Aujourd’hui, rendez-vous pour une nouvelle chronique autour du premier roman d’Alexandre Seurat, La maladroite, paru aux éditions du Rouergue, collection La Brune. Je l’avais repéré dans la sélection proposée pour les Matchs de la Rentrée littéraire de PriceMinister, parmi d’autres. J’ai tenté ma chance, mais cette année, je n’ai pas été choisie. Pas grave, j’ai gardé le titre en tête, et j’ai profité de son arrivée à la bibliothèque pour m’en saisir et le lire à cette occasion. Ce que j’en avais aperçu annonçait un roman fort, difficile du fait du thème abordé (ici, la maltraitance sur enfant). Et je peux d’ores et déjà vous l’annoncer, c’est peu de le dire…
Diana est une jeune enfant en apparence comme les autres… Mais derrière les apparences se cachent parfois de lourdes et terribles vérités. Abandonnée à la naissance, puis reprise un mois après par sa mère biologique, Diana n’aura ensuite de cesse de souffrir au sein de sa cellule familiale. Souffre-douleur de parents aux exigences d’éducation extrêmes, la jeune fille passera de classe en classe, de bureau en bureau, marques et traumatismes apparents, sans que personne ne fasse vraiment quelque chose pour la sortir de ce cauchemar. Toujours de bonnes excuses servies par les parents, reprises par Diana elle-même, additionnées à une prise de conscience partielle et souvent tardive de la part des témoins (même la proche famille !) et des autorités : comment peut-on alors continuer de penser que l’issue de tout cela puisse être favorable à la fillette ?
Ce roman prend la forme d’un recueil de témoignages des acteurs de ce terrible drame : famille, personnel scolaire, médical, détenteurs de l’autorité. Et tout de suite, je vous dirais que oui, chacun, à sa manière, a sa part de responsabilité dans l’issue de cette histoire. Dès les premières pages, on comprend que nous n’aurons pas le droit à une « happy end ».
De la révolte, c’est ce que m’a inspirée dans un premier temps cette histoire. Car nous savons tous que ce genre de situations existe dans la vie réelle. Tout le monde a forcément un exemple de malheureux fait-divers en tête à la lecture de ce roman. Alexandre Seurat lui-même a indiqué s’être inspiré d’un fait réel pour écrire son histoire, pris par ce besoin d’écrire pour affronter ce qui semble irréel (je vous laisse découvrir cette interview, qui m’a permis d’en apprendre plus sur l’auteur et sur son livre).
J’ai été happée par cette histoire, j’ai parfois eu le sentiment de lire un article de presse, un dossier spécial qui aurait recueilli divers témoignages de personnes ayant assisté de près ou de loin à ce drame. En dépit de la difficulté liée au thème du roman (la maltraitance sur enfant), ce livre se lit avec une fluidité déconcertante. Rien d’inutile, pas de tergiversations superflues, que du concret, un sentiment d’urgence qui vous tient jusqu’à la fin. Rien de réellement frontal non plus, il n’est pas question de décrire les violences en direct, ça m’a semblé être davantage une affaire de silence, de non-dits, d’aveuglement même. C’en est glaçant. Glaçant face à tant de cruauté, tant d’évidence et tant d’inaction. Qu’aurions-nous fait à la place des témoins du calvaire de Diana ?
En rédigeant cette chronique, j’en viens à me demander si par l’écriture de ce roman, l’auteur a souhaité nous faire prendre conscience du rôle que nous pouvons être amenés à endosser si une telle situation se présentait à nous. Interprétation strictement personnelle, bien entendu, mais que je souhaitais tout de même partager avec vous, tant celle-ci m’a effleuré l’esprit.
A travers ces quelques mots, je n’ai pas l’impression de vous retranscrire mon ressenti aussi fidèlement que je le souhaiterais, tant j’ai été saisie et interpellée par ce roman. C’est un livre qui, en tout cas, ne devrait pas manquer de vous bousculer dans votre confort de lecteur, comme cela a été le cas pour moi…