« Victor et Macha »
KIMHI Alona
(Gallimard)
Passionnant roman dont le Lecteur recommande la découverte à celles et ceux qui auraient tendance à confondre le peuple israélien et ceux qui gouvernent à Tel-Aviv. Passionnant non pas tant dans le récit de la relation de Victor et de Macha, frère et sœur, orphelins de surcroit. Victor et Macha placés sous la tutelle de Catherine, autrefois enseignante, et dont les méthodes pédagogiques musclées lui avaient été infusées au pays du bolchevisme. Longtemps ballotés de kibboutz en kibboutz après le décès accidentel de leurs parents, le frère et la sœur auraient pu retrouver un certain équilibre auprès de leur aïeule, autorisée à son tour à émigrer d’Ukraine en Israël en ces années où les premières failles s’ouvraient dans le bloc soviétique.
Le plus passionnant se situe dans la description approfondie de l’incapacité et parfois du refus manifestés par la société israélienne des pères fondateurs d’accueillir et d’intégrer les nouveaux venus. Celles et ceux qu’elle confina à ses marges, auxquels elle ne concéda que le minimum nécessaire à la survie. Certes, le récit d’Alona Kimhi est historiquement daté. Il se déroule en ces années où les travaillistes perdirent le pouvoir au profit de la droite, tandis que commençait à s’écrire la fin de l’histoire du communisme. Mais il laisse entrevoir ce que fut l’exclusion des nouveaux venus, suspects aux yeux des « vrais » israéliens de déstabiliser un ordre social qu’ils considéraient jusqu’alors comme immuable. C’est dans ce contexte que les deux orphelins tentèrent de trouver les espaces de leur survie. Entre violence larvée, corruption et petits trafics. Avec juste ce qu’il fallait de solidarité entre ceux qui ignoraient quand et dans quelles conditions ils deviendraient israéliens de plein droit. Une société en plein chamboulement qui laissait déjà entrevoir ce qu’elle est devenue aujourd’hui.