3 heures du matin. Assis dans un fauteuil sous le rond de lumière d’un abat-jour, un homme de 50 ans donne le biberon à son nourrisson de 3 mois. Entre eux : un demi-siècle et 96 kilos de différence.
D’un côté un homme mûr, encore tout étourdi de cette paternité tardive. Revigoré par cette vie naissante, mais mesurant combien la sienne sera balisée désormais, et projeté brutalement dans un avenir lointain : il aura 80 ans quand cet enfant en aura 30. Confiant dans l’espoir qu’incarne ce petit être, mais terrifié aussi à l’idée de le jeter dans le bain d’un monde angoissant. Perplexe devant cette posture de papa poule, lui qui, encore célibataire quelques mois plus tôt, biberonnait à sa façon dans le monde de la nuit. Fier de cet enracinement patriarcal mais triste à l’idée de renoncer en grande partie, par cette sédentarisation même, aux voyages, à l’imprévu, à l’aventure.
De l’autre, minuscule dans les bras de son père, un bébé qui a la vie devant lui ; qui tète goulûment entre deux endormissements ; qui gigote dans son body, gazouille et grogne, comme enivré, d’autant plus assoiffé de vie qu’il est né « en état de mort apparente » et a été « récupéré à M7 » – c’est-à-dire après 7 minutes de massages cardiaques.
Avis
Que vais-je bien pouvoir vous dire sur ce livre dont le titre ne reflète pas du tout son contenu bien plus subtil. Ce petit ouvrage ne raconte pas, comme je l'imaginais, les aventures d'un jeune papa face au grand évènement qu'est la venu d'un enfant et le changement du quotidien qui l'accompagne; mais plutôt l'histoire tendre d'un papa qui se remémore la venue difficile de son fils et lui prodigue quelques conseils pour aborder la vie, le tout entre 3h03 et 4h11 du matin le temps d'un biberon et de changer une couche, entre état de veille et endormissement. Un tête à tête entre un père qui n'en est pas à son premier enfant et un bébé tout neuf, un petit champion qui s'est battu contre la mort.
Un récit émouvant sur les sentiments d'un père, sur ses émotions lorsqu'il porte son enfant et l'incroyable tendresse face aux mouvements du bébé, c'est avec humour parfois que l'auteur décrit certains évènements:
Dans ma main qui te soutient, je viens de ressentir non pas un rot, hélas, mais la légère vibration d'une digestion précipitée. Soudaine, libératoire. Tu en gazouilles d'aise et tes babils, comme tes cheveux, chatouillent mon oreille. Quant à moi, je suis bon pour te changer avant de te recoucher. Mais de l'imperceptible séisme qui vient de secouer ta tuyauterie interne, je souris à mon tour. Absorption, digestion, évacuation, tel est ton fonctionnement, simple et attendrissant. Un vrai moteur à explosion.
La fin de l'ouvrage, l'épilogue, est assez surprenant, je ne m'attendais pas à une fin digne d'un bon roman à suspense, quant au contenu il est juste assez poétique et tendre pour apprécier le moment d'un biberon à 3h du matin.
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