Aujourd’hui, c’est un avis au sujet d’un livre que j’ai lu il y a déjà quelque temps que je tiens à vous livrer ici. Ce livre, c’est Burn-Out, écrit à quatre mains par Mehdi Meklat et Badroudine Saïd Abdallah, publié aux éditions du Seuil en septembre 2015. Ce qui m’a tout d’abord interpellée, c’est le titre. Ces dernières années, nous avons tous à un moment donné entendu parler de ce qu’était le burn-out (syndrome d’épuisement professionnel) et à quel point cette question de santé publique marquait considérablement la société contemporaine. Ici, à travers l’histoire qui nous est racontée, l’expression prend tout son sens…
L’intrigue de ce roman est construite à partir d’un fait réel : celui d’un demandeur d’emploi âgé d’une quarantaine d’années qui s’immole par le feu devant l’agence Pôle Emploi de Nantes en février 2013. Quelles sont les raisons qui ont pu conduire un homme à commettre un tel acte de désespoir ? Qui était-il, quels étaient sa vie, son quotidien, son histoire, son passé ? Qu’attendait-il, quels étaient ses rêves, ses espoirs, ses réussites, ses défaites ? C’est ce qu’ont voulu s’imaginer les auteurs de ce roman : tenter de mettre des mots sur l’indicible, tenter de comprendre pour admettre ce qui l’est pourtant si difficilement.
Tout part d’une dépêche annonçant sobrement le fait divers du jour… Et à partir de là, les auteurs tentent d’inventer l’histoire d’un homme au bord du gouffre. Interviennent alors plusieurs voix, issues de son entourage, de gens qui ont un jour croisé son chemin, qui nous décrivent qui était cet homme, originaire d’Algérie, venu en France pour rejoindre une femme rencontrée sur Internet. Un homme qui n’aspirait qu’à une seule chose, travailler, s’intégrer, tout en ayant construit son foyer. Face à la réalité d’une société française qu’il semblait idéaliser, il a renoncé à ses rêves, comme celui d’être clown, et fait face à une terrassante réalité, qu’il ne mesurait probablement pas de l’autre côté de la Méditerranée.
Par le biais de ce roman choral et de ce fait divers, les auteurs dépeignent une société contemporaine en mal d’emploi, en mal de rêves et d’idéaux. Le quotidien et l’histoire de cet homme en tant que victime de la société contemporaine est frappant de réalisme, bien que le fond de l’histoire ait été au final en grande partie imaginé par les auteurs. Le style est percutant, tout aussi percutant que peut l’être la vie d’aujourd’hui pour quiconque se retrouve en proie au chômage et à ce qui s’y associe.
Sont aussi mises en avant les limites d’une institution censée venir en aide aux hommes et aux femmes en quête (presque désespérée) d’un emploi. Le ton employé par les auteurs sert complètement la difficile thématique de cette histoire. Il est parfois tranchant, sec, à l’image de ce que peut-être la réalité d’une vie marquée par le chômage et la misère.
Et pris dans les rouages de tout cela, un homme arrivé au bout de ses limites, au bout de ce qu’il pouvait supporter, quand arrive une lettre lui annonçant la nécessité de rembourser un trop-perçu. Un homme dont le sens du devoir et de la vérité n’étaient plus à démontrer. La goutte de trop dans une vie déjà galère.
Face à ce premier roman de deux auteurs âgés seulement d’une vingtaine d’années, il est impossible de rester indifférent. L’existence d’un tel livre m’est apparu presque comme une nécessité…