Le village de King's Abbot est sous le coup de l'émotion après la mort soudaine de Mrs Ferrars, probablement empoisonnée, victime d'un maître-chanteur, dont seul son ami et voisin Roger Ackroyd avait connaissance de l'existence. Mais peu après avoir eu vent de son identité, lui aussi est retrouvé mort, dans son fauteuil, près de la cheminée, alors qu'il s'était enfermé à double tour dans son bureau. Le docteur Sheppard, également le médecin du village, est témoin des événements qu'il relate dans ce roman particulièrement bien troussé ! Car Sheppard va également faire la rencontre de sa vie, en la personne de son nouveau voisin, un petit belge comique, qui maltraite son potager et expédie ses citrouilles de mécontentement, manquant assommer notre narrateur. L’incomparable Hercule Poirot entre alors en scène... Soucieuse de rendre justice à son oncle, Flora Ackroyd supplie le détective, pourtant à la retraite, de démasquer la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Amen. Et il aura fort à faire concernant l'entourage du riche et exigeant Ackroyd. Tous sont vraisemblablement coupables de mensonges, petits et gros, qui nuieraient à la résolution de l'enquête. Il enjoint donc famille, amis ou domestiques d'aller à confesse, notre ami Poirot est tout ouïe. Cette lecture vaut franchement le détour, rien que pour son suspense, sa construction et sa fameuse pirouette. Le scénario ici est habile et inventif, clairement en avance sur son temps, il réinvente les codes et bouscule les traditions... c'est du grand art ! Et puis c'est drôle, raconté avec une pointe d'ironie, dont l'apparition épique de Hercule Poirot ! Notre jeune retraité, qui se languit de son ami Hastings, parti en Argentine, est en mal d'ami et va élire Sheppard comme étant son nouveau confident. La sœur de celui-ci, Caroline, mettra également son grain de sel, avec ses bavardages incessants et son goût prononcé pour les commérages, elle sera d'une aide précieuse pour la conduite de l'enquête, et séduira Hercule autrement que par sa confiture de nèfle. ;-) Une lecture indispensable. Chapeau, Dame Agatha !
Le Masque, coll. Masque Christie / mars 2007 ♦ Traduction entièrement révisée par Françoise Jamoul (The Murder of Roger Ackroyd, 1926)