Muets ou diserts, instantanés ou développés en plusieurs planches, les portraits que dresse Will Eisner dans New York Trilogie révèlent toute la finesse et l'intelligence de ce grand maître de la bande dessinée contemporaine. Dans ce troisième et dernier tome de sa trilogie consacrée à New York, Will Eisner pose un regard compatissant sur les visages anonymes qui peuplent les grandes métropoles; ces "gens invisibles" avec qui nous partageons, au mieux, un sentiment de totale indifférence. Réunis autour d'une narration subtile, ironique et passionnée, les trois récits qui composent ce roman graphique donnent un nom, une personnalité et une vie à ces inconnus qui peuplent notre quotidien.
Avis
J'ai découvert le coup de crayon de Will Eisner lors du Challenge New York pour lequel j'avais emprunté à la biblio le tome 2 : L'immeuble du triptyque New York. Cette fois c'est le tome 3 que je découvre (faute d'avoir trouvé le tome 1) et il s'agit cette fois des gens, trois personnes en particulier que la société va "manger". Pincus est repasseur, il a passé sa vie à tenter de passer inaperçu à tel point qu'un jour il trouve dans le journal sa nécrologie, il est mort et malheureusement pour lui il sera très vite remplacé et oublié.
Puis vient l'histoire de Morris, il ressent depuis longtemps ce besoin d'accomplir une chose importante, le souci c'est qu'il ignore ce que c'est, il enchaîne les petits boulots jusqu'à sa rencontre avec une voyante avec qui il mettre sur pied une petite arnaque mais au bout de quelques années sa morale prend le dessus, quitte tout et finit dans la rue avant de mettre à profit un soit disant don de guérison, malheureusement pour lui aussi la société n'accepte as l'échec, s'il ne sait pas trouver sa place autant qu'il disparaisse.
Enfin c'est l'histoire d'Hilda que l'auteur nous conte, bibliothécaire de 40 ans, vieille fille qui s'est occupé de son père malade jusqu'au bout, maintenant qu'il n'est plus là il est temps qu'elle pense à elle et finira par trouver l'amour en la personne d'un vieux garçon qui prend soin de sa vieille mère possessive. La pauvre Hilda n'aura pas de chance.
Ces trois personnages auront un destin tragique.
Le drame ponctue donc ces trois "fables" et avec force ironie l'auteur met en scène ces trois bougres que la vie n'épargne pas. Leur sort ne nous attriste pas au contraire on en rit (ce n'est pas très gentil de rire du malheur d'autrui) mais la réalité est telle que ce genre de situation ne nous étonnerait guère. Le dessin en noir et blanc apporte de nombreux détails aux scènes, les sentiments des personnages sont clairement identifiables sur leur visage et les décors sont parfois suggérés de quelques traits. Le tout me fait penser au cinéma muet dans lequel la parole n'est souvent pas nécessaire, ici les dessins suggèrent l'histoire à eux-seuls.