Le Thème.
Le pouvoir des Mots.
Une Citation.
La vieille dit que c’est toute la beauté du véritable intellectuel : il n’a pas besoin de se vouloir révolutionnaire pour l’être. Il n’a pas besoin d’aimer ni même de connaître le peuple pour le servir. Il est naturellement, nécessairement communiste.
L’histoire en quelques mots.
Roland Barthes, grand sémiologue, a un accident avec une camionnette à la sortie de son déjeuner avec un François Mitterand en passe de remporter les prochaines élections. Accident ou assassinat ? Le Commissaire Bayard et le maître de conférence linguiste Simon Herzog enquête dans le milieu intellectuel des années 1970-80.
Ce que j’en ai pensé.
Ayant déjà lu HHhH du même auteur, j’ai grandement apprécié de retrouver le style de Laurent Binet, la qualité de son écriture fluide, enthousiaste, drôle, parfois sarcastique mais toujours intelligente. J’ai parfaitement ressenti sa frénésie, sa culture et le produit de recherches que l’on sent passionnées. Il vous embarque avec lui et certaines pages se tournent sans que vous ne vous en rendiez compte. Laurent Binet donne sacrément envie de le voir travailler à un livre, d’en discuter avec lui, de le rencontrer. Il est généreux en informations et en idées. Un vrai plaisir.
Dans ce nouveau livre, vous serez peut-être saisi par des moments de flottements, croulerez sous des montagnes d’allusions où vous sentez qu’un signe imperceptible vient de vous être envoyé, et pourtant vous n’arrivez pas à saisir toute la subtilité par manque de quelque chose : de culture, de lecture, d’intérêt pour la sémiologie, d’années au compteur, de mémoire des personnes mentionnées soit de confrontation au réel. Certains noms me parlent trop vaguement, d’autres non. Vous lisez et relisez les passages, parfois ça passe mieux. Parfois, non. Cela dit, ce qui me rassure tout au long, c’est que je suis accompagnée par le flic Bayard qui ne comprend pas plus de trucs que moi et son acolyte Herzog qui vulgarise certaines notions. Cette dimension humaine et cette mise en scène comique détend un peu cette lecture riche. Par contre, il y a certains passages où l’italien non traduit s’enchaîne et bien que certains mots puissent être compris, la densité est telle que le rythme est cassé.
Un jeu entre réalité et fiction qui fait sourire, qui intrigue avec des personnages que l’on découvre, d’autres que l’on apprend à connaître tout en se posant la question sur la part de vrai et de faux.
Des souvenirs de rediffusion agréables à lire comme la confrontation Balavoine/Miterrand à la télé où l’Artiste s’insurge du temps de parole accordé. Mention qui m’a amené à visionner une nouvelle fois cet extrait et qui nous fait réaliser qu’il y a des problématiques similaires, que le pouvoir des mots est toujours là dans le camp du pouvoir et peu utilisé avec l’intention d’être bienveillant avec son prochain…
Parce que parlons-en, ce livre aborde la disparition d’un document de la plus haute importance. Ce dernier aborderait la septième fonction du langage qui permettrait à celui qui en prend connaissance et acquiert la maîtrise, de prendre le contrôle de son interlocuteur. Et par extension, de tout le monde… Ainsi, Intellectuels et Politiques s’affrontent. Les uns pour la Beauté et la Maîtrise du Verbe. Les autres pour asseoir leur Domination, leur Pouvoir sur autrui.
Et au milieu d’eux, Nous, Lecteurs devenus les marionnettes de Laurent Binet qui a l’air de bien s’amuser à nous balader, à nous titiller, nous faire questionner sur des tas de sujets. Un livre fort intéressant auquel il faut s’accrocher et qu’il faudra peut-être relire plus tard…