Avec cet album Daredevil Redemption nous mettons le cap sur le sud des États-Unis et plus particulièrement l'état de l'Alabama, dans la petite bourgade de Redemption Valley. Un assassinat a été commis, et pas n'importe lequel. C'est le corps d'un jeune garçon qui a été retrouvé et cette macabre découverte a tout de suite enflammé la vindicte populaire. Un coupable a été rapidement identifié; un jeune homme qui se veut sataniste et qui squatte dans une église désaffectée, en compagnie de sa fiancée et du frère légèrement débile de cette dernière. Joel Flood n'a aucune chance de s'en tirer car toutes les apparences sont contre lui. Si son père -l'ancien pasteur du village- est aujourd'hui dans un état catatonique, sa mère elle a eu une idée géniale : se rendre à New York pour solliciter l'aide du meilleur avocat sur le marché, Matt Murdock. Car c'est bien de lui qu'il s'agit. Matt accepte le cas qu'on lui propose car toujours sensible à ces affaires où la jeunesse est malmenée, aiguillé par son sens radar qui lui confirme que Madame Flood ne ment pas, quand elle prétend que son fils n'y est pour rien dans le crime commis. Mais la vie dans le sud des États-Unis n'est pas facile, et si vous êtes légèrement différent, si vous échappez à la norme, il suffit de pas grand-chose pour que la communauté vous rejette et vous stigmatise. Et quand en plus le shérif local n'hésite pas à faire pression sur les témoins pour boucler l'affaire, et qu'on a trouvé le coupable idéal afin d'en finir au plus vite, on réalise que Matt va probablement avoir bien du mal à faire parler ses talents d'avocat et laisser triompher la justice. Cela dit il a un atout dans sa manche, ou pour être exact un costume rouge dans sa valise! En tant que Daredevil peut-être pourra-t-il trouver une piste ou des indices et sauver Joel de la chaise électrique. Avant même d'être un récit classique de super-héros, cet album nous propose une aventure dont le cœur même se situe dans un tribunal. Ce sont d'ailleurs les trois dernières parties qui sont le plus palpitantes. Nous assistons à un véritable combat verbal entre l'accusation et la défense pour sauver ce jeune sataniste, dans les affaires semble très mal engagées. Bien entendu Daredevil fait son apparition en costume, mais dans cette petite bourgade de l'Alabama sa présence se révèle être beaucoup plus problématique que dans les quartiers chauds de New York, et Tête à cornes risque même de saboter le travail de son alter ego civil, en tombant dans le piège diabolique que lui tend le père de la victime. Par ailleurs il s'agit d'un des stratagèmes les plus absurdes mais jouissifs que j'ai pu voir récemment dans un comic book! Rédemption n'est pas du tout une histoire récente, il s'agit d'une mini série en 6 parties publiée originalement chez Marvel en 2005. C'est seulement 10 ans plus tard que Panini nous offre une version française et en général un tel retard se justifie par une piètre qualité du matériel jusque-là mis de côté. Dans le cas présent, fort heureusement, tout le contraire! David Hine a réalisé un travail méticuleux et convaincant, un mécanisme d'horlogerie pervers qui fonctionne à merveille. Il est magnifiquement secondé par Michael Gaydos, l'auteur des dessins de Jessica Jones : Alias que vous avez récemment découvert dans la collection Marvel Select. Son style est parfait lorsqu'il s'agit de mettre en scène une aventure qui emprunte les codes du roman noir, et de plonger tête la première dans une réalité sordide et poisseuse comme celle dans laquelle se retrouvent tous immergés les personnages résidant à Redemption Valley. Les couvertures sont du maître Bill Sienkiwicz, de petits bijoux propres à son style si particulier. C'est donc une excellente surprise, voilà une sortie librairie que j'aime considérer comme indispensable en ce mois d'avril, ceci au moment même où la seconde saison de Daredevil chez Netflix est sur le point de susciter un nouveau tsunami d'enthousiasme chez les fans du justicier aveugle! Je ne saurais que trop vous recommander de donner une chance à ce 100 % Marvel qui est bluffant de qualité et de pertinence, et bénéficie en outre d'un final poignant qui va en bouleverser nombre d'entre vous. De surcroît, Redemption est clairement inspiré de faits réels. Vive la justice. A lire aussi : Jessica Jones (Marvel Select) dessiné par Michael Gaydos