Léo Perutz est un écrivain autrichien de langue allemande né à Prague en 1882. Il quitte la Bohème à l'âge de 17 ans pour Vienne où il étudie les mathématiques et la littérature. Il s'intéresse à la théorie des jeux de hasard et commence par travailler dans une compagnie d'assurances avant d’être appelé au combat pendant la Première Guerre mondiale, au cours de laquelle il est blessé. De retour à Vienne, il publie son premier ouvrage et entreprend de nombreux voyages. Il quitte l'Autriche pour la Palestine en 1938, au moment de l'Anschluss. Léo Perutz meurt en 1957. Le Maître du Jugement dernier est paru en 1923.
Vienne, en 1909. Au cours d’un récital privé de musique de chambre, on découvre le corps sans vie du célèbre acteur Eugen Bischoff. Les circonstances de sa mort sont pour le moins mystérieuses, suicide provoqué ou meurtre maquillé ? Les soupçons se portent très vite sur le baron von Yosh, toujours amoureux de Dina, l’épouse de Bischoff, avec laquelle il eut une courte liaison avant son mariage. Une enquête menée en secret par Waldemar Solgrub, un ingénieur, membre du petit cercle d’intimes comprenant les susnommés ainsi que le docteur Gorki et Félix le frère de Dina, bascule soudain dans le plus grand mystère quand d’autres morts, toutes très troublantes, vont se produire.
Je m’interroge souvent sur cette pratique consistant à catégoriser les livres en romans, polars, thrillers etc. J’en vois très bien le côté pratique et globalement adéquat mais combien de polars m’ont semblé faibles considérés comme tels alors qu’ils étaient de bons romans pour autant. C’est le cas inverse ici, ce roman de Leo Perutz est en fait un excellent thriller !
Je connaissais l’écrivain pour Le Tour du cadran, très bon roman avec une poursuite haletante, ce bouquin-ci est un suspense très prenant, voire envoûtant, car l’énigme du début qu’on pouvait associer à des intrigues genre Le Mystère de la chambre jaune, par exemple, va prendre un tour ésotérique, ce qui ne fait qu’amplifier l’écarquillement des yeux du lecteur pressé d’en connaître l’épilogue. Fin du roman astucieusement négociée par Perutz, puisqu’elle est double et reste ouverte à toutes les interprétations. Du coup, même ceux qui n’aiment pas l’intrusion du surnaturel dans leurs lectures, peuvent opter pour l’autre hypothèse proposée. Malin, le gars !
Si l’intrigue générale est peut-être un peu datée dans son développement, l’écriture est assez moderne et enlevée pour nous faire oublier l’ancienneté de ce très bon roman.