Ce livre, je l’ai découvert par hasard, en regardant à une heure avancée de la soirée « On n’est pas couché », l’émission de Laurent Ruquier, le samedi soir, sur France 2. Isabelle Monnin était alors invitée pour présenter son nouveau livre, Les Gens dans l’enveloppe (éd J.-C. Lattès, septembre 2015) . Quand je l’ai découverte à l’écran, je ne savais rien de l’auteure ni même de son roman. Simplement, je me suis laissée séduire par la façon dont ce livre est né : une histoire créée de toutes pièces à partir de photos qu’Isabelle Monnin a acquis sur un site web de vente aux enchères. Arrive en deuxième partie l’enquête, menée par l’auteure pour retrouver la trace des « Gens » sur les photos… Le tout est accompagné d’un CD pensé par Alex Beaupain à partir des écrits d’Isabelle Monnin.
Première partie, le roman : il s’articule en chapitres centrés sur les personnages principaux imaginés à partir des photos. Nous découvrons ainsi Laurence, Michelle, Simone et puis Serge, entre 1978 et 1988, période à laquelle les photos auraient été prises. Laurence, enfant abandonnée par sa mère, qui assiste à la lente descente de son père suite à ce départ, qui espère avec un optimisme sans faille le retour de sa maman. Elle est une petite fille solitaire, renfermée, qui semble pourtant déborder d’imagination, qui nous conte ce qu’étaient les traditions au sein de sa famille, la balade rituelle près du barrage, le poulet cuisiné par Simone, sa grand-mère, « Mamie Poulet »… Elle confie aussi son quotidien, ses doutes, ses peurs, ses sentiments, d’une façon et d’une forme qui m’ont évoquées l’idée d’un journal intime. Michelle, la mère, arrive ensuite, et les choses, sa façon de les percevoir, sont racontées d’un autre point de vue, le sien. Nous sont alors dévoilées les raisons de son départ du foyer, sa passion brûlante pour cet homme venu l’extirper d’une routine qu’elle ne supportait plus. Simone, la grand-mère, partage avec nous les lettres envoyées par sa petite-fille, partie sur les traces de sa mère, en Argentine, au crépuscule de sa vie. Serge, enfin, le père, vient mettre un point final à la saga familiale. Le tout forme un ensemble qui donne sens à l’histoire.
Quel est le point commun à tous ces destins brisés ? L’abandon, sous ses différents aspects. L’abandon maternel, conjugal, l’abandon de la vie… Les photos qui ont permis la naissance de ce livre arrivent juste après les dernières pages de la partie « fiction ». De quoi rendre familier, pour nous aussi, ces fragments de vie à jamais figés sur papier glacé, et de mettre des images sur les mots qui viennent tout juste de passer…
Cette partie m’a beaucoup plu, elle m’a fait ressentir beaucoup d’émotions. J’ai trouvé cette première partie assez singulière. Qui ne s’est jamais imaginé ce que pouvait être la vie des personnes que nous croisons ? Isabelle Monnin nous livre sa version de l’histoire, au lecteur désormais de se l’approprier, de se l’imaginer… D’ailleurs, le titre, « Les Gens dans l’enveloppe », m’a évoqué quelque chose de plus profond. Quelles pensées, quels secrets se cachent à l’intérieur de chaque personne que nous sommes un jour amenés à croiser ?
Dans la seconde partie, place à l’enquête, le vrai, le concret. Grâce à un travail de fourmi, ajouté à un coup de chance absolu (celle d’avoir pu identifier l’endroit où se trouvait le clocher présent sur l’une des photos), l’auteure retrouve la trace des « Gens dans l’enveloppe ». Sous la forme d’un journal de bord, elle s’attache à nous retranscrire ses rencontres, ses échanges, ses questionnements, tout ce qui a pu la conduire à un tel document. Je dois avouer qu’après avoir été complètement emballée par la première partie, je me suis sentie un peu égarée dans la deuxième. Faire le rapprochement entre le personnage et la vraie personne, identifier quel est le lien généalogique qui unit untel à untel : malgré les descriptions et les explications, j’ai eu un peu de mal à m’y retrouver. Sentiment qui s’est tout de même estompé à la lecture de l’arbre généalogique de la famille qui a inspiré « Les Gens… ». J’ai été néanmoins séduite par le fait d’avoir entre les mains les clés qui m’ont permis de comprendre dans son ensemble la démarche d’Isabelle Monnin, autour d’un projet de longue date (3 ans pour le voir aboutir). Cependant, le coup de cœur s’est un peu éloigné, même si globalement, j’ai réellement apprécié ce livre…
Les chansons imaginées par Alex Beaupain, intercalées avec quelques reprises de titres qui ont compté pour les Gens, viennent mettre un beau point final à cet étonnant projet. J’ai été particulièrement touchée à l’écoute des reprises choisies et interprétées par les vrais Gens, vraiment. Se dire tout simplement que ces Gens, ça aurait pu être vous, ça aurait pu être moi, ça aurait pu être n’importe qui. Chaque destin, chaque personne sur cette Terre a son histoire, et chaque histoire vaut la peine d’être écoutée. Voilà ce que j’ai retiré de ce livre, qui fera à coup sûr un très beau cadeau à offrir sous le sapin !