Mélasse de la poésie et pauvreté intérieure, par Alain Gagnon…

Par Chatquilouche @chatquilouche

Mélasse de la poésie et pauvreté intérieure, par Alain Gagnon...

Notes de lecture...

Ces lignes de Léopol Morin, musicien et musicologue, décrivent avec pertinence un des défauts majeurs de notre littérature québécoise - poésie surtout - qui souvent se vautre et se perd dans les Causes et la mélasse des bons sentiments, depuis plusieurs décennies.
Comme si la sincérité pouvait excuser le manque de génie ! Ce serait trop commode ! Quelles bêtises, quelles pauvretés et quelles misères n'a-t-on pas excusées au nom de la sincérité ! [...] Ne croyez-vous pas comme moi que les artistes au cœur trop gros, au cœur toujours ouvert et en ébullition, ont fait prime trop longtemps ? (Léopol Morin, , vol. 1.)

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Si nous croyons être nés de la volonté divine, avoir honte d'exister n'est-il pas le pire des blasphèmes ?
Nous pouvons avoir honte de certains comportements ou de certaines attitudes, mais de notre humanité même ? Jamais ! Nous sommes entrés dans ce monde sans préavis ni consultation... À ma connaissance limitée.

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Nous sommes la civilisation de la pauvreté. De la pauvreté intérieure. On a vidé notre monde intérieur de toute référence au sacré. Nous demandons donc à tous et à tout de nous divertir, de nous distraire, de réduire au silence les échos harcelants de nos vides intimes. Du réveil au coucher, nous faisons appel aux bruits, aux néons, aux gadgets, aux communications à l'aveugle, aux agitations politiques et morales... Aucune quiétude ne doit permettre au Soi de manifester ses exigences.
Activisme et agitation. À tout prix ! L'inactivité est un fardeau, une torture où triomphe l'angoisse. Les centres-villes et ses soleils, dorés ou noirs, qui courent et ardent sur deux tours d'horloge, sont les refuges vains, mais recherchés par tous ceux qui se fuient.
Et on se déplace, chevauchant les fuseaux horaires, pour toujours se retrouver face à soi qu'on étouffe, et qui exige de naître.

Auteur prolifique, Alain Gagnon a remporté à deux reprises le Prix fiction roman du Salon du Livre du Saguenay-Lac-Saint-Jean pour Sud (Pleine Lune, 1996) et Thomas K(Pleine Lune, 1998). Quatre de ses ouvrages en prose sont ensuite parus chez Triptyque : Lélie ou la vie horizontale(2003), Jakob, fils de Jakob(2004),Le truc de l'oncle Henry (2006) et Les Dames de l'Estuaire (2013). Il a reçu à quatre reprises le Prix poésie du même salon pour Ces oiseaux de mémoire(Le Loup de Gouttière, 2003), L'espace de la musique (Triptyque, 2005), Les versets du pluriel(Triptyque, 2008) et Chants d'août(Triptyque, 2011). En octobre 2011, on lui décernera le Prix littéraire Intérêt général pour son essai, Propos pour Jacob(La Grenouille Bleue, 2010). Il a aussi publié quelques ouvrages du genre fantastique, dont Kassauan, Chronique d'Euxémie et Cornes (Éd. du CRAM), et Le bal des dieux (Marcel Broquet) ; récemment il publiait un essai, Fantômes d'étoiles, chez ce même éditeur . On compte également plusieurs parutions chez Lanctôt Éditeur (Michel Brûlé), Pierre Tisseyre et JCL. De novembre 2008 à décembre 2009, il a joué le rôle d'éditeur associé à la Grenouille bleue. Il gère aujourd'hui un blogue qui est devenu un véritable magazine littéraire : Le Chat Qui Louche 1 et 2 ( https://maykan.wordpress.com/).