Yumiko Igarashi, dessinatrice de Candy, de Georgie et bien d’autres était l’invitée d’honneur du Japan Tours Festival, dont c’était la seconde édition cette année. Elle assurait une master class, au cours de laquelle elle dessinait devant un public plutôt restreint (une trentaine de personnes).
L’arrivée de Candy en France nous fait remonter aux origines de l’animation japonaise en Europe. A l’exception du passage encore discret du Roi Leo et de Princess Saphir, les dessins animés et auteurs japonais étaient encore méconnus en France. L’arrivée de Goldorak en 1978 déchaînera les passions, enthousiasmant les enfants, révoltant parfois les parents et les associations qui partirent alors en campagne contre l’animation japonaise (campagne qui finit par réussir partiellement, je vous donne un indice en vous faisant remarquer le peu d’animations japonaises diffusée sur la chaîne Manga censée être spécialisée).
Une autre série japonaise, un shojo, plutôt destinée aux jeunes filles, fut diffusée peu après Goldorak. Elle fut bien moins critiquée, ne faisant pas la part belle aux combats et à la violence, mais plutôt au drame et à la romance. L’histoire se passait en occident, la série ne fut donc pas identifiée comme une « connerie japonaise pour attardés » (enfin pas tout de suite). Goldorak et Candy furent donc parmi les monuments de l’animation en France à la fin des années 70 et pendant les années 80, et une partie des années 90.
L’animateur David Minh Trah (également conférencier sur le festival pour parler de ses nombreux voyages au Japon), était chargé de mettre l’ambiance, faire parler le public pendant que l’auteure dessinait. En effet, pour des non-initiés, regarder un auteur dessiner en silence pendant 1 heure voire 1h30, peut devenir ennuyeux. L’artiste a précisé avoir l’habitude de dessiner avec la radio et aimer le bruit. David l’a donc prise au mot et fait gueuler la salle.
Il a ensuite demandé à des personnes du public de chanter le générique de Candy ; deux ou trois personnes s’y sont collées. Gilles Broche, auteur du livre Les Mystérieuses Cités d’Or, les secrets d’une saga mythique, en dédicace lui aussi sur le festival et présent dans le public, a alors fait venir, avec l’accord des organisateurs, la chanteuse des génériques français, Dominique Poulain, invitée elle aussi du salon.
Belle surprise : notre petit groupe a eu droit à un mini concert a cappella et improvisé entre la chanteuse et une poignée de fans devant Yumiko qui dessinait, suivi d’une étreinte entre les deux artistes avant que chacune retourne s’asseoir.
Ensuite est venu le tour des questions du public, toujours pendant qu’elle dessinait. Nous avons donc appris qu’elle était autodidacte, qu’elle encre au pinceau, qu’elle a commencé sa carrière à 17 ans, qu’elle fêtera bientôt ses 50 ans de carrière, que son mangaka préféré est Osamu Tezuka (le dieu du manga, naturellement).
Nous avons également appris que la série Candy n’était pas prête d’être rééditée, pour des problèmes de droits, et que la situation est bloquée dans le monde entier. Ce genre de problème peut arriver lorsque deux auteurs travaillent sur la même série.
Après plusieurs coups de pinceaux à l’aquarelle, Yumiko ayant terminé son illustration, elle fut immédiatement vendue aux enchères dans la salle.
Le très heureux gagnant fut Maroin Eluasti, initiateur et réalisateur du projet d’animation Asterion, lui aussi en dédicace sur le festival. Il remporta cette œuvre unique pour 80 €, ce qui est vraiment un très bon prix et pouvant s’expliquer par ce public composé de nostalgiques et de jeunes fans, probablement sans grands moyens financiers.
Yumiko Igarashi était aussi en dédicace à plusieurs reprises au cours du festival, sur un espace qui lui était dédié, ainsi que sur le stand de l’éditeur Isan Manga, spécialisé dans l’édition de manga rétros, des années 70, 80, tels que Judo-Boy, Kamen Rider, et bien sûr des titres dessinés par Igarashi, comme Madame de Bovary et Roméo et Juliette (tous deux fournis avec le texte original en plus du manga).
Le public fut cette fois un peu trop nombreux pour la contenance du festival, bouchant quelque peu les allées, signe de bonne santé pour une convention.
Le Japan Tours Festival, encore tout récent, s’annonce prometteur aussi bien pour ses invités prestigieux que pour sa bonne ambiance et sa taille « humaine ».
Nous espérons que Candy aura un jour raison des querelles juridiques. En attendant, Georgie, autre série phare de l’auteure, est toujours disponible en manga chez Tomkam et en DVD chez IDP.
Ambroise Crèche