Quelques albums de chez Chouetteditions

Par Loulou Coco

Aujourd’hui, on vous fait voyager loin loin loin, sans pour autant vous demander d’apprendre une langue étrangère. On part au Québec ! Chouetteditions est plutôt jeune sur le marché de l’édition et leur concept est bien sympa. Ils publient autant en numérique qu’en format papier. De plus, toutes (ou presque) les histoires sont éditées en français et en anglais (et certaines en italien, allemand et portugais, il me semble, mais leur site est inaccessible pour le moment, je ne peux pas aller vérifier).

Elle nous a contactées pour nous proposer quelques ouvrages à chroniquer. C’est avec joie que nous avons accepté et c’est également dans la joie que nous vous les présentons désormais !

On commence avec les livres écrits par Dominique Curtiss. Par ordre de parution :

Dis où suis-je né ? illustré par Emilie Fiala (paru début 2014)

Denis est un petit garçon curieux et plein d’imagination. Un matin, ildemande à sa grande sœur où il est né. Cette dernière lui répond qu’il est trop petit pour comprendre. Insatisfait de cette non-réponse, Denis enchaîne en posant sa question à différents membres de sa famille. Cette fois, tout le monde lui répond, mais chacun y va de sa théorie. Un coup on lui répond qu’il est né dans un chou, l’autre fois que c’est une cigogne qui s’en charge. Mais Denis ne sait plus qui croire. D’autant plus que chacune des révélations faite par les adultes, le ramène à ce qu’il entend autour de lui, comme des expressions françaises. Serait-ce donc parce qu’il est né dans un chou que sa maman l’appelle toujours « mon chou » ? Ou est-ce parce qu’il est issu d’un œuf que l’on dit de sa maman que c’est une mère poule ? De quoi faire tourner en bourrique ce pauvre Denis.

L’avis de Loulou :

Le thème du livre m’a tout de suite plu. J’ai vite voulu savoir comment ce thème délicat était traité dans cet album. Et on n’est pas déçu car c’est tout à fait drôle. À travers les diverses excuses que cherchent les adultes pour ne pas répondre clairement à Denis, on découvre donc toutes les phrases que les parents trouvent généralement pour leurs enfants quand la question fatidique est un jour posée. Beaucoup reconnaîtront probablement l’un des prétextes qu’on leur a servi étant petit. Ce qui est le plus sympa c’est que finalement on en découvre d’autres, qui sont issus de diverses cultures !

À la fin du livre, la façon dont Denis découvre où il est né est tout à fait bien trouvée. Et cela « dédramatise » l’évènement, que les parents ne savent (ou n’osent) pas expliquer la plupart du temps. La comparaison avec les mammifères en général est bien trouvée, assez scolaire, mais bien abordée ici. Et l’on finit sur une question encore plus délicate pour les adultes : comment on fait les bébés ?

Avec la reliure un peu serrée, Denis louche…

Cet album est bien tenu. Il est à la fois ludique car on n’aborde pas le sujet de façon clairement documentaire, et drôle car le tout est enrobé dans un déluge d’explications sur des expressions emblématiques françaises. Il est vrai qu’au début je m’attendais à trouver la réponse à la question « comment on fait les bébés ». Mais il faut être juste et c’est vrai que ce n’est pas exactement la question de départ. Finalement ce livre permet aux parents d’aborder en douceur la question avec l’enfant. La question de fin pourra donc être abordée avec plus de simplicité et de décontraction par le parent après la lecture de cet album.

Au niveau des illustrations, les visages sont un peu trop anguleux à mon goût, mais ça c’est personnel. Sinon le tout est agréable. J’ai bien aimé les animaux et les fleurs. Petit coup de cœur pour les perroquets.

