Premier roman lu en tant que Lectrice Charleston 2016 !
Titre et auteur : Les années du silence, T1de Louise Tremblay d'Essiambre
Date de publication : 08/01/16
Nb pages : 448
Résumé :
1942. À l'aube de ses dix-huit ans, Cécile Veilleux doit quitter la ferme de ses parents, dans la Beauce, et son fiancé Jérôme, pour dissimuler une grossesse qui jetterait l'opprobre sur sa famille.
Ce premier tome des Années du silence renferme deux parties bien distinctes : La tourmente et La délivrance. Ces deux titres nous donnent immédiatement une idée de ce qui nous attend. D'un côté, nous faisons la rencontre de Cécile, dix huit ans, enceinte de Jérôme, l'amour de sa vie. De l'autre, nous rencontrons Rolande, treize ans, enceinte également mais d'une toute autre manière. Le lecteur suit l'évolution de leurs deux grossesses jusqu'au point de non-retour, jusqu'à la vie décide de ce qui les attend par la suite.
En commençant ce roman, je pensais très honnêtement ne pas aimer. Je trouvais le récit un peu lent et le langage un peu déroutant (c'est une sacrée expérience de lire du patois retranscrit !). Ce fut mon ressenti durant une dizaine de pages, mon impression ayant changé du tout au tout une fois complètement immergée dans l'univers de Cécile et Rolande. J'ai aimé profondément ce roman, au point que les larmes me sont venues aux yeux à plusieurs reprises. Il est impossible de rester insensible en lisant ce roman.
Nous sommes dans les années 40 au début du roman et les mœurs sont différentes des nôtres actuellement. La condition de la femme, non-libre de ses choix, m'a particulièrement touchée. On sent les femmes de ce livre sous le joug des hommes, au départ. C'est accablant puisque les décisions qui leur sont imposées changent parfois considérablement leur vie, au point d'ancrer en elles de profondes blessures qui ne cicatriseront peut-être jamais. Ce qui m'a le plus chamboulée, le plus énervée réellement, ce sont les religieuses des établissements (orphelinats, hôpitaux) coincées dans leurs préjugées, dans leur vision étriquée du monde. Elles traînent un air de dédain qui juge sans savoir. Ce qui m'a exaspérée (et le mot est faible), c'est qu'elles ne cherchent pas à aider leurs prochains (elles les blessent même parfois volontairement), elles sont simplement dans une optique de jugement strict. J'étais choquée de leur attitude vis-à-vis de Rolande, enceinte à treize ans, qui à leurs yeux ne peut être qu'une " trainée " pour se retrouver dans cet état. Aucune autre alternative n'est possible selon ces religieuses. (En écrivant tout cela, je sens l'irritation me gagner encore une fois !)
J'ai aimé le personnage de Cécile que l'on suit de la première page à la dernière. C'est un personnage sensible, doux, que l'on souhaite protéger du monde. Elle a une aura qui la rend magnifique à nos yeux. Pourtant, la vie est rude à son égard et le malheur frappe souvent à sa porte. L'injustice l'assaille réellement de toute part. Rien ne se passe comme prévu pour Cécile et c'est ce qui chagrine fortement le lecteur.
Rolande est le personnage qui m'a le plus marquée de tous. Elle est une enfant, elle a un visage ingrat, elle est heureuse, elle est débrouillarde, la voilà telle qu'on la connaît au départ. Son changement est imminent, elle est enceinte pour une raison abominable. Une raison qui transcende d'horreur. Rolande a besoin d'aide, a besoin de réconfort mais personne n'est pas là pour elle et je peux le dire, j'ai essuyé plus d'une larme pour elle. Le rejet de sa mère, le dégoût des religieuses, la violence qui s'immisce dans le comportement de notre Rolande qui ne sait plus rien gérer, tout cela m'a bouleversée au plus haut point. J'ai rarement été si émotive, si sensible à la condition d'un personnage de fiction. Rolande est mon personnage préféré.
Les thèmes s'entremêlent dans Les années du silence. La mort et le deuil sont très présents, sources d'émotions vives pour nos personnages autant que pour nous. L'injustice est quelque chose qui revient souvent hanter notre esprit de lecteur passionné. Néanmoins, le thème le plus remarquable est l'Absence. L'absence régit tout le roman. Cécile passe sa vie à attendre, soumise à l'Absence généralisée. Et c'est bien connu, l'absence provoque le manque et le silence. Le manque devient pathologique chez certains personnages, le silence devient loi dans l'univers crée par Louise Tremblay d'Essiambre. Le roman porte si bien son titre. Du silence découlant de la mort, de l'absence ou tout simplement du refus et/ou manque de communication, tout s'articule autour de cet état.
En conclusion, j'avoue avoir pris mon temps pour me délecter de ce roman qui est terriblement fort en émotion. Je redoutais de le terminer tant je m'étais impliquée dans la vie des personnages de Louise Tremblay d'Essiambre. C'est incroyable comme les personnages de ce roman ont la faculté de nous émouvoir. Ce livre fait partie de ceux qui m'ont le plus touchée dans ma vie, il est extrêmement bien mené, juste, sensible. En ouvrant Les années du silence, c'est une explosion d'émotions qui nous jaillit au visage.
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