Ned Crabb, né en 1939 à Greensboro, en Alabama, est un journaliste et un écrivain américain de romans policiers. Il fait ses études à l'université de Miami, obtient une licence d'histoire et devient journaliste, au New York Daily News et au Wall Street Journal à New York. Après un premier roman en 1978 (La Bouffe est chouette à Fatchakulla), son second opus, Meurtres à Willow Pond, vient de paraître.
Sur les rives d’un petit lac du Maine, Alicia et Six Godwin, universitaires retraités, coulent une existence paisible, entre la librairie qu’ils ont créée et leur passion commune pour la pêche. Jusqu’au jour où ils sont invités à passer le week-end au Cedar Lodge, luxueuse résidence pour amateurs friqués de pêche et de chasse, que leur richissime cousine, Iphigene Seldon (surnommée Gene), dirige d’une main de fer. Agée de soixante-dix-sept ans et dotée d’un caractère bien trempé, la vieille femme a justement convoqué ce même week-end ses nombreux héritiers pour leur annoncer qu’elle modifie son testament. S’invitant lui aussi mais sans convocation, un monstrueux orage va amplifier l’électricité qui plane dans l’air et ce qui sur les dépliants touristiques ressemblait à un paradis, va se muer en enfer quand on va retrouver le cadavre de Gene… premier des meurtres qui ensanglanteront Willow Pond.
Ned Crabb n’est pas un perdreau de l’année et si cela se ressent dans ses écrits, c’est aussi le principal charme de ce polar biscornu à la narration désuète. Que notre Crabb en pince pour Agatha Christie ce n’est pas un secret, il le fait dire à l’un de ses personnages (« - Oh, bon sang, répondit Six à Gene, on se croirait dans un roman d’Agatha Christie ») pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté. Un lieu clos confortable, une flopée de gens souhaitant la mort de Gene - « Gene était malintentionnée. Elle méritait qu’on la tue. Elle gênait tout le monde. Qui s’affligerait de sa mort ? » - de ses héritiers à leurs conjoints en passant par son comptable véreux, des clients du Lodge qui ne sont pas ceux qu’ils disent être… et un cadavre pour ouvrir le bal. Une paire de retraités (Alicia et Six) qui seconde le shérif dans son enquête, le clin d’œil à la Reine du crime est franchement appuyé. Toutes les références du bouquin, et elles ne manquent pas, nous renvoient à l’époque où le cinéma était en Noir & Blanc, genre « Nick, gentleman détective » (1936, avec William Powell et Myrna Loy, pour ceux qui connaissent…). Pastiche des romans noirs vieillots ou plus certainement, style réel de notre papy du crime ? En tout cas, c’est épatant, vachement chouette, pour rester dans la note.
L’intrigue en elle-même est tirée par les cheveux pour ne pas dire plus, le suspense entretenu par des rebondissements abracadabrants ou des phrases sentant la naphtaline, « Pendant ce temps, à l’intérieur du Lodge, une grande silhouette sortait pieds nus d’une chambre, traversait le couloir et entrait dans une autre chambre. » Mais le lecteur n’en a cure, il se délecte à retrouver cette tonalité d’ouvrages lus dans sa jeunesse empreints d’un humour discret distillé tout du long.
Alors, c’est un vrai régal, devez-vous penser ? Vous me connaissez, je ne suis pas du genre à taire les défauts d’un livre et si celui-ci n’en a qu’un, il est quand même bien réel : il est trop bavard, beaucoup trop ! Des répétitions trop nombreuses, des scènes inutiles ou redondantes ; à mon avis une centaine de pages en trop. Dommage, je l’aurais voulu excellent, il n’est que bien bon, ce dont je saurai me satisfaire.