordpress.com/).