"Meurtres pour Rédemption" de Karine Giebel

Par Valentine Pumpkins @valpumpkins
Pocket - mars 20129782266180740


Bon bon bon bon bon.
Pas facile à écrire cette chronique. Il faut dire que Karine Giebel ne nous facile pas les choses. Vous vous souvenez de la lecture éprouvante mais génialissime qu'a été Purgatoire des Innocents ? Eh bien, là, ce fut pire. Différent peut-être mais pire, c'est certain. Mazette. J'ai fini ce livre il y a déjà une bonne dizaine de jours mais on peut dire qu'il est maintenant gravé au fer rouge dans ma petite tête. Je vais tenter de vous expliquer tout ça après le petit résumé qui fait bien :
Marianne est en prison, condamnée à perpétuité, et franchement, on ne peut pas dire qu'elle ne le mérite pas, elle a tué, beaucoup, à plusieurs reprises. C'est une toute jeune fille, petite et menue, mais aussi une boule de nerf, belliqueuse, une experte en karaté qui peut aisément tuer un homme qui la regarde de travers juste à l'aide de son petit doigt. La vie est longue en prison et les colocataires pas toujours franchement sympathiques, qu'ils soient du mauvais côté des barreaux ou non. Mais que donnerait vraiment la demoiselle pour sortir de là ?
Meurtres Pour Rédemption est un gros pavé de quasiment mille pages qui se dévore sans relâche, sans pause, en pliant la tête sous les coups que reçoit Marianne, ceux qu'elle donne et ceux que l'auteure nous assène constamment. Son personnage de meurtrière n'est pas forcement sympathique sur le papier, mais à lire, c'est une toute autre histoire. Marianne attire tout comme elle repousse son lecteur et les autres personnages qui l'entourent. C'est sans doute dur à comprendre sans avoir lu l'ouvrage mais je me suis quasiment instantanément attachée à la jeune fille et si on ne comprend pas toujours toutes ses réactions (un bon petit stage de gestion de la colère et on en parle plus !), elle parait si forte mais cache très bien quantité de faiblesses que nous sommes presque les seuls à découvrir. On en vient donc rapidement à VIVRE vraiment ce livre, à trembler en même temps qu'elle, pour qu'elle s'en sorte, pour qu'elle arrête de se prendre des raclées monumentales, pour qu'elle soit préservée de tout ce qui la transforme en monstre assoiffé de sang, pour qu'elle soit enfin aimée...
C'est un livre dur, poignant mais aussi très triste. Parce que la vie en prison décrite par Giebel est bien loin de celle montrée dans la série Orange Is The New Black, tous les personnages ont un morceau de tortionnaire et de bourreau en eux et devant cette avalanche, parfois, il a vraiment été difficile de continuer ma lecture. Je ne pense pas être une petite nature (même si j'ai peur des abeilles et que j'ai le vertige debout sur une chaise) mais les accumulations scènes de violence psychologiques ou physiques décrites dans ce roman finissent par vraiment creuser leur chemin vers le côté le plus sensible de votre petit cœur de beurre... Néanmoins, c'est un livre qu'on ne PEUT pas abandonner, on ne peut pas laisser Marianne, on ne peut pas laisser Daniel, Justine, Emma et les autres, on ne peut pas arrêter d’espérer que tout se termine bien pour tout le monde (sauf "les méchants", pourvu qu'ils meurent dans d'atroces souffrances), c'est un livre qui nous fait ressentir des émotions que je n'aurais jamais pensé avoir pour des personnes pareilles et c'est là le talent de Karine Giebel, arriver à nous faire éprouver de l'empathie pour des personnages qui ne le méritent pas vraiment au premier abord (et au deuxième et au troisième abord aussi d'ailleurs...).
J'ai fini ce roman dans un état de stress pas possible, en rage contre l'auteure, contre Marianne, contre Daniel, contre la prison et l'état Français qui y est décrit et je suis sûre de ne pas l'oublier de sitôt. Je pensais avoir été secouée par Purgatoire des Innocents, ce n'était rien du tout comparé à celui-ci. Soyons honnête, il y a tout de même quelques longueurs, quelques répétitions et un certain ras le bol qui naît à la énième scène de viol (j'aime à penser que tous les hommes ne sont pas des porcs incapables de penser et de se retenir devant une jolie fille abîmée par la vie) mais j'ai eu l'impression que cette lassitude nous aide à partager l'état d'esprit de Marianne, déjà tellement fatiguée par la vie à seulement 21 ans et nous accompagne, impassiblement, à ses côtés, vers la fin...

5/5


Plus qu'un coup de cœur, c'est un véritable coup au cœur (on ne se moque pas de ma formule ! ^^) que j'ai eu pour ce roman et me trouve maintenant dans une sorte d'impasse : j'ai envie d'en lire un autre de cette vilaine auteure mais je ne sais pas vers lequel me tourner, deux coups de cœur et une (grosse) déception Un auteur me fait rarement ce coup-là, c'est étrange.