Présentation de l'éditeur :
" Vous voyez la montagne, ces collines pareilles à des vagues ; vous voyez des bois et des vergers, le grain mûr des champs, les prairies qui dévalent jusqu'à la rivière. Vous me voyez debout à côté de vous ; vous entendez ma voix. Mais je vous dis, moi, que toutes ces choses - oui, depuis l'étoile qui vient de s'allumer au ciel, jusqu'au sol que nous éprouvons du pied -, je vous dis que tout cela n'est que du rêve et des ombres, les ombres mêmes qui nous voilent le monde réel. Il y a un monde réel ; mais il est sous cet éclat et sous ces visions, [...] derrière tout cela comme si un voile nous le cachait. Je ne sais si jamais un être humain a soulevé ce voile ; mais je sais que cette nuit, et devant vous et moi, Clarke, il le sera pour d'autres yeux. Peut-être trouverez-vous tout ceci étrange, insensé même : étrange, soit, mais réel ; et les anciens savaient ce que c'est que "lever le voile". Ils appelaient cela voir le dieu Pan. "
Pour que le voile se déchire devant le " grand Pan ", le Dr Raymond va user du scalpel et rien moins qu'inciser le cerveau de Mary, sa protégée. Cette opération chirurgicale renvoie-t-elle seulement à l'une de ces spectaculaires expériences dont raffola le XIXe siècle, à la fois scientiste et spirite ? Ou bien s'agit-il de convoquer quelque chose de plus archaïque et autrement plus redoutable - de questionner notre capacité à soutenir le regard de la divinité ? C'est de toute façon l'effroi qui est au rendez-vous : au drame de la jeune Mary va succéder une longue série d'événements aussi troublants que terribles.
Ce court roman d'Arthur Machen (1863-1947), qui compte parmi les plus célèbres de la littérature fantastique, est réédité dans la traduction qu'en donna le poète Paul-Jean Toulet (1867-1920) en 1901. Avec une préface d'Anne-Sophie Yoo qui en souligne les profondeurs spéculaires, et une couverture originale signée Philippe Druillet.
Cela faisait quelques temps que je voulais lire ce roman cité parmi les grands classiques du genre. Et c'est en lisant l'un des derniers romans de Stephen King, qui y faisait référence, que je me suis enfin décidé à me le procurer.
L'ouvrage s'ouvre avec une préface d'Anne-Sophie Yoo. On ressent toute la passion et l'émotion qu'elle a pu éprouver en lisant ce roman et en analysant la vie de l'auteur. Elle trouve les mots justes pour nous toucher et nous donner encore plus envie de le commencer.
Puis vinrent les premiers mots et mon excitation se décupla ; enfin je pouvais lire le chef d'oeuvre d'Arthur Machen ! C'est au travers de dialogues entre plusieurs hommes de la haute société que l'on découvre cette terrible et mystérieuse histoire du Grand dieu Pan. Et c'est durant le premier de ces dialogues que se déroule l'opération chirurgicale qui permet à Mary de voir quelque chose que personne habituellement ne peut voir ... ou ne devrait voir.
Les années passent depuis cette étrange opération et d'étranges morts surviennent dans le club très fermé des hommes riches londoniens. Heureusement, certains d'entre eux enquêtent. Mais la vérité est difficile à comprendre même si tout ramène à une seule personne.
Des rues plongées dans la pénombre. Une angoisse omniprésente. Arthur Machen, dans une superbe traduction, crée une atmosphère dérangeante, très sombre, qui rappelle les meilleurs romans gothiques de l'époque. Je suis très heureux d'avoir trouvé cette ré-édition de 2015.