Chronique « Dilemma »
Scénario et dessin de Clarke, couleurs de Cerise,
Public conseillé : Adlutes/Adolescents
Style : Aventure historique
Paru aux éditions « Le Lombard », le 16 janvier 2016, 136 pages, 19.99 euros
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L’Histoire
Le Pyrée, Grèce, 354 avant J.C. Diogène, Platon, Aristote, Xénophon se rassemblent pour continuer l’oeuvre imaginée par Démocrite : inventer le futur de l’humanité !
Egypte, 1937. Michael Dorffman, historien allemand, vient de découvrir un site inestimable, où sont enterrés des centaines de codex de différentes époques. Mais à son retour de Berlin, tous les moyens lui sont coupés. L’époque n’est plus aux recherches, car l’Allemagne vient d’annexer l’Autriche…
Ce que j’en pense
Clarke, l’auteur protéiforme de “Mélusine”, “Réalités obliques”, “Cosa Nostra”, “Docteur Bonheur” et j’en passe, signe certainement son oeuvre la plus inventive et ambitieuse. D’ailleurs, Les éditions du Lombard l’ont bien compris, car ce pavé de 130 pages est proposé en deux versions !
Tout d’abord, il y a un sacré bon ”Pitch” : les grands penseurs de l’antiquité se demandent s’ils peuvent façonner le futur ? A l’aube de la seconde guerre mondiale, un chercheur allemand découvre ces récits et se demande à qui il doit les confier ? Évidemment de ce dilemme, naîtra un monde totalement différent, car la connaissance du futur est source de pouvoir…
Suivant ce choix cornélien, vous aurez donc deux versions (deux fins) de l’histoire plus ou moins positives… Même si vous ne savez pas laquelle vous allez acheter, pas d’inquiétude. La fin alternative est en ligne sur le site de l’éditeur.
Au delà du pitch, il y a surtout une maîtrise narrative exceptionnelle. Clarke entremêle les deux récits (l’antique et le moderne), dans une succession de scènes alternées. Bien entendu, l’histoire qu’on suit principalement est celle qui se déroule en Allemagne, mais le montage dynamise terriblement le récit.
Attentif au réalisme, Clarke compose un réseau de personnages dense et subtil, sur fond de déclaration de guerre mondiale. Repères historiques précis, relations complexes, faux alliés, il mène son récit avec une belle maîtrise.
Il évite aussi la facilité et le manichéisme, avec un personnage principal non caricatural. Allemand, mais anti-hitlérien, Michael est amoureux d’une jeune femme juive…
Une fois les enjeux posées, l’histoire va à fond de train, version course-poursuite. Michael doit traduire les fameux parchemins, mais aussi se situer sur le plan éthique. Changements de rythme, révélations, retournements de situation, on ne s’ennuie pas une seule seconde.
Graphiquement, j’ai aussi apprécié la reconstitution historique. L’époque antique n’est pas très travaillée, mais le “Berlin” de 1938 est très convainquant. Mode vestimentaire, architecture, rapports sociaux, Clarke apporte un soin minutieux au contexte.
Comme je le laissais entendre dans l’introduction, Clarke n’a pas un style, mais plein de possibilités ! Celui qu’il adopte pour “Dilemma” est une base classique, à l’encrage très légers. Honnêtement, ce n’est pas ce que je préfère dans cet album. Je le trouve que résultat graphique manque un peu de force, contrairement à son travail sur “Réalités obliques” par exemple. Mais c’est son choix, et il n’est pas gênant.
Pour résumer, laissez vous embarquer dans une fiction historique maîtrisée et ambitieuse. Clarke s’amuse avec l’idée de la détermination de l’homme et nous offre un album-double (avec une fin alternative), qui vaut le détour.
Cet article fait parti de « La BD de la semaine », rassemblé chez « ????. Allez donc faire un tour !