« La Théorie de la tartine »
LECOQ Titiou
(Au Diable Vauvert)
Un roman « vivant », ancré dans le monde d’aujourd’hui. Un roman qui interroge sans le moindre complexe la société virtuelle qui se construit parmi les multiples ramifications d’Internet. Trois personnages, à une dizaine d’années de distance, se confrontent aux tumultes provoqués par les bouleversements qui concernent aussi bien leur vie professionnelle que leur vie affective. Christophe, jeune journaliste, créateur d’un site d’information qui pourrait ressembler à Médiapart. Marianne qui eut la malencontreuse idée que fussent filmés ses ébats amoureux. Paul, lycéen mais surtout hacker, fasciné par les développements des machineries informatiques. Les images des ébats de Marianne apparaissent sur un site spécialisé. Par l’entremise de Christophe, Paul se lance dans une tentative « d’effacement » de ces images ô combien compromettantes pour quelqu’un qui n’a pas renoncé, en dépit de son peu d’enthousiasme, d’atteindre au terme de son cursus universitaire.
« La Théorie de la tartine » brosse un tableau peu rassurant des évolutions de la société virtuelle. Via Christophe qui découvre qu’au journalisme pur et dur se substitue un journalisme de dépendance soumis aux impératifs du marketing. Via Paul, le seul qui soit en mesure de comprendre vers quelle sinistre destinée l’Internet de masse conduit cette société virtuelle. Via Marianne, paumée, endolorie, incapable de se construire un devenir. « Tous trois partageaient un constat : on vivait à l’aube d’une révolution qui déterminerait notre avenir et la nature de la société dans laquelle on allait vivre. Le web n’était plus la cour de récré qu’elle avait connue, c’était désormais le champ d’une bataille incertaine entre les États, des multinationales et des individus qui, eux, voulaient protéger leur vie privée et leurs droits contre le contrôle imposé par les deux précédents protagonistes. »
Orwell est à la fois proche et loin des préoccupations qui parcourent ce roman. Un roman « constat » plus qu’un roman « condamnation ». Même si la condamnation apparaît parfois en filigrane. Une condamnation qui a, aux yeux du Lecteur, la faiblesse de se diluer dans le fatras de récits annexes qui se justifient par la nécessité de donner de la consistance aux trois personnages principaux mais qui édulcorent un tant soit peu le réquisitoire. Le « jeunisme » de l’écriture ne peut à lui seul pallier à l’expression de la colère et (ou) de l’indignation.