La maison en chocolat de Claudio Cerdan aux éditions Sol y Lune
Barcelone 1912.Milagros et son père Comodo viennent d’être expulsés par leur propriétaire pour non paiement de loyer. Ils errent dans les rues de la ville, à la recherche d’un emploi pour le père et d’un logement pour les abriter. Alors que Comodo est en train de discuter son embauche, une femme aborde Milagros, restée seule, et lui promet de lui offrir un bonbon pour son anniversaire. La petite fille suit la gentille dame sans se méfier.
La femme conduit la fillette chez elle. Elle lui explique les règles strictes qui régissent la vie à la maison, lui demande de l’appeler maman et lui présente Pepito son frère. Milagros est troublée d’avoir retrouvé ainsi sa mère, dont son père lui disait qu’elle était partie pour un monde meilleur. Elle est troublée par les commentaires du garçonnet qui voit « maman » comme une sorcière.
« La chambre prohibée s’ouvrit. Milagros se demanda quelle sorte de mystères il y avait là-dedans et décida de jeter un coup d’œil. Une fois dans la cuisine, sa nouvelle mère attira son attention. Elle avait changé ses habits de mendiante dégingandée en une robe de soie fine avec des volants dorés. Une perruque argentée brillait sous son énorme chapeau bleu. Elle s’était maquillée et s’appuyait sur une élégante ombrelle. Elle portait des gants jusqu’aux coudes et des bagues en or serties de pierres précieuses ornaient ses doigts. Aux yeux de la petite, elle ne ressemblait plus à la mendiante qui l’avait éloignée de son père.C’est pas une sorcière, se dit-elle, c’est une princesse. »
Partant d’un fait divers sordide qui marqua le Barcelone du début du XXème siècle, Claudio Cerdan nous livre un roman noir, un conte cruel. Il revisite Hansel et Gretel en racontant toute l’histoire à travers les yeux de Milagros. Tout au long du livre, la peur monte graduellement. Toute l’horreur de la situation est suggérée, jamais montrée directement. La tension est atténuée par la description des jeux des enfants. Cette alternance entre jeu et horreur, monde enfantin et monde adulte, donne encore plus de force au récit. La maison en chocolat est un livre qu’on ne peut plus lâcher une fois commencé. Une très belle découverte.
« Et comme un fantôme qui ressurgit dans la mémoire au moment le plus inopportun, il libéra ses larmes, noyant une enfance interrompue, jusqu’à ce que la fatigue s’impose aux larmes, et ils purent alors rêver de cerfs-volants dans le ciel, de bateaux dans l’eau ou des scarabées qui, panés dans la bouse, se transformaient en mets succulents. »
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