Merci à Babelio et aux Editions Belfond !J'ai un problème avec les Masses Critiques de Babelio. Ou alors, appelons ça plutôt une sorte de poisse engendrée par ma maladie chronique du "je clique sur tout ce qui bouge". Pour faire court, j'essaye toujours de me limiter à un ou deux ouvrages que je veux vraiment, c'est-à-dire que j’achèterai sans hésiter si je n'étais pas sélectionnée, MAIS je décide toujours, au dernier moment, de choisir d'autres bouquins juste sur la base de "oh mais ça peut sympa ce machin-là". Et, je vous le donne en mille, c'est toujours celui que je reçois. Rien de bien grave, j'en conviens mais mon instinct littéraire me trompe plutôt rarement et ce sont donc souvent des ouvrages qui ne me font pas vraiment envie et qui, au final, ne me plaisent pas. Et ce fut hélas le cas pour ce pauvre petit livre, fort joli au demeurant.
Une fois n'est pas coutume, je vous colle tel quel le résumé proposé par l'éditeur en quatrième de couv pour que vous compreniez bien ce qu'on nous vend.
En 1858, la Comtesse de Ségur présente Les Petites Filles modèles comme la suite des Malheurs de Sophie, et ces deux livres figurent depuis lors au cœur du répertoire classique de la littérature française pour la jeunesse. Portraits d'enfants bien nés saisis au moment où ils s'interrogent sur le bien et le mal, tableaux d'un milieu social où ne cesse de se poser la question des normes et des limites, les petites filles doivent y être " modèles " en vertu d'un idéal de comportement. Mais l'atteindre n'est pas si simple ! Et l'on a amplement pointé, au-delà des récits en apparence innocents et inoffensifs de la Comtesse de Ségur, les bourgeons de l'ambiguïté. Dans son remake, Romain Slocombe les fait éclore : ses petites filles modèles deviennent les héroïnes d'un conte inquiétant et pervers, érotique et vampirique. Comme si la comtesse de Ségur avait retiré la sourdine pour écrire un roman destiné à des enfants plus âgés, laissant libre cours à la progression de la cruauté. Comme si elle avait quelquefois rêvé d'être Sade, non plus Comtesse mais Marquise...La collection Remake de Belfond a pour vocation de reprendre des œuvres bien implantées dans l'imaginaire et la culture collective pour les retravailler sous le regard d'un ou plusieurs auteurs (j'ai lu les Contes de Perrault, plusieurs nouvelles de différents auteurs dans cette même collection et c'était brillant !) et ici, Romain Slocombe s'attaque à un autre genre de monument : La Comtesse de Ségur. Il faut savoir que j'entretiens avec la dame une relation assez ambivalente (comme ma mère avant moi d'ailleurs), je me souviens avoir adoré, étant enfant, les péripéties et les malheurs de cette pauvre Sophie qui avait l'air de s'emmerder fortement et qui n'avait de cesse de faire le plus de bêtises réalisables en une vie pour passer le temps (il n'est pas impossible que je me sois identifiée pas mal...). Puis, en grandissant et au fil de mes relectures, j'ai commencé à noter et à comprendre de plus en plus de choses comme ce discours religieux et moralisateur dominant ou les horreurs commises par les enfants sur les animaux (il y a quand même un épisode où, Sophie s'emmerdant encore plus que d'habitude, décide de couper son poisson rouge en petits morceaux, sans doute pour préparer une sole meunière, je ne sais plus)(grand trauma). J'ai donc commencé à détester cordialement ces petites filles prétendument modèles qui me présentaient un idéal à suivre totalement à côté de la plaque (j'ai pleuré quand mon poisson rouge est mort, moi !). C'est pourquoi j'étais plus que ravie de découvrir tout de même ce petit roman où ces demoiselles allaient enfin en prendre pour leur grade (parce qu'une fessée de temps en temps, lorsqu'on mérite presque l'asile, ça me parait léger). Mais quelle déception ! Si l'auteur suit parfaitement le schéma mis en place par la Comtesse (je visualise Lady Gaga maintenant, merci American Horror Story), l'histoire prend rapidement un aspect inquiétant, plus proche du roman gothique classique que du roman initiatique au sadisme à peine caché qu'est l'oeuvre originale. Et notre réécriture tourne alors bien vite au grand guignol où l'érotisme lesbien se mêle au vampirisme sans que le côté sulfureux promis en quatrième de couverture (lorsqu'on se compare à Sade, il faut mettre le paquet !) soit remplacé par de nombreuses allusions sensuelles et sexuelles que l'on retrouve régulièrement dans les nouveaux romans érotiques (tout le monde rougit, s'embrase et a la culotte qui chatouille dès que les regards se croisent, c'est compréhensible au début mais devient bien vite risible) et par, finalement, de biens chastes caresses au cours d'une bucolique promenade. Selon moi et selon les souvenirs que j'ai de l'oeuvre originale, la cruauté et le sadisme y étaient beaucoup plus présents, quoique plus sournois que dans ce "remake" qui se veut pourtant violent et dérangeant. C'est vraiment dommage. Toutefois, sans être franchement une réussite, ce roman a eu le mérite de bien me faire rire. Nous suivons l'intrigue à travers les yeux de Marguerite, que l'on peut aisément surnommé "Mademoiselle Cruche de service" (sans doute la faute à son éducation, pauvre mémère) et il n'est pas peu dire que la demoiselle n'est pas douée et a un côté "religieux", fanatique tellement poussé qu'elle en est irrémédiablement ridicule. L'écriture et le style sont plutôt agréables à lire, on y retrouve ce qui est devenu la signature de La Comtesse de Ségur, les dialogues précédés du nom du personnage et les tournures de phrases très ampoulées. Le roman est plein d'érudition, comme si on avait cherché à nous montrer les multiples connaissances à avoir autour du roman gothique et/ou érotique, c'est savant mais au bout de la troisième liste, ça devient rébarbatif et j'ai sauté allègrement quelques passages (si je veux lire une bibliographie, je n'ouvre pas un roman...).
2/5
Broco est perplexe et
Broco a pas compris...
Pour finir, parce que je me rends bien compte que j'ai été beaucoup trop bavarde, c'est un roman qui se lit facilement et rapidement mais qui n'apporte pas grand-chose à l'oeuvre originale (d'ailleurs, je pense qu'il vaut mieux la connaître plutôt bien pour comprendre les enjeux de ce texte), l'auteur aurait pu aller beaucoup plus loin dans la perversité des demoiselles et dames qui peuplent l'univers de Ségur, cela reste ici trop superficiel et finalement, mou et long. Bonus !
J'ai trouvé cette petite bd de 1982 librement inspirée du même roman, à grande vocation érotique (éloignez-vous si vous n'êtes pas majeur !) durant mes recherches pour cet article et ça m'a bien fait rire, je me devais de vous la partager. Voilà donc l'oeuvre de Georges Levis aux éditions Dominique Leroy (j'ai l'impression que ces messieurs sont pas mal émoustillés par ce genre d'histoire...). Vous pouvez retrouver plus de détails sur le site de BDGestNous sommes loin de Martine qui montre sa culotte en faisant de la balançoire, non ? Et admirez les petits regards pervers des deux demoiselles en deuxième plan, ça fait franchement froid dans le dos !
Les histoires de fessées prennent aussi une toute autre dimension. L'innocente que je suis n'avait aucune idée de tout le matériel érotique et pornographique qui s'était créé autour des Petites Filles Modèles, la pieuse Comtesse de Ségur doit se retourner dans sa tombe, la pauvre... (ou alors, elle se marre bien la coquine !)(pardon).