L’avis de Coco :

Pour ma part j’ai adoré les albums que l’on a reçus. Je ne suis pas experte en la matière (c’est Loulou la pro des albums) et je suis d’habitude très tatillonne concernant mes lectures d’albums : je marche beaucoup au coup de cœur visuel. Aussi j’avais un peu peur en recevant de la main de Loulou les albums de Chouettedition. Car, hormis le design de Armand le Pélican Gourmand, aucun dessin n’attirait mon œil. Et pourtant, j’ai été réellement « surprise » d’apprécier toute la sélection et plus particulièrement les albums de Dominique Curtiss.

Éducation, poésie, tendresse, et humour sont les mots clés des albums que nous avons reçus. Mais voyons ça en détail, avec le premier album.

La question tant redoutée de tous les parents est ici traitée avec beaucoup d’humour et de délicatesse. Chaque adulte y va de sa petite histoire, reprenant quelques « légendes » populaires d’ici et d’ailleurs sur la conception des enfants. Je dois quand même avouer que même si je ne suis pas fan des dessins, ils s’accordent à merveille avec le côté décalé et loufoque de l’histoire. La typologie aussi joue un rôle important dans la lecture. Certains mots sont ainsi mis en évidence avec une typologie différente pour attirer l’œil des jeunes lecteurs. J’ai trouvé ça très bien car généralement les mots mis en avant participent à des jeux de mots.

En bref, un album qui permettra aux jeunes de 6 ans et plus d’en apprendre davantage sur les choses de la vie sans pour autant dramatiser.

Chicanes au potager, illustré par Marine Benezech (paru au 1er semestre 2015)

Par une belle journée d’été, dans le jardin de Papi, en petite abeille se repose sur un poireau. Celui-ci essaie de se défaire de l’insecte, mais la butineuse ne se laisse pas faire et le pique. Le légume commence donc à râler haut et fort. Mais les autres légumes du potager en ont assez d’entendre le poireau rouspéter sans arrêt. S’ensuit donc un méli-mélo de revendications et de blabla dans le jardin de Papi. D’ailleurs, ce dernier et son petit-fils arrivent pour ramasser quelques légumes afin de les préparer pour le repas. Ce qui provoque encore une fois une conversation sur le choix des légumes qu’ils font. Mais Madame la chouette en a assez de tout ce remue-ménage ! Elle revient de sa nuit de chasse et aimerait se reposer.

L’avis de Loulou :

Cette histoire est pleine d’humour. Les discussions sont à la fois drôles, ludiques et même éducatives. Elles permettent aux enfants d’apprendre quelques anecdotes sur les légumes, notamment à travers des expressions. Quand les deux humains arrivent, la dimension d’apprentissage prend une autre tournure. Le grand-père explique à son petit-fils l’importance de prendre soin de la terre du potager pour éviter de polluer, mais aussi de s’empoissonner. On a donc autant une dimension sérieuse que ludique dans cet album.

Le petit bémol, qui m’a tout de suite sauté aux yeux, est tout de même l’incohérence de trouver tous ces légumes côté à côté dans le même potager. Il y a des poireaux, des carottes, des pommes de terre, des oignons, des petits pois, des choux de Bruxelles, des tomates et des concombres. Si certains d’entre eux étaient sous serre par exemple, on pourrait dire que nous sommes en automne ou début d’hiver et que l’on pourrait donc tous les trouver ensemble, prêt à la récolte. Mais ce n’est pas le cas, personne n’est sous serre, et les tomates ou petits pois (qui se récoltent au printemps et en été), côtoyant des poireaux ou des oignons (se récoltant en automne, voire même en hiver) ça me gêne assez. De plus, d’après les illustrations et le début du récit où une abeille butine, nous sommes au printemps ou en été ; on ne devrait donc pas trouver de poireaux, entre autres, déjà prêts à la récolte. Je trouve ça un peu dommage de ne pas avoir fait attention à ce point. Puisque le but du livre est quelque peu éducatif, le fait de trouver tous ces légumes mélangés dans le même potager va induire en erreur les jeunes lecteurs.

Cependant, les illustrations sont assez sympathiques. Simples et aux couleurs épurées, elles correspondent parfaitement au monde que décrit l’auteure et au lectorat visé (5 ans).

