Viens avec moi

Viens avec moiDans un petit bled dépeuplé du Vermont, Lilian marche les fesses serrées. Depuis que son chum Kevin a levé le camp pour fuir le méchant Blackway, elle a peur. Y'a de quoi! Blackway s'en prend maintenant à elle. Il a pété sa vitre d'auto et tué son chat.

Ayant passée la nuit dans son char, le poing refermé sur son petit couteau de cuisine, Lilian attend l'arrivée du shérif Wingate. Elle veut porter plaine. C'est bien louable, ça, mais sans témoins ni preuves, il ne peut pas l'aider. Le mieux qu'il puisse faire, c'est de lui donner un conseil: suivre l'exemple de Kevin et quitter le coin. Mais Lilian a une tête de cochon et la couenne dure. S'il y a quelqu'un qui doit partir, c'est Blackway, pas elle. Le shérif Wingate lui chuchote d'aller trouver Whizzer et sa bande. Là, y'aura bien quelqu'un pour l'aider.Arrivée dans l'ancienne scierie désaffectée où vit Whizzer, cloué dans son fauteuil roulant, Lilian fait face à une bande de joyeux lurons. Whizzer lui «prête» gentiment deux de ses acolytes: Lester, le vieux boiteux de soixante-dix balais, futé et rusé comme un renard, et Nate, un jeune colosse qui n'a certes pas inventé le bouton à quatre trous, mais qui a l'avantage d'être fort comme un boeuf.Lilian, Lester et Nate iront de lieux glauques en trous paumés, cherchant des informations pour retrouver Blackway. Ils finiront bien par le trouver. Reste à savoir qui sortira vivant de l'inévitable affrontement final.

Viens avec moi

© Michael Cevoli

Viens avec moi a un grand mérite: celui d'être court et de se lire rapidement. Ce qui, à proprement parler, n'est pas bon signe…L'intrigue, qui se déroule en une seule journée, m'a fait bailler par sa trop grande prévisibilité. L'improbable trio va au point A, recueille quelques informations, file au point B, recueille quelques informations, puis se rend au point C… jusqu'à la confrontation finale. Pendant que Lilian, Lester et Nate poursuivent Blackway à vive allure sur les chapeaux de roues, Whizzer et sa bande tuent le temps en tétant leur bière, refaisant le monde et s'interrogeant sur les chances de réussite du trio. Ce choix d'alterner les chapitres pourrait amener un brin d'originalité, mais il détonne ici, et surtout, il casse le rythme de lecture.J'ai trouvé que la principale force du roman tenait dans ses personnages. Sympathiques ou détestables, je m'y suis attachée.Les nombreux dialogues apportent, par leur fougue et leur ironie, de la vigueur au texte. Le style, nerveux et incarné, m'a fait passer outre la minceur de l'intrigue.Dans le coin. Des femmes, des jeunes femmes qui sont plus ou moins intelligentes, bien élevées, honnêtes, capables, fortes. Elles veulent travailler. Partout ailleurs, elles finiraient avec de jeunes types biens et solides, des types comme elles. Mais par ici elles s'entichent de types qui sont tout le contraire, des types qui sont voués à finir en prison, qui passent leur vie à causer des problèmes. Elles finissent avec des types qui sont des emmerdes ambulantes. On voit beaucoup ça. Pourquoi?- Quelque chose dans l'eau, suggéra Coop.- Les hivers sont trop longs, proposa D.B.- Les jeunes portent un après-rasage particulier, dit Coop.- Elles veulent pas rester seules, les filles, dit Whizzer.Les descriptions d'un petit milieu rural sont particulièrement bien senties: les sombres forêts où quatre bûcherons québécois ont disparus, le bar miteux du coin, le motel louche. Le Vermont n'est pas représenté sous son aspect le plus brillant, mais ce n'est pas le but. Les trous paumés poussiéreux ont aussi beaucoup de charme!Au final, un bon p'tit polar divertissant. Mais j'ai tendance à attendre plus de ce que je lis!Viens avec moi est le premier roman de Castle Freeman Jr. traduit en français. Il vient d'être adapté au cinéma par Daniel Alfredson, avec Anthony Hopkins, Ray Liotta et Julia Stiles dans les rôles principaux.Viens avec moi
Viens avec moi, Castle Freeman Jr.,Sonatine, 186 pages, 2016.