L’avis de Coco :

J’ai particulièrement aimé cet album. Il est doux et aussi amusant. Contrairement à Loulou je n’ai pas du tout été choquée par la présence de certains légumes dans le potager. Il faut dire qu’en tant que bonne citadine, je suis incapable de vous donner les dates de plantation ou de récolte des légumes ou des fruits. Qui sait, maintenant que j’ai un jardin peut-être que ça va changer…

En tout cas, j’ai trouvé toutes les situations très réalistes et les dialogues sont à la fois marrants et éducatifs. On y apprend de nouveaux mots (oui, même les adultes comme moi apprennent des choses avec cet album) et quelques petites infos utiles en jardinage. Ah, et petite anecdote qui nous a turlupinées avec Loulou : « chicane » est un terme québécois qui signifie « dispute ». On est comme ça au bazar on est généreuse et on aime partager nos découvertes 

Vive l’école des Lettres Enchantées, illustré par Marine Benezech (paru au 2ème semestre 2015)

Ce matin, devant l’école des Lettres Enchantées, il y a du monde. Toutes les lettres de l’alphabet sont au rendez-vous pour aider les enfants à apprendre correctement l’écriture. Une à une, on voit les lettres défiler. Chaque double page est dédiée à une lettre. Sur la gauche, un dessin de la lettre humanisée, à droite, un petit texte où la lettre dont on parle est à chaque fois mise en valeur. Ces textes parlent la plupart du temps de choses que l’on peut faire à l’école, entre copains, bref des activités du quotidien.

L’avis de Loulou :

On retrouve ici un abécédaire assez classique, mais qui fonctionne bien. Les lettres humanisées sont rigolotes et attirent l’œil de l’enfant. Les textes sont simples, mais bien pensés. On ne trouve pas que des mots commençant par la lettre en question. On peut trouver la lettre à l’intérieur d’un mot ou en fin de mot. Avec un accent ou non, en majuscule ou en minuscule. Cela montre finalement au lecteur diverses façons d’utiliser les lettres et les différentes manières de les prononcer qui vont avec. C’est un bon livre à lire avec un adulte pour se familiariser avec l’alphabet ou seul pour s’amuser avec ce que l’on a déjà appris.

J’ai aimé le fait que le gros des textes soit écrit en script, mais qu’à chaque fois la petite phrase de présentation de la lettre suivante soit dans une écriture cursive. Là encore cela permet à l’enfant de voir différentes façons d’écrire les lettres et de bien assimiler.

Même si le tout est simple, j’ai vraiment accroché sur les lettres humanisées, drôles, nettes, faisant chacune une activité. Peut-être un moyen pour certain de retenir un peu mieux leur alphabet !

L’avis de Coco :

Les abécédaires ne sont clairement pas ma tasse de thé. Je n’en ai d’ailleurs pas ouvert beaucoup dans ma vie. Ceux que j’ai dû feuilleter quand j’étais petite ne sont déjà qu’un vague, très vague souvenir. Aussi je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre en ouvrant cet abécédaire. La surprise fut donc totale parce que j’ai adoré. Le fait d’avoir humanisé les lettres et de les avoir transformées en petits écoliers est génial. Le texte explicatif à côté de l’image allie encore une fois, à notre plus grand bonheur, l’humour à une typographie particulière qui permet de repérer facilement la lettre dont il est question.

En bref c’est un album idéal pour travailler son alphabet ou apprendre à jouer avec les mots.

Ensuite, nous avons reçu deux albums d’autres auteurs :

La maison penchée de Marine Benezech, qui est l’illustratrice de deux ouvrages ci-dessus (paru au 1er semestre 2015)

Martin, 7 ans, adore aller chez sa mamie Ratatouille. En effet, elle vit dans une maison spéciale : elle est toute penchée. Du coup, à l’intérieur, les meubles ont un pied tranché pour pouvoir être droit. Le plus drôle ce sont les parties de glissades que peut faire Martin sur le sol. Mais un jour, alors qu’il farfouille dans une vieille malle, il trouve une photo de la maison il y a quelques années. Et elle n’était pas penchée du tout ! Martin court donc demander des explications à sa grand-mère. Celle-ci se met à lui raconter l’histoire merveilleuse de sa maison penchée.

L’avis de Loulou :

Un petit album tout simple, tendre, drôle, au côté merveilleux bienvenu et où l’on retrouve avec joie les illustrations de Marine Benezech, déjà découvertes dans des albums écrits par Dominique Curtiss, si on aime son style.

J’ai bien aimé la complicité entre le petit garçon et sa grand-mère, c’est adorable comme tout. L’histoire qui explique pourquoi la maison est penchée est rigolote, mais en même temps je n’ai pas totalement accrochée. C’est un peu trop tiré par les cheveux pour moi et froid dans sa forme d’écriture. Mais cela reste une sorte de petit conte tout à fait sympathique pour les enfants.

L’avis de Coco :

Attention, histoire mignonne droit devant. Pourquoi une maison se mettrait-elle subitement à pencher alors que quelques années plus tôt elle était parfaitement normale ? C’est la question à laquelle Martin va tenter de répondre. Et pour cela, il va devoir se plonger dans les souvenirs de ses grands-parents. Des souvenirs poétiques qui vont amener un peu de fantastique dans sa vie.

Forcément lorsqu’on parle de fantastique, je suis partante. L’histoire est d’ailleurs bien construite : on ne s’attend pas du tout à cette fin étonnante. Avec en plus un petit format malléable pour les petites mains, cet album a tout pour plaire.

Armand le Pélican Gourmand de Valérie Diez et Camille Nicolazzi, paru fin 2015

Armand est un pélican bien triste. Tous les oiseaux de son entourage peuvent communiquer entre eux. La plupart du temps avec un beau chant. Mais Armand ne sait pas prononcer un mot car il ne connaît pas ses lettres. Un jour, pour ne plus être seul, il décide de partir à la chasse aux lettres, pour enfin apprendre à parler. C’est en tombant sur le bateau d’un pêcheur où se trouve un panier rempli de lettres, qu’Armand va pouvoir réaliser son rêve. Il reviendra parmi les siens chargé de choses à dire.

L’avis de Loulou :

C’est l’album qui m’a le moins plu de cette sélection. Je n’ai pas accroché au texte. L’arrivée d’Armand sur le bateau de pêche est un peu sans queue ni tête et sa façon d’avaler les lettres pour enfin savoir parler est trop loufoque. Je pense que le principe de ce livre est de montrer que l’on peut surmonter ses complexes ou trouver une solution à un handicap, savoir affronter le regard des autres. Mais ce n’est pas assez poussé, pas assez travaillé pour moi, on tourne trop autour du pot avec de grands essais de métaphores qui ne marchent pas particulièrement bien.

Par contre, j’ai aimé les dessins très simples et ronds, notamment les doubles pages remplies d’oiseaux.

L’avis de Coco :

C’est l’album qui m’a le plus attiré de toute la sélection (comme quoi, avec Loulou, on n’a pas les mêmes goûts). J’ai adoré ses illustrations aux couleurs estompées et son graphisme à la fois abstrait et géométrique. Quant à l’histoire, elle me parle forcément puisqu’elle nous conte la puissance des mots. Car le petit Pélican a un gros souci de communication, il ne peut pas parler, il ne connaît pas de mots. Déterminé à se faire accepter des autres oiseaux, il va alors braver les dangers pour chasser les mots et enfin pouvoir parler. C’est un album superbe dans son thème. J’ai malheureusement eu un peu de mal à rentrer dans le texte. Trop froid à mon goût. Mais cela est largement compensé par les illustrations.

Et voilà pour cette sélection de chez Chouetteditions, que nous avons beaucoup appréciée dans l’ensemble ! Nous les remercions d’ailleurs énormément et espérons pouvoir continuer un bout de partenariat ensemble à l’avenir ! Merci mille fois !

Bonne lecture québécoise les loulous et les cocos !